Débats sur les appels publics à la prière en Israël

Auteur(s): 

Eran Tzidkiyahu*, Doctorant au CERI

Date de publication: 
Décembre 2016
Illustration

En Israël, la dernière version du projet de loi qui vise à contrôler l'utilisation de puissants haut-parleurs extérieurs par les mosquées (connue en Israël comme "la loi muezzin") sera discutée au Comité Ministériel Législatif. Ce projet a été proposé par le député à la Knesset Moti Yogev du parti de droite national-religieux HaBayiot HaYehud (Foyer juif) et le député David Bitan du parti du Likoud, qui est le parti au pouvoir (Bitan est également président de la coalition et du groupe parlementaire du Likoud). Il vise à interdire ou à réduire le volume de l'appel aux Musulmans à la prière, dans les mosquées d'Israël. Comme on pouvait s’y attendre, ce projet de loi a suscité un débat public orageux. Ceux qui s'y opposent l’ont qualifié de discriminatoire, producteur de haine et constituant, pour les musulmans, une atteinte grave à leur liberté de culte. Le chef de la Liste arabe unifiée, le député Ayman Odeh, a jugé le texte comme « un projet de loi de plus, dans une série de projets populistes, dont l'objectif est de créer une atmosphère de haine et d’agressivité contre la population arabe ». Il a ajouté : « il existe une législation sur les tapages et troubles de voisinage et des réglementations qui s'appliquent également aux mosquées, il est donc clair que le seul but du projet de loi est de stigmatiser les mosquées comme source de problème. C'est une attaque flagrante à la liberté religieuse des musulmans, au sein d'une vague de persécution menée par le Premier ministre. » (The Times of Israël, 13/11/2016).

Les partisans du projet de loi affirment que la liberté de religion ne devrait pas prendre le pas sur  la qualité de vie. Le député Moti Yogev, initiateur du projet de loi actuel, explique que « nous n'avons pas l'intention de porter atteinte à la liberté de religion, mais plutôt d’empêcher qu’il ne soit porté atteinte au sommeil des citoyens". Le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient aussi le projet de loi : il note des restrictions similaires dans les pays européens et même dans certains pays musulmans. Il a également qualifié les bruyants appels à la prière de  «nuisance publique qui touche toutes les confessions religieuses [...] les musulmans, les juifs et les chrétiens en souffrent tous». Le Premier ministre Netanyahou a ajouté qu’Israël “est un pays qui respecte la liberté de religion pour tous [...] Israël s'est engagé à protéger quiconque souffre d’appels à la prière excessivement bruyants. C'est la coutume dans de nombreuses villes européennes. C'est aussi la coutume dans diverses sociétés du monde musulman, qui ont limité le volume sonore des appels à la prière, en signe de considération pour l’ensemble des habitants”. (The Times of Israël, 13/11/2016).

Ce n'est pas la première fois qu'un tel projet de loi a été proposé en Israël. En 2011, Anastassia Michaeli (députée à la Knesset entre 2009 et 2013, du parti de droite “russe” Yisrael Beytenu fondé par Liberman) avait proposé un projet de loi similaire, à la suite d'une campagne agressive ciblant la minorité arabe en Israël et remettant en cause sa loyauté envers l'Etat. A l’époque, le projet de loi avait été largement critiqué et après débats au Comité Ministériel Législatif, il avait été retiré de l'ordre du jour. Cette fois, la situation est bien différente puisque le projet de loi a reçu l'appui du premier ministre1.

Lors des élections municipales de 2013 à Jérusalem, une liste de droite radicale d’ultra-nationalistes et suprématistes juifs («Jérusalem-Unis» d'Aryeh King et Shmuel Shkedi) ont remporté deux sièges au conseil municipal. Dans leur campagne, les membres de cette liste se sont concentrés sur les quartiers juifs situés en bordure des territoires et sur l'éradication de tout appel des Musulmans à la prière dans la ville. Ils utilisèrent également des slogans dérogatoires contre les Muezzins. Le maire de Jérusalem, Nir Barkat, affilié à l'aile droite, appuie aujourd'hui leur demande. Des manifestants de ces quartiers juifs frontaliers, soutenus par certains activistes radicaux de droite, se sont présentés tout récemment sous les fenêtres de la maison du maire, à Jérusalem-Ouest, à 4 heures du matin, avec un haut-parleur en marche, diffusant bruyamment un l'appel à la prière et exigeant de l’élu un traitement radical de la question (l’auteur des présentes lignes,qui réside dans le quartier en question, peut en témoigner).

