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10.05.2021

"Si on est assez curieux, absolument tout est possible après cette École"

Constance Allain
Constance Allain

Pouvez-vous nous décrire votre parcours académique et professionnel ?

Je suis rentrée à Sciences Po en 2013 directement après un bac littéraire en intégrant le programme Europe Afrique dont le campus était encore à Paris à l’époque (je suis si vieille !). En troisième année j’ai fait le choix de partir en stage, d’abord à Londres en Ambassade puis à Montréal dans une association qui faisait de l’inclusion sociale auprès de personnes en situation d’itinérance. J’ai intégré le master Droit économique de l’École de droit à mon retour à Paris dont la scolarité a été ponctuée d’une année de césure des plus formatrice. Je suis passée par trois structures de cabinets très différentes : Darrois Villey, Navacelle et Freshfields. J’y ai découvert la pratique du pénal des affaires, du pénal général et de la fusion acquisition. Ne m’étant retrouvée dans aucune des trois mais ayant adoré l’expérience de la pratique du métier d’avocat, c’est là que j’ai commencé à ne plus savoir où donner de la tête ! Après moult hésitations, j’ai fini par intégrer en M2 la spécialité Entreprises, Marchés et Régulations (EMR). Ce n’était pas un choix du cœur mais cela avait le mérite de me fermer le moins de portes possibles et surtout de me permettre de travailler à mi-temps pendant l’année dans une petite société de production ciné. A la fin de l’année scolaire j’ai rejoint en stage la Quinzaine des Réalisateurs pendant le Festival de Cannes et ai passé mon barreau dans la foulée à ma sortie de Sciences Po en 2019.

J’ai décalé mon entrée à l’EFB d’un an et ai effectué une année au sein du Master Spécialisé Médias de l’ESCP où j’ai fait une pause avec le droit certes mais étudié un milieu qui me passionne depuis toujours, celui du cinéma. J’ai continué mon engagement pour les festivals en rejoignant de nouveau la Quinzaine (finalement annulée en raison d’une certaine pandémie) puis le Cinemed, le Festival de Cinéma Méditerranéen de Montpellier. Dans le cadre de mon PPI j’ai ensuite intégré le Master 2 Droit Economie et Gestion de l’audiovisuel, le D2A, de La Sorbonne. Actuellement je suis en stage à la direction juridique du Groupe M6 et y fais enfin le lien entre avocat et cinéma ! Je garde toujours un lien très fort avec la Quinzaine et réintègre l’équipe cette année 2021 le temps du festival à Cannes en juillet.

Quelles sont les principales caractéristiques de votre poste aujourd’hui ?

Je dirais que LA principale caractéristique de mon poste actuel est qu’il me permet de mettre à profit chacune de mes formations. Le droit de l’audiovisuel a cela de passionnant qu’il est à la croisée des chemins, un peu comme Sciences Po : il y a du contentieux mais aussi (surtout !) beaucoup de conseil, ce qui répond parfaitement à mon M2 EMR effectué à Sciences Po. Il y a l’identité même du groupe M6 et l’univers du PAF (i.e paysage audiovisuel français) que mon MS Médias à l’ESCP m’a permis d’appréhender et d’analyser en profondeur. Enfin, il y a la pratique du droit qui me passionne : le droit public de la communication audiovisuelle enseigné par Christine Nguyen, professeure extraordinaire, la propriété intellectuelle appliquée à l’audiovisuelle (par le tout aussi extraordinaire Professeur Edouard Treppoz), les droits voisins (par le très impressionnant Tristan Azzi) et bien sûr le droit des obligations, mon cours coup de cœur en M1 à Sciences Po, enseigné par Julia Heinich, l’une des meilleures professeurs que j’ai pu avoir, toute scolarité confondue !

Quels sont vos projets pour la suite ?

