Le PS, l'Allemagne et l'Europe

02/05/2013

Récemment, un commentateur britannique se demandait pourquoi François Hollande avait autant de mal à imposer ses réformes, alors que le Parti socialiste contrôle le gouvernement, les deux assemblées et la majorité des Régions. L'étonnement révélait une ignorance sur la réalité du PS qui n'a jamais tranché entre deux orientations : être un parti social-démocrate pro-européen ou, au contraire, l'héritier du socialisme national anticapitaliste. Ses déchirements des derniers jours sur l'Europe et l'Allemagne ont fait resurgir ce défaut de ligne.

François Hollande et Jean-Marc Ayrault, mais aussi Manuel Valls et Pierre Moscovici, incarnent une ligne sociale-démocrate qui, dans le sillage de Jacques Delors et Michel Rocard, assume une orientation réformiste et européenne. Prenant au sérieux l'interdépendance économique, ils ont compris que la France devait réduire son déficit et opérer des réformes structurelles compatibles avec la zone euro.

À l'opposé, le courant « Maintenant la gauche », mais aussi Arnaud Montebourg et certains fabiusiens, continuent de penser que la France devrait relancer l'économie par les déficits des budgets publics. Pour eux, toute idée de réforme des dépenses sociales revient à se transformer en ennemi du peuple et en cheval de Troie de la mondialisation néolibérale.

Pour le Président et son Premier ministre, cette situation est une vraie difficulté. En tant que responsables gouvernementaux, ils savent que la France n'a aucun intérêt à se brouiller avec l'Allemagne et que le contrôle des finances publiques n'équivaut pas forcément à soutenir l'austérité. De l'autre, ils ne peuvent pas rester indifférents, dans la perspective des élections de 2014, aux pressions de l'aile gauche du PS qui voudrait laisser filer les déficits et, chez certains, claquer la porte au nez d'Angela Merkel et de l'euro.

Que voudrait dire, d'ailleurs, engager une « confrontation » avec l'Allemagne, comme Claude Bartolone l'a appelé de ses voeux ? Être le leader des pays du Sud qui, tels l'Espagne, la Grèce et le Portugal, atteignent une dette de près de 100 % de leur PNB ? Au contraire, il faut sortir de cette polarisation Nord/Sud en favorisant la négociation entre les pays dont les économies vont mal et ceux qui, comme l'Allemagne, la Pologne ou le Danemark, se portent mieux.

François Hollande et Jean-Marc Ayrault doivent maintenir le cap du dialogue avec l'Allemagne tout en continuant les réformes internes. François Mitterrand et Pierre Mauroy furent confrontés au même défi qu'eux, en 1983, lorsqu'une partie du PS de l'époque (le Ceres de Jean-Pierre Chevènement, mais aussi Laurent Fabius) voulait que la France laisse filer sa monnaie et quitte le mécanisme de change du Système monétaire européen. La suite a donné raison à Mitterrand. Il avait, il est vrai, deux avantages sur Hollande : son leadership au sein du parti était plus affirmé et l'Europe était moins décriée par les opinions publiques.

Les partisans de l'Europe au sein du Parti socialiste devraient d'ailleurs se demander s'il ne serait pas temps de se séparer de leur aile gauche, qui les empêche d'assumer une modernité politique, et s'entendre avec le centre-droit, celui qui ne s'est pas toujours retrouvé dans la contestation du « mariage pour tous » et qui gagnerait à s'émanciper de sa droite.

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