Rappel des piliers de l’Islam

Les cinq prières quotidiennes constituent l'un des cinq piliers de l'islam (arkān al-Islām) et sont considérées comme un acte essentiel de la religion islamique. Chaque musulman pratiquant doit prier à l'aube, à midi, l’après-midi, le soir et la nuit. Le rôle du Muezzin est d’appeler les fidèles à la prière et de les encourager à venir à la mosquée. Un religieux doté d’une voix agréable a pour tâche de réciter l'Adhan (azan), l'appel à la prière. L'appel est diffusé dans une version unifiée, commençant chaque fois avec le Takbir - Allāhu akbar - signifiant « Dieu est le plus grand ». Selon la tradition islamique, le premier Muezzin fut Bilal Ibin Rabah, qui suivit l’ordre du prophète Mahomet d’aller sur une hauteur et d'en appeler les musulmans à la prière. Par la suite, des tours furent érigées à l'usage du Muezzin : ce sont les minarets des mosquées. Ainsi, dans tout le monde islamique, le texte de cet appel à la prière est identique et il est fait par une voix humaine authentique. Les érudits musulmans diffèrent sur l'importance de l'appel à la prière dans la loi islamique. Ils se demandent si l’appel est une simple déclaration faite aux fidèles musulmans ou bien s’il est partie intégrante de la prière elle-même. En ce cas, l’appel correspond alors à un décret religieux qui doit être conservé.

Les horaires de l'appel à la prière changent selon le calendrier du soleil, et diffèrent d’une mosquée à l’autre. Chaque appel dure deux ou trois minutes, selon le Dr Ziad Abu Moch, directeur du département islamique au Ministère israélien de l'Intérieur. Selon le Dr Stilian Gelberg, responsable du secteur “Prévention des risques de bruit et de rayonnement” au Ministère israélien de la Protection de l'environnement, le temps moyen d’un appel à la prière est de huit minutes. Par contre, des mesures prises par le Centre de recherche et d'information de la Knesset indiquent une moyenne de quatre minutes pour les appels.

Avec le développement technologique, l'usage de haut-parleurs s’est répandu, ayant pour effet d’amplifier la portée de l'appel à la prière, ce qui permet d'atteindre plus de gens et de surmonter les obstacles inhérents aux villes modernes. Mais la multiplicité des mosquées en milieu urbain peut créer une interférence des différents appels, perturbant leur effet : une mauvaise synchronisation des horaires non seulement prolonge le temps global de l'appel mais peut aussi créer la confusion chez les fidèles : en période de Ramadan, l’appel indique la rupture du jeûne et le moindre décalage horaire a des effets négatifs.

Israël

Les musulmans en Israël représentent environ 18% de la population du pays (environ 1 300 000 sans les Territoires palestiniens). Il y a environ 400 mosquées en Israël, dont la moitié contrôlée par le gouvernement. La législation actuelle israélienne sur le bruit ne vise pas spécifiquement les mosquées, mais au début des années 1990, un tribunal israélien a condamné une mosquée de Jérusalem-Est, adjacente à un quartier juif, pour avoir émis un bruit excessif à 5 heures du matin : il fut prouvé qu'elle avait dépassé les niveaux sonores autorisés d’au moins dix décibels.

En 2002, le Centre de recherche et d'information de la Knesset a signalé de multiples plaintes de citoyens israéliens contre l'appel à la prière, en particulier dans les villes mixtes telles que Jérusalem, Lod, Ramla et Jaffa. L'usage, à l'époque, était de s’adresser directement à chaque muezzin et de lui demander de baisser le volume de son haut-parleur. Habituellement ils obtempéraient, mais, au fil du temps, il fut de plus en plus difficile d’obtenir ce résultat positif. Pourtant, la question demeurant tout particulièrement sensible, les autorités ont toujours donné priorité au dialogue et à la compréhension, traitant au cas par cas au niveau local. À Jaffa, ce dialogue a même amené à un accord : toutes les mosquées de la ville furent reliées à un système unique d’annonces, émises en même temps et dont le volume sonore est régulé.

Selon Abu Moch, il y a eu récemment une augmentation des plaintes, dont la plupart étaient des juifs résidant près des communautés arabo-musulmanes, principalement dans des villes mixtes comme Jérusalem, Lod, Ramla, Jaffa, Haïfa et Acre. Les autorités tentent de traiter la question en unifiant les appels multiples et en régulant leur volume comme cela se fait dans certains pays musulmans, en se fondant sur les fatwas existantes (avis juridique islamique). Ce processus a déjà été mis en place dans quelques communautés musulmanes d’Israël dès 2009-2010 par les soins du Ministère de l'Intérieur, qui a mandaté une société privée pour l’appliquer. La plupart des mosquées acceptent le processus mais une certaine opposition existe, en raison des interdictions religieuses et des craintes d'endommager les salaires des imams et des muezzins.

