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22.04.2024

Égalité des chances : 160 lycéens invités par les 10 Sciences Po

Les 10 instituts d'études politiques (IEP) français ont affiché leur engagement en faveur de l'égalité des chances en invitant 160 élèves boursiers de terminale – tous suivants l'un des programmes de préparation aux différents IEP – à un événement de deux jours à Paris. Le dispositif pionnier Conventions Éducation Prioritaire existe à Sciences Po depuis 2001 et compte aujourd'hui près de 200 lycées partenaires.

Reportage vidéo sur une journée qui peut se résumer en une phrase : "l'égalité des chances, c'est l'avenir".

Les lycéens invités ont pu faire preuve de leur excellent niveau en présentant devant un jury au Sénat pour 20 d'entre eux leur trajectoire personnelle en 180 secondes et pour 4 groupes le fruit de leur réflexion sur le thème “Mon projet Notre République”. Tous ont pu bénéficier de visites du campus parisien de Sciences Po, du Sénat et du lycée Henri IV.

Amire Terrak, élève au lycée Saint-Exupéry (Académie de Nancy-Metz) suivant l'atelier Sciences Po, a été lauréat pour la présentation de son parcours au Sénat. Découvrez son expérience.

Pour raconter mon histoire, il faut d’abord raconter celle d’une femme. 

Cette femme venait d’un village berbère, perché tout haut dans les montagnes. Ce village, cette femme l’aimait, elle aimait particulièrement un phénomène propre à ce village : si vous regardez la montagne à une certaine heure, un halo lumineux, une sorte de couronne solaire se pose sur le massif rocheux. Mais seule, enceinte et sans perspective d’avenir dans une région frappée par la misère, elle décida de traverser la Méditerranée. 

Cette femme, c'était ma mère, la terre qui nous a accueillis, vous la connaissez, c’est la France. L'acclimatation fut difficile, nous avons commencé par vivre dans un centre d'accueil pour mères seules, dans un quartier de Metz. Alors, Metz se situe en Moselle et pour ceux qui ne seraient pas au fait, ce qui fait la singularité de la Moselle, c’est son austérité. Il pleut, il fait gris et les usines désaffectées tapissent l’horizon. Les mauvaises langues disent à tout bout de champ "c’est moche" et "à fuir au plus vite". 

Mais je n’ai jamais fait ce constat, en grandissant là-haut j’ai été ébloui par une chose : la chaleur humaine de son peuple. Personne n’a jamais rechigné à nous aider, que ce soit les bénévoles des Restos du Cœur, à qui je dois de ne pas avoir connu la famine. Que ce soit les associations culturelles qui m’ont fait découvrir le théâtre, la lecture et à qui je dois mes victoires dans des concours d’éloquence ou de plaidoirie. Je peux même citer les élus locaux qui m’ont aidé à devenir conseiller départemental jeune de Moselle et maire de jeunes de ma ville. En bref, la grisaille inhérente à ce bout de terre est vite balayée par l’éclat de la générosité de ses habitants.

En y réfléchissant, ma mère a fait un bon choix en venant en France. Elle a peut-être perdu son soleil, mais nous avons retrouvé la chaleur de son village dans le cœur des citoyens français et la lumière de ces montagnes dans les valeurs de la République. 

Partant de cela, je n’ai qu’une seule ambition : rendre au centuple ce qu’on m’a donné. Vous savez, la Moselle a été durement frappée par la fin de la sidérurgie, cela a causé une incroyable augmentation du chômage. Je vois de jour en jour la pauvreté enfler. En tant que bénévole dans ma mairie, j’essaie de réaliser des actions, de donner aux nécessiteux. Mais c’est toujours insuffisant.

Je ne peux pas rester les bras croisés alors je souhaite intégrer Sciences Po, y récupérer les clés pour comprendre le monde, les compétences pour développer mon territoire. Ainsi, retourner en Moselle et continuer d’être actif pour mes concitoyens, devenir un élu et contribuer à la vie locale. Mon parcours entier, de cet accueil en France, en passant par mes engagements, qu'ils soient chez Amnesty International ou dans mon conseil municipal. En continuant vers ma voie scolaire et mon objectif d’obtenir une place à Sciences Po.

Tout cela a pour seule finalité de rendre ce qu’on m'a donné. Ceux qui m’ont donné n’attendent rien, mais moi je leur dois tout !

Au départ, je me dois de l’avouer, j’étais empli de préconceptions en pensant à mon voyage futur. Des préjugés sur le monde parisien, une appréhension sur mon accueil et le déroulement du séjour. Ma réelle peur était de revenir les mains vides, d'avoir été sélectionné parmi des milliers et d'échouer si près du but. Cela peut sembler puéril mais perdre m'est sensiblement douloureux et familier. 

Cependant, mon arrivée à Paris a balayé presque instantanément ces pensées parasites. Ce n’est pas le décor de la ville lumière qui m'a particulièrement marqué mais l'accueil qui m'a été fait. Des autres élèves, en passant par les étudiants tuteurs et l'équipe du pôle égalité des chances de Paris : tout le monde a été super avec moi. Ces comportements bienveillants m’ont permis d’être apaisé tout au long des épreuves, bien que l’emploi du temps et la pression liée à l’événement pouvaient être quelque peu source de stress. Je tire de ces rencontres une gratitude incomparable, je pense qu’elles ont transformé mon expérience. 

Les épreuves en elles-mêmes, et plus particulièrement celle de la présentation individuelle, m'ont éveillé. J’étais assez frileux de devoir dévoiler une certaine intimité, celle de mon vécu en France, du passé de ma mère en Algérie face à une si grande audience. Mais la victoire n’en était que plus honorifique. Dans ce discours, je m'étais fait le héraut des enfants d’immigrés, des Mosellans souffrant de la pauvreté ambiante et de mon lycée ayant cru en moi.

Pour ajouter du contexte, mon lycée souffre d’une mauvaise réputation, (bien mal méritée). C’est grâce à l’atelier Sciences Po de ce dernier, des outils pédagogiques mis en place par la direction et de l’implication des professeurs de mon atelier que j’ai pu participer à ce projet. Ma victoire est une fierté retentissante pour mes proches et moi, mais je souhaiterais qu’elle puisse inspirer les jeunes aux parcours similaires au mien ou tout simplement ceux ayant la conviction profonde qu’il faut continuer à aller de l’avant.

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