L’intelligence artificielle à Sciences Po

Le développement accéléré de l’intelligence artificielle (IA), notamment de l’IA générative, et l’importance qu’elle revêt aujourd’hui, tant dans la sphère professionnelle que dans la vie quotidienne, ouvrent un espace de transformation profonde de nos sociétés, de nos métiers et de nos modes de vie.  

Pour Sciences Po, dont la vocation première est de former des étudiants capables de penser le monde contemporain et d’en être des acteurs pertinents, la mission est double : assurer l’appropriation de ces outils par l’ensemble de notre communauté – étudiants, enseignants, chercheurs et salariés – afin d’en exploiter le potentiel et renforcer l’exigence de discernement, de créativité, d'approfondissement, de pensée critique et de compréhension pluridisciplinaire, qui sont des compétences essentielles pour une utilisation raisonnée de ces outils. 

L’enjeu est bien pour nos étudiants d’utiliser l’IA comme un levier permettant de déployer les compétences acquises à Sciences Po, plutôt que comme un substitut à leur capacité de jugement et de création.

Renforcer des compétences et des capacités cognitives

L’IA modifie la grammaire de la connaissance : ce que l’on attendait hier de l’étudiant – capacité d’analyse, maîtrise de la synthèse – se trouve désormais à portée apparente de prompt.

L’utilisation raisonnée de l’IA rend donc d’autant plus fondamentales certaines compétences et capacités cognitives :

• Le discernement, pour mettre à  distance et maîtriser de manière critique  les productions de l’IA, afin non seulement d’éviter les pièges inhérents à l’outil mais de pouvoir utiliser toute l’étendue de ses potentialités
• L’esprit de créativité, pour dépasser la logique combinatoire des modèles
• L’ambition intellectuelle, pour maintenir les capacités de lecture, de rédaction, de concentration, dont la maîtrise est la condition même de la pensée.

Ces compétences constituent le socle de la formation intellectuelle que Sciences Po dispense, valorise et entend renforcer. 

Le choix de la pluridisciplinarité et des humanités

La formation pluridisciplinaire dispensée à Sciences Po permet de croiser les regards, les savoirs et les méthodes. Ce projet pédagogique généraliste de pluralité des disciplines et des points de vue est un atout majeur pour appréhender l’IA. Elle permet de développer les capacités de discernement, d’interprétation, de contextualisation et de distance critique que la prolifération de contenus synthétiques rend essentielles. 

Sciences Po entend en outre renforcer son engagement dans les humanités en approfondissant le rapport à la lecture, à l'écriture, aux pratiques artistiques (en particulier au sein de la Maison des arts et de la création) qui donnent un socle à la réflexion et nourrissent l’imaginaire et la sensibilité, propres à la créativité humaine. 

Accompagner et former à des usages éclairés et responsables de l’IA

Alors que le monde du travail est d’ores et déjà transformé, Sciences Po est s’engager dans l'exploration et l’usage de ces technologies de l’IA au service de sa communauté. 

Notre approche est responsable et ouverte. Sciences Po donne à l’ensemble de sa communauté la possibilité :

• de tester, comparer et confronter différents modèles d’IA génératives, tout en s’assurant de ne pas transmettre des données sensibles ;
• de faire un usage raisonné des modèles d’IA en restant attentifs à leur coût écologique et au cadre éthique, qui implique notamment de citer systématiquement les contenus générés par IA ;
• d’encourager l’utilisation de modèles ouverts et transparents dont on connaît mieux les limites et les biais ;
• de développer une culture technique et critique.

Des modules et dispositifs de formation sont progressivement intégrés dans les programmes (bachelor, master, doctorat) afin de  favoriser des usages pertinents de ces outils, attentifs aux risques éventuels, aux biais et aux possibilités d'hallucinations propres à ces technologies.

Adapter les modalités d'évaluation à l'ère de l’IA

L’usage de l’IA dans les productions académiques des étudiants est répandu sans être systématique. Sciences Po en prend acte et adopte une approche lucide: il ne s’agit ni de l'interdire ni de l’ignorer, mais de l’encadrer tout en formant les étudiants aux impératifs de l'intégrité académique.

Cette réflexion, menée par les équipes pédagogiques, conduit à une évolution progressive et différenciée des modalités d’évaluation  qui s’adaptent à cette réalité et permettent de mesurer et valoriser les compétences acquises. 

Elles sont définies selon le niveau de formation et les objectifs pédagogiques de chaque programme et de chaque enseignement. Elles peuvent inclure des formats classiques (devoirs sur table, oraux, exercices en temps limité) et des formats intégrant explicitement l’usage de l’IA (analyses comparatives, travaux augmentés, réflexions sur les biais). Les étudiants doivent alors documenter  cet usage en détaillant les étapes de leur travail, en indiquant les outils mobilisés et en adoptant une démarche réflexive.

Quel que soit le format retenu, l’évaluation doit permettre de mesurer la capacité de l'étudiant à problématiser, argumenter, contextualiser ; en d’autres mots, à produire une pensée personnelle. 

Sciences Po encourage et accompagne les enseignants à tester de nouveaux formats et à mutualiser leurs pratiques, qui sont nourries de leur propre expérience professionnelle et de leur perception des attentes des employeurs de nos futurs diplômés. Son Institut des compétences et de l’innovation, ainsi que les équipes des écoles, accompagnent les enseignants dans l'adaptation de ces modalités d'évaluation (formations, guides et fiches pratiques, communautés de pratique). 

Ce que l’IA fait au monde : des objets de recherche à Sciences Po

Forte de la pluralité de ses expertises et de son ambition en matière de recherche, Sciences Po s’affirme comme un espace privilégié pour interroger l’essor de l’IA sous toutes ses facettes et ses effets sur nos sociétés : enjeux géopolitiques, économiques, sociétaux, juridiques et éthiques, mais aussi implications pour la gouvernance, la régulation et les processus démocratiques. Cette démarche est indissociable de la contribution de ses chercheurs au développement d’applications de l’IA nourries des savoirs spécifiques aux sciences humaines et sociales.