Anne de Tinguy (dir.)

Regards sur l’Eurasie. L’année politique est une publication annuelle du Centre de recherches internationales de Sciences Po (CERI) dirigée par Anne de Tinguy. Elle propose des clefs de compréhension des événements et des phénomènes qui marquent de leur empreinte les évolutions d’une région, l’espace postsoviétique, en profonde mutation depuis l’effondrement de l’Union soviétique en 1991. Forte d’une approche transversale qui ne prétend nullement à l’exhaustivité, elle vise à identifier les grands facteurs explicatifs, les dynamiques régionales et les enjeux sous-jacents.

Anne de Tinguy (dir)

Regards sur l’Eurasie. L’année politique est une publication annuelle du Centre de recherches internationales de Sciences Po (CERI) dirigée par Anne de Tinguy. Elle propose des clefs de compréhension des événements et des phénomènes qui marquent de leur empreinte les évolutions d’une région, l’espace postsoviétique, en profonde mutation depuis l’effondrement de l’Union soviétique en 1991. Forte d’une approche transversale qui ne prétend nullement à l’exhaustivité, elle vise à identifier les grands facteurs explicatifs, les dynamiques régionales et les enjeux sous-jacents. Ce volume est consacré à la guerre en Ukraine.

Corentin Cohen

Si les confraternités nigérianes occupent une place croissante dans les médias au nom de la menace criminelle qu’elles représentent, elles n’ont fait l’objet d’aucun travail de recherche de terrain au Nigeria ni en Europe. Cette médiatisation alimente une confusion croissante entre les catégorisations juridico-policières qui sont utilisées pour les définir et les pratiques et discours panafricains, de solidarité ou d’émancipation, qu’elles mettent en avant. L’approche socio-historique développée dans cette étude permet de mettre en perspective l’expansion globale des confraternités depuis les années 2000, et de proposer un autre regard sur le rôle de ces sociétés secrètes et leur inscription dans des économies politiques et des territoires différents. En Europe, les confraternités sont d’abord des institutions sociales encadrant la jeunesse et les diasporas. Elles assurent la reproduction du pouvoir des élites tradition-nelles et politiques à l’étranger par la captation des rentes liées aux migrations (remittances), et jouent donc un rôle clé dans la production d’une forme de mondialisation de la société nigériane par le bas, participant à l’implantation des institutions morales et sociales du sud du pays en Europe. Derrière un discours d’empowerment et de solidarité, les confraternités sont ainsi un réseau transnational qui per-pétue un ordre conservateur, une hiérarchie sociale et des inégalités qu’elles contribuent à naturaliser.

Hélène Combes

Si la feria de Séville s’inscrit dans une tradition vivace en Espagne de festivités populaires, elle s’en distingue nettement par son caractère très fermé. Organisée autour de casetas, petites maisons de toile aux décors traditionnels, la fête se déroule dans ces espaces qui sont très majoritairement privés (seules 1,7% des 1052 casetas sont ouvertes au public). Lieu de l’entre-soi social par excellence, de l’entretien (parfois sur plusieurs générations) d’un capital social familial, la feria questionne la société démocratique et donne lieu à des débats et controverses, notamment sur sa prise en charge municipale. Son modèle de fête à guichets fermés génère aussi un phénomène de « contre-feria », qui s’est notamment développé au moment de la transition démocratique autour d’organisations politiques d’opposition. Proposer une histoire de la feria qui morcelle le collectif, qui le désenchante et le réinscrive dans les trajectoires sociales et politiques des individus et des groupes qui y participent permet de faire de la feria, objet emblématique des chroniques locales et des brochures touristiques, un objet de sciences sociales depuis lequel s’étudient réseaux sociaux et politiques.

300 000 Français sont installés de manière permanente dans la capitale britannique. Ils ne constituent pas une communauté amalgamée, mais des groupes sociaux singularisés par des différences de capital économique et de capital culturel. L’Etat français a développé à Londres un important dispositif institutionnel destiné à répondre aux besoins de cette diaspora (services consulaires, institut culturel, établissements scolaires, aides aux entreprises). Le dispositif est complété par des structures associatives dans le domaine social. Les Français de Londres disposent également de leur représentation politique : député, conseillers consulaires, conseillers à l’Association des Français de l’étranger. Ces mandats donnent lieu à des élections et à une extraterritorialisation de la politique française. Le Brexit contraint les Français de Londres – qui ont conservé leur nationalité française – à s’interroger sur l’avenir de leur statut de résident, qu’ils doivent négocier avec l’Etat britannique, et sur les nouvelles politiques migratoires du Royaume-Uni, qui rendront l’installation à Londres plus difficile.