Dans un article publié en octobre 2009 sur le site du ministère de la Protection de l'Environnement, Stilian Gelberg n'avait pas demandé d'interdire l'appel à la prière mais plutôt recommandé certaines mesures pour réduire le risque sonore.

Débats en pays islamiques

Dans certains pays islamiques tels que l'Égypte et l'Arabie saoudite, des discussions comparables ont eu lieu afin d'établir un équilibre entre la nécessité d'appeler à la prière et celle de protéger l’environnement. Ces dernières années,les plus hautes autorités religieuses de ces deux pays ont décidé de prendre des mesures pour réduire les risques de bruit causés par l'appel à la prière. Diverses méthodes de régulation ont été lancées non seulement au Caire avec ses 4000 mosquées2, mais aussi à La Mecque, la ville la plus sainte de l'Islam. D'autres pays islamiques ont décidé, à des degrés divers, d'unir l'appel à la prière dans les mosquées (décision qui a parfois rencontré une opposition des clercs et imams). Il s’agit du Bahreïn, des Emirats Arabes Unis, de la Jordanie, de la Turquie, de la Syrie et aussi, dans une certaine mesure, au sein même de l’Autorité palestinienne (principalement à Ramallah et Naplouse). 

Qu’en est-il en Europe et aux Etats-Unis ?

Les communautés islamiques se sont développées ces dernières années en Europe. Elles ont aussi attiré davantage l'attention du public. Depuis les années 1970, les musulmans d’Europe ont commencé à construire des mosquées bien identifiées, revendiquant ainsi une place pour l'islam dans la sphère publique européenne. En 2009, pour la première fois, une association religieuse a lancé l'appel à la prière à Stockholm, en Suède. Depuis, nous assistons à une opposition croissante aux appels islamiques à la prière dans la sphère publique européenne. Ce n’est pas nécessairement à cause du bruit en soi (puisque le bruit émis par le milieu urbain et industrialisé n’y suscite pas d'opposition similaire), mais plutôt à cause des significations culturelles que ces bruits véhiculent dans la sphère publique. Todd Green soutient qu’entendre l'appel pour la prière en langue arabe ravive, en Europe,la peur latente d'une «prise de pouvoir par les musulmans » qui est également présente dans les refus émis à la construction de minarets pour les mosquées européennes. L'appel à la prière est interdit dans de nombreuses contrées européennes, sans qu’il en soit fourni une explication claire. Dans les pays européens qui ont une population musulmane importante et autochtone, comme en Bosnie-Herzégovine, avec sa population musulmane de 40%, l'appel à la prière peut être entendu régulièrement. En Hollande, l'appel à la prière a un statut légal semblable à celui des cloches d’église et il est réglementé (à Amsterdam, par exemple, on ne peut l'entendre que le vendredi midi). En Allemagne, plusieurs communautés se sont opposées en 2010 à la construction de minarets sur les mosquées en raison de la peur de l'appel à la prière (Völklingen, Rendsburg). En France, sur plus de 1600 mosquées, seules 10 d'entre elles ont des minarets. Le plus souvent, l'appel à la prière n'est pas entendu dans la sphère publique française. A Marseille, par exemple, il a été suggéré qu’une lumière violette, allumée sur le minaret, remplace l'appel traditionnel à la prière. En Angleterre, les oppositions exprimées n’étaient pas en liées aux nuisances sonores, mais plutôt au refus des modèles culturels correspondants. Aux États-Unis, il existe également des exemples de restrictions à l'appel à la prière. En 2004, au Michigan, les musulmans de la petite ville de Hamtramck ont apporté un bon exemple de la façon dont la politique locale peut résoudre les problèmes sur place, permettant aux musulmans de trouver des solutions négociées au sein de leur communauté sans prendre de mesures légales.

