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Choix d’un logo nutritionnel : des intérêts inconciliables

two rival chicken. Crédits : De kokkodrillo. Shutterstock
Supermarket. De Billion Photos. Shutterstock

Supermarket, par Billion Photos. Shutterstock

Le choix d’un nouveau logo nutritionnel par le ministère de la Santé s’annonçait difficile, compte tenu des intérêts divergents des acteurs concernés. Conscient de l’enjeu, le ministère de la Santé a engagé une étude évaluative les réunissant. Les débats autour de cette évaluation ont été houleux et parfois quasi impossibles. Comment en est-on arrivé là ? Quelles leçons peut-on en tirer ? C’est le but du projet de recherche “COntroverse sur les LOgos NUTritionnels” dont l’INSERM a confié direction à  Daniel Benamouzig, chercheur au Centre de sociologie des organisations.

Un enjeu de santé publique

Les Français accordent une importance croissante au caractère sain de leur alimentation. Ils s’interrogent, recherchent des informations et modifient leurs comportements. Ces préoccupations sont prises en compte par les pouvoirs publics, qui développent de nouveaux outils d’action, qui appellent en retour des réactions d’un large ensemble d’acteurs privés, souvent très organisés.

En 2016, la loi de modernisation de notre système de santé a prévu le déploiement de logos nutritionnels, destinés à rendre plus accessibles les informations communiquées sur les produits alimentaires.

Des intérêts divergents

Two rival chicken. Crédits : De kokkodrillo. Shutterstock

Two rival chicken. Crédits : Kokkodrillo. Shutterstock

Encore fallait-il savoir lesquels adopter, parmi les différentes options conçues avec des intentions diverses par des spécialistes de santé publique ou des industriels. La conduite d’une étude évaluative des différentes propositions par le ministère de la Santé a donné lieu à une importante controverse, mettant en exergue la complexité du sujet et la variété des positions, parfois peu conciliables.

Visant un but de connaissance et des finalités pragmatiques, cette initiative  a associé des acteurs publics et privés, académiques et industriels, dont il était attendu qu’ils participent à l’évaluation des logos. La démarche a donné lieu à un important travail de concertation, entamé en 2015, et a fait apparaître des intérêts divergents à propos des logos et des conditions mêmes de leur évaluation.

Elle a donné lieu à une controverse publique, se traduisant en particulier par la démission médiatisée de plusieurs experts. Pour finir, les résultats de l’expérimentation ont conduit la ministre de la santé à privilégier le logo « nutriscore » dit à cinq couleurs, en entraînant des réactions critiques quoique différenciées de la part des industriels.

La controverse offre un éclairage sur l’état des débats et de l’action publique en matière d’alimentation et de nutrition, dans un contexte où d’importants intérêts tant sanitaires qu’économiques sont en jeu.

Analyser la controverse

Nutriscore - par openfoodfacts.org, [Public domain], via Wikimedia Commons

Nutriscore par openfoodfacts.org [Public domain]

Dans le cadre d’une convention d’aide à la recherche, l’INSERM (l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale) a confié la direction du projet COLONUT (COntroverse sur les LOgos NUTritionnels) à Daniel Benamouzig, chercheur au Centre de sociologie des organisations. Il travaillera avec Julie Blanck, jeune chercheuse au Centre de Sociologie des Organisations (CSO) en association avec d’autres chercheurs du CSO, aguerris sur les questions de santé et d’alimentation. Se basant sur des méthodes d’analyse des controverses, l’étude se propose d’étudier cette expérience en poursuivant deux  objectifs :

  • Expliciter les éléments contextuels  de décisions publiques controversées, notamment en termes d’enjeux industriels, scientifiques et sanitaires : quels sont les acteurs en présence ? quelles sont les stratégies d’influence ? quels corpus de connaissance sont mobilisés ? etc…
  • Expérimenter des conditions de recueil « à chaud » de données qualitatives sensibles. Il s’agit notamment d’étudier comment garantir aux enquêtés un certain degré de confidentialité tout en collectant des éléments précis afin de comprendre la situation étudiée.