Je commence en septembre mes cours à l’École de Formation du Barreau avant d’intégrer en janvier 2022 pour mon stage final le cabinet Taylor Wessing en droit de l’audiovisuel et du cinéma. A ce jour je souhaite prêter serment dès ma sortie de l’EFB et embrasser ma spécialisation à bras le corps au sein d’un cabinet parisien. Mon cœur balance toujours entre avocat et cinéma. J’ai des étoiles dans les yeux à l’idée d’intégrer une équipe de festival, mais j’ai des papillons dans le ventre quand je rends un contrat bien saucissonné clause par clause. La faute à Sciences Po qui nous ouvre trop grand les yeux sur le monde je crois… Je voudrais pouvoir tout faire ! Je considère que la vie est trop longue (ou trop courte ?) pour ne faire qu’un seul métier. Les États-Unis aussi, découvrir une autre pratique de l’univers audiovisuel me plairait beaucoup !

Quelle image attachez-vous à votre passage à l’École de droit ?

Je garde un merveilleux souvenir de mon Master 1, j’avais rarement été aussi stimulée académiquement ! Un bonheur aussi d’ENFIN toucher du doigt ce que je voulais faire depuis toujours : du droit ! L’année de césure a été salvatrice tant elle m’a permis de me rendre compte que l’on pouvait tout faire. On a souvent l’impression qu’une seule porte s’ouvre à nous, celle du Barreau, pour faire du droit des affaires et dans le meilleur des mondes du contentieux. Mais que nenni ! Si on est assez curieux, absolument tout est possible après cette École. Jamais je n’aurai cru faire tout ce que j’ai fait depuis mon passage à l’École de droit et je sais que c’est en grande partie à cette dernière que je dois tout ce que j’ai pu faire depuis la diplomation.

Un conseil pour celles et ceux qui souhaiteraient rejoindre l’École de droit ?

Ne faites jamais l’erreur de considérer Sciences Po comme une fin et non pas un moyen. L’École de droit de Sciences Po, Sciences Po tout court, sera le moyen d’être à la hauteur de vos ambitions. C’est une étape de parcours, la plus belle des formations mais je pense qu’il est très important de ne pas oublier qu’il y a un après. Et même si cet après est flou, voire effrayant tant Sciences Po nous offre un cocon hors du commun, presque déconnecté du monde, il ne faut pas avoir peur de ne pas savoir ce que l’on veut. Ce n’est pas grave de ne pas savoir et je dirais même que c’est le privilège de notre âge. On a toute la vie pour savoir ! J’ai dû attendre d’arriver en Master 2 pour enfin parvenir à définir ce que je voulais faire (parce que j’ai même essayer de passer la FEMIS à l’époque, pour vous dire à quel point j’étais perdue !). Et il a fallu que j’arrive à mon troisième Master 2 pour avoir la certitude de ne pas me tromper…

Les Sciences pistes ont la fâcheuse tendance à détester ne pas savoir ; je pense au contraire que c’est ce que mon École m’a transmis de plus précieux. La conscience de tout ce que je ne sais pas, l’étendue de mon ignorance en somme ! Et la conscience de l’infini des possibles qui s’offre à nous en sortie d’études. J’ai 25 ans et j’ai déjà l’impression d’avoir eu trois vies professionnelles différentes. Sciences Po a été un levier pour moi, qui m’a permis de me définir, de me trouver et d’arriver à qui je suis aujourd’hui. Je dis souvent pour rire que Sciences Po c’est un peu l’école de la vie, mais je le pense sincèrement. Plus que du savoir faire ou des "hard skills", Sciences Po m’a appris et transmis un savoir être dont la valeur est inestimable. En cabinet parisien, en festival à Cannes ou Montpellier, en association en Seine-Saint-Denis ou en entreprise, ce que Sciences Po m’a transmis me suit partout. Sciences Po m’a apporté et donné beaucoup de choses. J’espère à mon tour pouvoir rendre la pareille en enseignant un jour à l’École de droit une introduction au droit de l’audiovisuel (à bon entendeur…) !

Constance Allain, diplômée 2019 du master Droit économique spécialité Entreprises, Marchés, Régulations (EMR)