Barack Obama en visite de courtoisie

Charles Tenenbaum

04/03/2013

En partenariat avec Alternatives Internationales

C’est une première, le président des États-Unis va se rendre au Proche-Orient. Au menu : l’Iran, la Syrie, la montée de l’islamisme. En sourdine : le processus de paix entre Palestiniens et Israéliens.

Barack Obama, accompagné du nouveau secrétaire d’État, John Kerry, se rendra au Proche-Orient aux alentours du 20 mars. Sa dernière visite remontait à 2008, en tant que candidat à la Maison Blanche. Le voyage sera court, tout au plus deux jours à Jérusalem et dans la Cisjordanie de l’Autorité palestinienne, suivis d’un passage en Jordanie. L’apparente disparition du conflit entre Israéliens et Palestiniens de l’agenda américain ces dernières années a pu laisser penser que les États-Unis avaient, de guerre lasse, abandonné leur traditionnel rôle de médiateur. Ce serait omettre que l’absence remarquée, et inédite pour un président des États-Unis, de toute visite durant le premier mandat de Barack Obama n’a nullement signifié la fin de l’engagement américain. En 2009, c’est en grande pompe que le président américain avait investi l’ancien sénateur George J. Mitchell, envoyé spécial pour la région. C’est encore Barack Obama qui avait confié la tâche de relancer les négociations à une équipe de vétérans du processus de paix. Si donc, les Américains ne se sont jamais véritablement extraits de la problématique régionale, rien ne permet d’imaginer, à l’inverse, qu’une visite présidentielle sorte de l’enlisement un « processus de paix » au point mort.

Du côté américain, on prend d’ailleurs bien soin de préciser, en amont, que le voyage du président ne se focalisera pas sur une hypothétique relance des négociations. Sur place, Barack Obama se trouvera face à deux interlocuteurs en situation politique délicate sur le plan interne et avec lesquels il entretient, par ailleurs, des relations tendues. Le soutien apporté par Benyamin Netanyahou durant la campagne présidentielle au candidat républicain Mitt Romney aura encore dégradé la mésentente notoire entre les deux hommes. Quant à Mahmoud Abbas, il n’a pas réussi à obtenir l’appui de la Maison Blanche pour la reconnaissance de la Palestine à l’ONU. Ajoutées au déficit de légitimité populaire et à la persistance de la division entre le Hamas et le Fatah, les difficultés financières de l’Autorité palestinienne fragilisent les positions d’un président relativement isolé au sein du monde arabe. Enfin, quatre mois après l’opération israélienne « pilier de défense » contre Gaza, nul n’évoque la perspective de négociations avec le Hamas. Côté israélien, si les élections du mois de janvier ont permis à Netanyahou de rester à la tête du gouvernement, il est sorti affaibli d’un scrutin signalant un rééquilibrage vers le centre-droit et la relative perte de vitesse du parti ultra-orthodoxe Shass. Le Premier ministre peine à constituer un gouvernement issu d’une coalition disparate qui sera juste en place lors de la visite de Barack Obama.

De quoi sera-t-il donc question lors de cette visite éclair du président et de son secrétaire d’État ? Les Israéliens chercheront à rappeler aux Américains les engagements pris sur la question du nucléaire iranien et à réaffirmer l’expression d’un soutien international indispensable face aux menaces de sanctions exprimées par certains pays européens en cas de frappes sur les installations de Téhéran. Au coeur des débats également, la lente implosion du voisin syrien et les inquiétudes suscitées par la dérive des « printemps arabes ». Les Palestiniens comptent sur la visite américaine pour obtenir au minimum un gel partiel des implantations en échange de la promesse de mettre en parenthèse la demande d’une reconnaissance de la Palestine comme État membre à part entière des Nations unies. Si d’aventure, la question de la paix entre Israéliens et Palestiniens redevenait d’actualité, on conseillerait cependant aux négociateurs de suivre les conseils de leurs prédécesseurs : préférer des engagements qui modifient la réalité sur le terrain à la focalisation excessive sur un « processus » détaché des populations civiles de part et d’autre. Une occasion pour Obama de véritablement mériter son prix Nobel ?

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