HANDICAP ET TRAVAIL

L’invisibilité du «travail en plus» de salariés sourds

Le « travail en plus » engagé par les travailleurs.ses handicapé.e.s sourd.e.s locuteurs de langue des signes française dans les relations avec les non-sourd·e·s.

Handicap au travail

L’invisibilité du «travail en plus» de salariés sourds

,
Terrains & travaux
  • Date :
  • Langue : fr
  • Discipline : Sociologie
  • Méthode : Qualitative
  • Thématique secondaire : Handicap au travail
  • Type de handicap : Auditif
  • Zone d’étude : France
.ris

Sujet précis

Le « travail en plus » engagé par les travailleurs.ses handicapé.e.s sourd.e.s locuteurs de langue des signes française dans les relations avec les non-sourd·e·s.

Méthodologie

Réalisation d’une « centaine d’entretiens avec des salariés [totalement] sourds, leurs collègues, des responsables de sites, des responsables des Ressources Humaines (RH), des médecins du travail, des chargés de Mission Insertion Handicap (MIH), des syndicats, ou encore des managers. ».

Deux groupes de travail (Paris et Toulouse) animés selon les principes de l’intervention sociologique (Touraine, 1978), rassemblant une douzaine de salarié·e·s sourd·e·s, des interlocuteurs invités (ressources humaines, AGEFI personnes handicapées (Association Nationale de Gestion du Fonds pour l’Insertion Professionnelle des personnes handicapées ), avocat, etc.), et les chercheurs. S’inspirant des résultats des entretiens et de précédentes recherches, lors de ces séances les chercheurs engagent une « analyse collective sur le quotidien de travail de ces professionnels, sur les facteurs bloquants ou porteurs, et sur les stratégies individuelles et collectives, expérimentées ou envisagées. »

Principales conclusions

Les salarié·e·s sourd·e·s doivent compenser une situation d’exclusion des communications et un manque d’informations. Les auteurs reprennent les concepts de « travail en plus » et de « travail invisible », qui désignent des activités perçues comme « éloignées du travail » (Star et al., 1999, p. 12). Le temps et l’énergie dévolus à ce travail autour du langage concurrence les autres taches. Les auteurs montrent que pour les salarié·e·s sourd·e·s, rendre visible ce travail à effectuer est un enjeu, car cela permet de le partager avec le reste de l’équipe. Concrètement, il s’agit de pointer les bénéfices partagés de ce travail (la coordination entre tou·te·s) et d’indiquer aux non-sourd·e·s des manières de dire, de faire et de se comporter, lors de sensibilisations ou de formations LSF.

En déclinant le triptyque d’A. O. Hirschman (1970) « exit/voice/loyalty », les auteurs distinguent 5 stratégies des salarié·e·s sourd·e·s pour gérer ce travail en plus :

  • une forme de loyalty franche : se résigner à un environnement qui ne change pas
  • deux formes de loyalty mêlées d’exit : sortir du marché du travail ou se réorienter après des années de loyauté ; ou cumuler des activités professionnelles
  • deux formes de voice : impliquer les équipes dans « une gestion collective de la diversité » (par exemple en négociant les modalités de recours à des interprètes LSF) ; ou plus radicalement, prendre le risque de revendiquer des transformations de l’organisation de travail auprès de la hiérarchie