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18.03.2019
Handicap : "En parler sans tabou"
Diplômée 2018 du master en Sécurité internationale de l’École des affaires internationales de Sciences Po (PSIA), Marie-Line a passé le prestigieux concours du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères via une voie spécifique de recrutement dédiée aux personnes en situation de handicap. Dans deux mois, elle prendra son premier emploi en tant que “secrétaire des Affaires étrangères”, un poste de catégorie A. Préparation des concours, futures missions à l’étranger ou encore accompagnement du handicap à Sciences Po, elle nous détaille son parcours.
Vous venez d’obtenir votre diplôme de Sciences Po. Quel est votre parcours ?
Je suis entrée à Sciences Po après le baccalauréat en 2012. En troisième année, je suis partie en échange à l’université de Melbourne en Australie et c’est à ce moment-là que j’ai orienté mes études vers les relations internationales. À mon retour, j’ai intégré le Master in International Security de l’École des affaires internationales de Sciences Po (PSIA). En parallèle de Sciences Po, je me suis également engagée dans des associations humanitaires, de développement et d’éducation. J’ai notamment fait du bénévolat au Cambodge et au Burkina Faso. Après ma première année de master, j’ai pris une année de césure pour travailler pendant un an pour l’association Toutes à l’école qui scolarise des jeunes filles au Cambodge. Au départ, je m'orientais en effet plutôt vers le secteur humanitaire…
Qu’est-ce qui vous a poussée vers les concours du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères ?
Après mon expérience dans l’association Toutes à l’école, j’ai cherché un stage un peu différent. J’avais envie d’une expérience en ambassade, par exemple en Arménie, parce que je suis d’origine arménienne et que cela m’aurait plu d’aller là-bas. Et puis, finalement, j’ai obtenu un stage au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères à Paris, à la direction des Nations unies et des Organisations internationales, on pouvait difficilement rêver mieux ! Cela a été une vraie découverte de la diplomatie française et j’ai réalisé que cela me plaisait beaucoup ! C’est ainsi que je suis revenue à Sciences Po, pour le dernier semestre, avec un autre projet que l’humanitaire. J’ai orienté mon choix de cours sur la diplomatie, les relations internationales, mais aussi sur la sécurité et la défense pour avoir un aperçu complet. Je me suis inscrite à la PrépaConcours de Sciences Po et j’ai commencé à travailler en vue des épreuves du concours pour le ministère.
Comment s’est passée la préparation des concours ? Et quel concours avez-vous passé précisément ?
La préparation aux concours de Sciences Po permet d’avoir à disposition non seulement de la matière et des références, mais aussi une méthodologie et des références conseillées par les professeurs qui permettent de gagner un temps précieux dans la préparation. On a certes un an pour préparer les concours mais, en réalité, la masse de travail est tellement importante que c’est presque court ! Concernant le concours, comme je suis en situation de handicap, j’ai eu accès à une voie de recrutement qui est dédiée aux personnes qui ont une “RQTH”, une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. Cette année, il y avait trois postes de secrétaire des Affaires étrangères concernés. La présélection se fait sur dossier et, ensuite, il y a des épreuves orales, linguistiques, etc.
Vous êtes malvoyante, est-ce que votre handicap a été un frein lors de vos études ? Qu’est-ce que Sciences Po vous a proposé comme dispositif pour vous accompagner ?
Malgré les difficultés, j’ai eu beaucoup de chance parce que l’accompagnement des étudiants en situation de handicap à Sciences Po est exceptionnel. Le pôle handicap s’est tout d’abord chargé de faire savoir aux professeurs que j’étais présente dans leurs cours, ce qui a facilité ma prise de contact avec eux quand je suis allée les voir pour leur expliquer mes besoins. Ceci était d’autant plus utile que j’ai un handicap “invisible”, je suis malvoyante. Dans mon cas, j’avais surtout besoin d'adaptation de documents écrits, parce que les livres de bibliothèque, les formats PDF, ou encore les documents que nous envoient les professeurs me sont le plus souvent inaccessibles. Sciences Po a fait un gros travail de numérisation des ouvrages pour que je puisse y avoir accès. Enfin, pour les examens, j’ai aussi bénéficié de tiers-temps supplémentaire et je pouvais les passer sur ordinateur. Tout cet accompagnement proposé par le pôle handicap et la bibliothèque de Sciences Po m’a vraiment permis de suivre mes études sereinement. C’était très rassurant pour moi : je savais que si je venais avec un besoin, des difficultés, des solutions seraient trouvées.
Le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères vous propose-t-il un accompagnement similaire ?
Oui, il y a un pôle Égalité des chances avec lequel j’ai été en contact dès le passage des concours. Le premier entretien se déroule dans ce service et on aborde directement la question de l’adaptation à mon handicap : les besoins, par exemple en termes de logiciels sur ordinateur, d’accompagnement, de rythme de travail ou encore de possibilité d’affectation à l’étranger… Je crois que c’est important de savoir parler sans tabou de ces sujets.
En savoir plus
- Nous pensons qu’on peut accomplir sereinement ses études à Sciences Po avec un handicap. Nos 300 étudiants en situation de handicap le prouvent tous les jours. Pour cela, nous déployons une politique d’accessibilité adaptée à chaque situation.
- “Il faut oser et ne jamais hésiter”, interview de Mathys Foreau, étudiant en situation de handicap
- “Des robots pour aller en cours” : vidéo sur les robots mis à disposition des personnes en situation de handicap pour assister aux cours.