Retour à Israël

La minorité musulmane en Israël diffère des minorités musulmanes vivant en Occident. Non seulement elle est significativement plus importante en nombre lorsqu’on la compare aux pays d'Europe et aux Etats-Unis, mais les musulmans d’Israël sont des résidents indigènes, natifs du pays, qui est leur patrie. De plus, Israël (et les territoires palestiniens) sont considérés dans le Coran comme une terre bénie dont la sainteté est concentrée à la mosquée d'Al-Aqsa de Jérusalem, au cœur du pays (Coran 17: 1), en la chargeant de sens religieux. Selon les traditions islamiques, prier à la mosquée al-Aqsa, et tout autour, procure un mérite tout spécial. En raison du statut du pays et de son histoire dans l'islam, et en raison aussi du caractère indigène de la population musulmane qui y vit, les musulmans israéliens n’obéissent pas à la jurisprudence des minorités (fiqh al-aqalliyyat) qui est adoptée par le courant principal des communautés islamiques d’Occident. Elle leur fournit l'outil religieux qui leur permet, ailleurs, de rester en accord avec les fondamentaux de leur foi. En Israël par contre, au cœur du Moyen-Orient arabo-musulman, l'appel islamique à la prière fait partie intégrante de la situation identitaire. Il est entendu depuis des siècles dans les mosquées de Jérusalem, Acre, Jaffa et Ramle et dans les nombreux villages et villes arabo-palestiniens de confession musulmane. C'est pourquoi le débat sur l'appel à la prière - comme mentionné plus haut - fait partie du débat sur les relations entre l'État juif et sa minorité «arabe, majoritairement musulmane», discussion elle-même issue de la grande question des relations entre Israélo-palestiniens et Israélo-arabes.

Au cours de la dernière vague d’incendies qui ont sévi en Israël le mois dernier, les réseaux sociaux, dans le monde arabe comme dans les territoires palestiniens, ont exprimé le sentiment que ces feux étaient une punition d'Allah face à la tentative de supprimer l'appel à la prière et de porter atteinte à la prière musulmane en terre bénie. Certaines personnalités islamiques en Israël et en Palestine ont appelé à résister à cette loi et il ressort de discussions avec des musulmans Palestiniens à Jérusalem que ce projet de législation est perçue comme une attaque israélienne massive contre l'islam.

Rappelons que le projet de loi en question est promu par un homme politique de tendance nationale-religieuse. Au départ, les Juifs ultra-orthodoxes en critiquaient l’initiative, dans un mouvement qui relevait apparemment d’une réaction de solidarité interreligieuse. Mais, une fois que les ultra-orthodoxes furent certains que le projet de loi ne nuirait pas aux sirènes du sabbat (l’alarme sonore déclarant le début du jour saint de repos), Yaakov Litzman, ministre de la santé (tendance Agoudat Israel du parti Judaïsme unifié), déclara qu’il apportait son soutien au projet de loi. Les politiciens arabes d’Israël ont exprimé alors leur déception, car ils pensaient vraiment qu’il existait, entre les juifs ultra-orthodoxes et les musulmans, un intérêt commun. Il semble que les Juifs Haredim (ultra-orthodoxes) ne voyaient finalement pas les choses d’un même œil.

Mobiliser la religion au service de la politique ou l'inverse?

Dire que cette loi est un exemple de mobilisation des sentiments religieux à des fins politiques serait une évidence. On trouve de nombreux exemples de ce comportement en Israël, dans l'ensemble de la région. Pourtant, un virage intéressant a eu lieu lorsque l'un des adversaires les plus farouches de la « loi muezzin » s'est avéré être Yehuda Glick, le plus célèbre des «militants du Temple». Glick est un religieux nationaliste, qui vit dans une colonie et milite pour la construction d’un troisième temple sur le mont du Temple (l’Esplanade des Mosquées) dans la vieille ville de Jérusalem - site connu des musulmans comme al-Masjid al-Aqsa. Il est un activiste de droite bien connu et est récemment entré à la Knesset en tant que député, au nom du parti au pouvoir - le Likoud, dans le cadre d'un groupe de militants nationalistes religieux de ce parti. Glick a de justesse survécu à une tentative d'assassinat au cours de l'été 2014, après avoir été touché à plusieurs reprises, à distance, par un tireur palestinien qui l'a qualifié "d'ennemi d'Al-Aqsa". La stratégie de Glick a modifié la nature de l’engagement de son mouvement (Temple Mount Faithful). Au départ marginal et considéré comme groupe de fondamentalistes messianiques, il est devenu un courant dominant du discours politique en Israël, se détournant du discours rédemptoriste axé sur la construction d'un Temple, pour adopter un discours libéral de défense des «droits», exigeant libre accès et droit de culte sur le site en cause. Ce nouveau discours embarrassa ses adversaires puisqu'ils venaient eux-mêmes d’un mouvement libéral. Pourtant, à mon avis, il ne s'agit là que d'une manipulation, d’une stratégie utilitaire qui ne reflète pas une position profonde et essentielle reposant sur des valeurs libérales universelles. Il s'agit plutôt d'exploiter le discours libéral pour promouvoir des fins particularistes : changer le statu quo sur le Mont du Temple sans faire référence à la question, plus vaste, du contrôle israélien sur des millions de Palestiniens dans les territoires.

