Online Encyclopedia of Mass Violence

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Violence de Masse & Résistance / Mass Violence & Resistance, une publication en ligne du CERI*

Le CERI vient de mettre en ligne un nouveau site, celui de Violence de Masse & Résistance / Mass Violence & Resistance. MV&R a un objet d’étude, la violence de masse et les résistances qu’elle génère, une méthode, celle de la recherche scientifique, et un moyen de diffusion, le numérique.

L’objet d’étude de MV&R couvre ce qu’on appelle par convention « les violences de masse ». Ce terme recouvre les génocides, les massacres, et toute violence systématiquement ciblée sur une population pré-définie. La revue a vocation à refléter les débats relatifs à ces événements, en privilégiant ceux survenus aux 20ème et 21ème siècles.

Le terme de « violence de masse » a l’avantage de rester extérieur au domaine du droit international sans pour autant l’exclure. On sait, par exemple, que les massacres de Bosnie de 1995 ont été reconnus comme génocidaires par le Tribunal pénal international de Yougoslavie (TPIY), mais non par les Etats serbe et russe. En 2015, la Russie a mis son veto à cette reconnaissance par l’ONU. Certains chercheurs discutent également l’application du qualificatif de génocide à des massacres qui ont surtout touché des hommes, même si les campagnes concomitantes de viols collectifs se sont déroulées sous le signe de la « purification ethnique ». Ainsi les arènes de discussion divergent-elles entre elles, qu’elles soient interétatiques, judiciaires ou académiques, mais elles sont aussi traversées de conflits internes.

MV&R poursuit l’entreprise inaugurée en 2008 par l’Encyclopédie en ligne des violences de masse sous la direction de Jacques Semelin, et confirme l’évolution entamée par Claire Andrieu, devenue rédactrice en chef en 2011. La publication élargit le champ de l’étude en incluant les diverses formes de résistance, pour donner une vision plus globale de la violence de masse et de ses effets, et pour analyser la façon dont l’oppression et la résistance se répondent et se construisent réciproquement. Dans le domaine du sauvetage, les études scientifiques ont commencé de manière sporadique il y a une trentaine d’années. Elles sont plus nombreuses aujourd’hui mais portent surtout sur l’aide aux juifs persécutés sous le Troisième Reich. L’aide aux tsiganes dans la même période et l’aide aux persécutés de tous les régimes n’ont pas encore constitué un champ scientifique reconnu. Les autres formes de résistance aux violences de masse, dans lesquelles on peut inclure les Résistances nationales ou locales, sont déjà plus connues, mais les comparaisons intra-européennes n’ont pris un essor scientifique que récemment, tandis que les résistances asiatiques sont dans l’ensemble restées en-dehors du champ de la recherche. MV&R a vocation à combler ces lacunes.

La méthode scientifique s’impose à MV&R comme à toute revue académique. Sa mise en œuvre passe par la relecture en double aveugle pratiquée pour chaque article. Elle repose aussi sur le réseau de recherche Violence de masse et Résistance, un réseau académique interdisciplinaire basé au Centre de Recherches Internationales (CERI) et au Centre d’histoire de Sciences Po, Paris.

Tout champ de la recherche génère des controverses, mais les violences de masse et les résistances qui leur sont opposées ont pour particularité d’avoir détruit ou mis en jeu la vie ou l’intégrité physique d’hommes, de femmes et d’enfants. Ces événements demeurent gravés dans les mémoires individuelles et collectives. Constituant pour cette raison des événements presque sans fin, ces faits continuent de jouer un rôle sur les scènes nationales et internationales. Du côté des héritiers symboliques des bourreaux, qu’il s’agisse de groupes sociaux ou d’Etats, la tentation est forte de nier l’existence de ces massacres ou de ces génocides. D’où l’exigence redoublée de rigueur scientifique pour disqualifier les négationnismes.

La revue est ouverte à toutes les disciplines. La mise en débat des perspectives disciplinaires constitue même l’un des intérêts de la publication. L’histoire, la science politique, le droit, la psychologie sociale, la psychopathologie (des victimes comme des bourreaux), chaque science humaine ou sociale à son mot à dire. L’analyse empirique est privilégiée, mais la théorie apporte aussi des éclairages essentiels. Par exemple la déconstruction de l’action de sauvetage dans l’Allemagne nazie selon les méthodes de la théorie sociale permet de réfléchir en termes d’interactions et de processus. En dé-personnalisant l’acte, l’étude théorique met en lumière le champ de l’action et évite l’écueil de l’hagiographie.

Le numérique est un grand atout pour la revue. Il permet une diffusion mondiale. MV&R donne accès au savoir même dans certains des pays où les libertés sont réduites. Son lectorat –entre 250 000 et 350 000 visites par an- se trouve principalement aux Etats-Unis et en Europe, mais aussi en Asie et en Afrique. La souplesse du numérique permet de publier en plusieurs langues, en flux continu (comme des « Varia » d’une revue papier) ou sous la forme de numéros spéciaux périodiques. Le moteur de recherche permet d’établir des liens à la convenance du lecteur et la navigation par la carte ouvre la revue au public citoyen peu familier des index alphabétiques. Au total, l’objet d’étude, la méthode et le support peuvent constituer ensemble un outil remarquable pour le progrès de la recherche.

*Par Claire Andrieu, professeure des universités, chercheure associée au CERI, rédactrice en chef de MV&R

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