Elisa Benker, Céline Cantat, Shoshana Fine, Virginie Guiraudon, François Gemenne, Thibaut Jaulin, Antoine Pécoud, Catherine Perron, Michelle Reddy, Filip Savatic, Hélène Thiollet, Catherine Wihtol de Wenden
Chercheurs des projets MAGYC et PACE

Publiée dans le contexte du Brexit, cette étude analyse la politique d’armement du Royaume-Uni pour éclairer le « double rapport » du Royaume-Uni à l’Europe : être in en prenant part à des coopérations avec d’autres Etats européens, être out en restant éloigné, voire en quittant des programmes multilatéraux en Europe. A partir de données exclusives, elle montre que la participation britannique au programme d’avion de transport militaire A400M résulte d’une stratégie portée par un assemblage d’acteurs politiques, administratifs et industriels qui, percevant l’A400M comme un « camion » plutôt que comme une « voiture de course », utilisent le cadre de coopération européenne pour maintenir le rang de l’industrie de la défense britannique. Quant à la décision de ne pas participer au programme EuroMale, elle découle d’un affaiblissement de la volonté des acteurs politiques et, concomitamment, d’un renforcement des relations conflictuelles entre les administrations et les industries françaises et britanniques. Ce faisant, cette recherche contribue à la littérature sur l’acquisition d’armements par des partenariats internationaux en études stratégiques, et à celle sur l’intégration différenciée en études européennes.

Regards sur l’Eurasie propose des clefs de compréhension des événements et des phénomènes qui marquent de leur empreinte les évolutions d’une région, l’espace postsoviétique, en profonde mutation depuis l’effondrement de l’Union soviétique en 1991. Forte d’une approche transversale qui ne prétend nullement à l’exhaustivité, elle vise à identifier les grands facteurs explicatifs, les dynamiques régionales et les enjeux sous-jacents.

Gilles Lepesant

Une semaine avant le troisième sommet du Partenariat oriental à Vilnius des 28 et 29 novembre 2013, l’Ukraine suspendait la préparation d’un accord d’association avec l’Union européenne, en négociation depuis 2007. Lorsqu’il fut finalement signé en juin 2014, le président Ianoukovitch avait fui le pays sous la pression populaire, et l’intégrité du territoire se trouvait contestée à l’Est par des séparatistes et leurs alliés russes. Cette remise en cause intervenait paradoxalement à un moment où la cohésion du pays paraissait mieux établie que dans les années 1990. L’Ukraine, loin d’être coupée en deux, est constituée de fragments d’Empires déchus qui ont des raisons objectives de s’inscrire dans l’Etat, aussi récent soit-il. Sa géographie électorale comme sa géographie économique sont de même traversées non par une faille opposant deux blocs, mais par différentes lignes de partage qui n’annoncent pas nécessairement une dislocation de l’Etat. Cette diversité n’a jamais été institutionnalisée depuis l’indépendance, les différentes forces politiques jugeant pour des raisons diverses inopportun de remodeler le régime centralisé hérité de la période soviétique. Présentée comme une priorité par les députés élus en 2014, la réforme de la gouvernance territoriale intervient aujourd’hui dans un contexte où les régions motrices du pays sont paralysées ou menacées par la guerre.

Tanja Mayrgündter

L’Union européenne a dû faire face à de nombreux défis ces dix dernières années, qu’il s’agisse de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne ou de la crise économique et financière. Si la logique de l’action et les jeux institutionnels ont transformé d’autres domaines du politique, la sphère de l’élargissement a paradoxalement résisté en grande partie aux changements. Le « supranationalisme intergouvernemental » demeure pour ainsi dire la principale caractéristique de la politique et des politiques de l’élargissement. Si la finalité n’a pas changé, on observe néanmoins des évolutions de la configuration des éléments intergouvernementaux et supranationaux : d’un côté les forces intergouvernementales se sont renforcées, de l’autre le « tournant technique » a nourri l’élan supranational. Finalement, c’est un nouvel équilibre qui a été atteint, sous les auspices du supranationalisme intergouvernemental “persistant”.

Francesco Ragazzi

Le gouvernement français a récemment annoncé un plan de « lutte contre la radicalisation » assorti d’une série de mesures qui ont pour but de prévenir le passage à l’acte violent. Si le terme de radicalisation n’est pas nouveau dans le langage politique français, il marque un tournant dans une politique antiterroriste qui, bien que reposant en grande partie sur des mesures administratives, se justifiait avant tout par l’approche judiciaire. La France se rapproche ainsi des Pays-Bas et du Royaume-Uni, qui ont développé ce type de politiques depuis la moitié des années 2000. Mais que siginifie exactement « lutter contre la radicalisation » ? Comment expliquer ce nouveau tournant du gouvernement français, et que peut-on apprendre de dix ans d’expériences de ces deux pays européens ? Cette étude montre que la lutte contre la radicalisation agit comme un discours efficace de légitimation de l’action policière au-delà de ses domaines de compétence habituels, en investissant de nombreux domaines de « gestion de la diversité » tels que l’école, la religion ou les politiques sociales. Elle retrace la diffusion de ce discours au sein des instances européennes et analyse, au travers de la notion de « multiculturalisme policier », les effets de ses déclinaisons juridique et administrative.

Retour en haut de page