Depuis son entrée au Parlement comme député, Yehuda Glick, issu d'une famille libérale-religieuse, a beaucoup travaillé pour se qualifier de défenseur de la tolérance, prônant un discours interconfessionnel et le dialogue. Lorsque le débat autour de la « loi muezzin » battait son plein, Glick apparut comme l'un des adversaires les plus actifs contre ce projet, au nom même de la liberté religieuse. Il fit équipe avec le député arabe Zuhair Bahlul de l'opposition (parti de centre-gauche du « Camp Sioniste ») pour s'opposer à la loi et il fut accusé d’avoir rompu la discipline de la coalition.

Étant membres de cette coalition, certains cheikhs musulmans voient dans Yehuda Glick quelqu'un qui peut les aider à faire annuler le projet de loi. D'autres pensent que Glick ouvre la voie à un changement significatif du statu quo sur la Sainte Esplanade, en soutenant les libertés religieuses et en changeant son image parmi les musulmans.

Conclusion

S'il existe une véritable volonté de s'attaquer à la question légitime de l'appel à la prière et à ses dangers concomitants en Israël, la législation nationale n'est pas l'outil approprié, étant donné qu’il s’agit d’une question tout particulièrement sensible. La meilleure chose à faire serait d'adopter une approche nuancée, au cas par cas, et de travailler au niveau local en réunissant les maires, les leaders des communautés et les religieux, pour mener un dialogue direct et apaisé et ainsi trouver des solutions, techniques par exemple (ondes radio etc.), baisse du volume sonore, orientation des haut-parleurs, contrôle des décibels. Il s'agit là de mesures bien connues du Ministère israélien de la Protection de l'environnement et elles sont effectivement déjà mises en œuvre avec succès dans certains endroits depuis 2010. La législation actuelle au niveau national et le débat politique et public en la matière appartiennent, à mon avis, à une autre sphère, celle des relations entre minorité-majorité, des peurs et les animosités nationales, religieuses et ethniques, qui mobilisent les discours religieux et les sentiments à des fins politiques.

*Traduit par Antoinette Chamoux-Fauve, EHESS & University of the Western Cape 

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Pour aller plus loin :

Jocelyne Cesari, "Mosque Conflicts in European Cities: Introduction", Journal of Ethnic and Migration Studies, Vol. 31, n°6, November 2005, pp. 1015-1024

Todd H. Green, "The Resistance to Minarets in Europe", Journal of Church and State, vol. 52, n°4, Autumn 2010, pp. 619-643.

Stefano Allievi, Conflicts over Mosques in Europe: Policy Issues and Trends – NEF Initiative on Religion and Democracy in Europe, London: Allianca Publishing Trust, 2009.

  • 1. Le mois dernier, l’information fut diffusée que les ministres les plus anciens du gouvernement avaient rapporté que c'était Yair, le fils de Netanyahu, qui poussait son père à soutenir ce projet de loi. Il fut également rapporté que Netanyahu lui-même avait déclaré, dans quelques réunions du gouvernement, que dans sa maison à Césarée, il souffrait des bruyants appels à la prière, en provenance de mosquées proches. Il fut dit aussi que ces appels avaient dérangé Netanyahou lors d'une réunion à Césarée avec un leader européen et que cette personnalité avait reproché à Netanyahu de les tolérer (Channel 10- Israël, 16/11/2016).
  • 2. Cheikh Ali Gomaa, le Grand Mufti d'Egypte a déclaré que l'appel à la prière ne faisait pas partie de la prière et qu'il n'avait pas à être récité séparément par chaque imam, dans chaque mosquée. Un autre mufti, cheikh Nasr Farid Wasl a élargi la question en déclarant que le désordre créé par les appels multiples étaient réellement nuisibles au sentiment religieux. L'ancien ministre égyptien des Affaires religieuses, le cheikh Mahmud Hamdi Zakzuk a également déclaré que l'unification de l'appel à la prière ne va pas à l’encontre de la loi islamique. Néanmoins, certains imams du Caire ont jugé que le projet d'unifier l'appel à la prière faisait ombrage à leur dignité professionnelle et menaçait leur existence.
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