La Pologne, une ambition européenne

14/08/2012

  Article publié le 14 août 2012, en partenariat avec Ouest France

Avec cette lancinante crise européenne, le risque de généralisation est grand, au point d'oublier que certains pays d'Europe centrale et orientale se portent bien. La Pologne figure au premier rang de ces success stories.

Vingt-trois ans après avoir fait céder le communisme, cette démocratie vivante de 38 millions d'habitants est très intégrée à l'Union européenne et se développe rapidement. Si 17 % des Polonais sont encore occupés à l'agriculture, 62 % vivent dans des villes, parfois de grande taille. En plus de Varsovie (1,6 million d'habitants), huit villes possèdent plus de 300 000 habitants. Le taux de chômage reste certes assez élevé (12 %), mais il a connu une baisse de 9 % par rapport à 2004, grâce notamment au dynamisme des petites et moyennes entreprises et à un marché intérieur porteur.

À l'étranger, la Pologne reste trop souvent marquée par l'image de la ruralité et du catholicisme traditionnel, pour ne pas dire intégriste. En fait, depuis vingt ans, la société polonaise s'est largement sécularisée et partage les mêmes clivages que le reste de l'Europe. Recueillant 10 % des voix aux dernières élections législatives, le parti de l'homme d'affaires Janusz Palikot a fait ainsi ouvertement campagne contre les pouvoirs de l'Église, pour la libéralisation du cannabis et pour la légalisation du mariage homosexuel.

La France et l'Allemagne doivent regarder de près la Pologne, car elle affiche une vraie ambition européenne. Depuis que Barack Obama a déclaré que l'Europe n'était plus une priorité de sécurité pour les États-Unis, le gouvernement du Premier ministre de centre droit, Donald Tusk, a décidé de jouer plus encore la carte européenne. La présidence polonaise de l'Union européenne, en 2011, affichait de grandes priorités, notamment le développement de la politique de défense. En novembre 2011, le ministre des Affaires étrangères, Radek Sikorski, a prononcé à Berlin un discours dans lequel il réclamait plus de pouvoirs pour les institutions européennes, ce qu'aucun homologue français n'a fait depuis des années.

L'Allemagne soigne sa relation bilatérale avec la Pologne parce qu'elle veut surmonter un passé douloureux et sécuriser son voisinage. La relation de la France avec Varsovie devrait être bien meilleure. Elle s'est mal engagée sous Nicolas Sarkozy, les Polonais reprochant à l'ancien président français de ne pas les placer suffisamment au coeur de l'Europe en leur faisant remarquer leur absence de l'euro. L'élection de François Hollande est donc une chance pour la relationfranco-polonaise. Pour que la France retrouve de la crédibilité aux yeux de la Pologne, elle doit réussir ses réformes structurelles ¯ notamment la réduction de son déficit public ¯, cessé d'affirmer que l'on ne compte pas en Europe sans l'euro, et enfin déclarer davantage sa confiance dans les institutions européennes.

Alors que la crise économique pose plus que jamais la question du leadership de l'Europe, le Triangle de Weimar ¯ entre la France, l'Allemagne et la Pologne ¯ offre des perspectives. La Pologne est plus importante pour l'avenir de la construction européenne que la Grande-Bretagne qui se marginalise de plus en plus. Il faut donc que les Français s'intéressent davantage à la Pologne, qu'ils la visitent pour se rendre compte de ce qu'elle est vraiment, et que la diplomatie française la prenne davantage en compte dans ses calculs.

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