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24.08.2017

Rétro #5 : Emmanuel Macron, promotion 2001

Tout au long de l’été, nous vous proposons de revivre des moments forts de l’année universitaire 2016-2017. Aujourd’hui, retour sur l’élection du nouveau Président de la République, Emmanuel Macron, diplômé de Sciences Po en 2001. L’occasion pour Sciences Po de retracer son parcours universitaire à travers les appréciations de ses professeurs. Qui n’avaient pas manqué de relever le potentiel de l’étudiant Macron...

(article publié le 08/05/2017)

“Un étudiant tchèque en échange universitaire qui n’a pas vu un coiffeur depuis des décennies” : c’est ainsi qu’Emmanuel Macron apparaît pour la première fois à Sciences Po à Marc Ferraci, un autre étudiant fraîchement admis, qui va devenir son plus proche ami, et qui sera son témoin de mariage quelques années plus tard - l’occasion de rappeler cette anecdote capillaire dans son discours. Portrait des années d'étudiant du plus jeune président de la Ve République.

Emmanuel Macron a 21 ans quand il entre à Sciences Po. Après trois années de prépa littéraire au lycée Henri IV, soldées par deux échecs au concours d’entrée à l’École Normale Supérieure, il serait entré à Sciences Po pour “panser ses plaies”, voire “avec un certain esprit de revanche”¹. C’est en tout cas un candidat “qui inspire confiance et sympathie” et une “personnalité enthousiaste et vivante” que recommandent ses professeurs de khâgne dans son dossier de candidature pour la rue Saint-Guillaume. Avec en tête un projet d’avenir encore ouvert à toutes les possibilités, plus ou moins porté vers une carrière dans l’enseignement supérieur “peut-être à l’étranger”, qui lui fait choisir la section “Internationale” (l’une des quatre encore à vigueur à l’époque).

“Service public” et philosophie politique

Bien souvent expédiée en une ligne coincée entre son parcours de khâgneux au Quartier Latin et ses années de jeune énarque, son passage à Sciences Po constitue pourtant une période plus décisive qu’il n’y paraît. À commencer par le choix d’une carrière publique : à l’entrée en 3è année - la scolarité n’en comptait alors que trois - il change de section pour rejoindre la section "Service public".  Une troisième - et dernière-  année qu’il effectuera en deux ans, pour pouvoir mener à bien en parallèle ses études de philosophie à l’Université de Nanterre, où il obtient une maîtrise puis un DEA. Deux trajectoires parallèles : ses mémoires sont dédiés à des penseurs politiques : Machiavel et Hegel. Pour compléter l’agenda de ce jeune homme occupé, c’est au même moment qu’il devient l’assistant éditorial de Paul Ricoeur pour son ouvrage La mémoire, l’histoire, l’oubli paru en 2000 au Seuil.

“Facilités évidentes”

Tout cela ne l’empêche pas d’être un brillant étudiant qui ne cesse de progresser. Signe que le choix de la section "Service public" était le bon, ou que la répartition des cours sur deux années lui permet de mieux concilier tous ses engagements universitaires ? L’année de son diplôme, il obtient en tout cas la meilleure note de sa conférence en “Économie approfondie”, “Enjeux politiques” et “ Finance publique”... “Élève brillant”, “doté d’une pensée originale et construite” et d’une “grande maturité” : l’appréciation de son professeur de “Protection sociale” - qui note “sa culture évidente du sujet” - donne le ton : la plupart des commentaires sont élogieux. Ses professeurs soulignent notamment ses “facilités évidentes à l’expression orale, tant sur le fond que sur la forme”. La pratique du théâtre depuis ses années de lycée, complétée par les stages au cours Florent, est appréciée à sa juste valeur dans ce temple de l’éloquence qu’est Sciences Po.

Des rencontres qui comptent

L’étudiant Macron aime visiblement parler, mais pas monologuer. “C’était le meilleur étudiant de ma conférence, se souvient Ali Baddou, qui fut l’un de ses enseignants, mais je me souviens surtout qu’il adorait poser des questions, dialoguer”. Même souvenir du côté des appariteurs de Sciences Po (responsables de l’accueil des étudiants) : “il était proche de nous et venait tout le temps pour discuter”. Son professeur, l’historien François Dosse - qui l’a présenté à Paul Ricœur - souligne “sa capacité de faire la synthèse entre les différents enseignements et de les remobiliser”¹ et “une animation constante des débats dans le groupe, d’un niveau toujours excellent”.

Avec son professeur Jean-Marc Borello, la conversation démarrée à Sciences Po se poursuit depuis dix-sept ans : cet entrepreneur de l'économie sociale (groupe SOS, 15000 salariés) est aujourd'hui l'un des piliers du mouvement En marche ! De même qu’avec son condisciple Aurélien Lechevallier, avec qui il prépara l’ENA, et qui le conseille aujourd’hui pour les affaires internationales; ou Benjamin Griveaux (diplômé en 1999), aujourd’hui porte-parole d’En Marche. Sans oublier son proche ami, l’économiste Marc Ferraci, qui le conseille aujourd’hui sur l’économie. Des liens et des amitiés qui durent davantage que son attirance passagère pour le mouvement chevènementiste : après avoir participé en 1998 à une université d’été du Mouvement des Citoyens à Perpignan, il effectue en 2000 un stage au cabinet de George Sarre, maire du XIè arrondissement et proche de Jean-Pierre Chevènement. “L’aventure s’arrêtera là”, note Nicolas Prissette dans l’ouvrage qu’il consacre à Emmanuel Macron².

“Élégance morale” et “esprit très convivial”

Sa relation avec Sciences Po, en revanche, n’a jamais subi de coup d’arrêt. À peine diplômé de l’ENA, et “alors que les autres membres de l’Inspection Générale des Finances retournent traditionnellement donner des cours d’économie dans les hautes écoles de la République, lui choisit d’enseigner la culture générale à Sciences Po”, note François-Xavier Bourmaud³. Quelques années plus tard, Emmanuel Macron se montrera tout aussi prodigue de ses talents d’orateur pour ses cadets : invité d’honneur de la cérémonie de diplômation en 2015 (à revoir ci-dessous), il revient trois fois en 2016, pour le Gala des étudiants, un colloque de l’École des affaires internationales, un débat sur l’Europe, et...le pot de départ en retraite d’un appariteur avec qui il s’était lié d’amitié.

Avant que l’expérience ne vienne parfaire sa maîtrise de la rhétorique, il arrivait durant ses études à Sciences Po que son enthousiasme et sa facilité à écrire le rende un peu bavard :  en témoignent les “trop long” qui émaillent quelques copies… Autre (petit) défaut de l’étudiant exemplaire “une tendance à être trop certain”, relève un de ses professeurs, “contrebalancée par un esprit très convivial”...Mais c’est probablement l’appréciation de ce grand professeur de Sciences Po en histoire et droit des États qui anticipe le mieux le potentiel du jeune Macron, un “étudiant exceptionnel à tous égards”. “Beaucoup d’intelligence et d’élégance morale, résume-t-il. Une vraie générosité. Des qualités intellectuelles hors du commun”. Titre de cet enseignement où l’étudiant excelle : “L’État en France et sa réforme”...

¹ L’ambigu Monsieur Macron, Marc Endeweld, Flammarion (2015), page 50.

² Emmanuel Macron, en marche vers l'Élysée, François Prissette, Plon (2016), p.79

³ Macron, l’invité surprise, François-Xavier Bourmaud, l’Archipel (2017), page 53

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