[RESEARCH PAPER- 2e édition] Puissance des plateformes numériques, territoires et souverainetés, par Dominique BOULLIER
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[INTERVIEW] Puissance des plateformes numériques, territoires et souverainetés, avec Dominique BOULLIER
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[POLICY BRIEF] Les enjeux paradoxaux de l’identité numérique régalienne, par Bénédicte BEVIERE-BOYER

« L’informatique doit être au service de chaque citoyen. Son développement doit s’opérer dans le cadre de la coopération internationale. Elle ne doit porter atteinte ni à l’identité humaine, ni aux droits de l’homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques », Article 1 er de la loi informatique et libertés.

Dans un contexte de dématérialisation croissante des services publics et privés, l’identité numérique connaît un déploiement considérable en matière de contrôles dans les aéroports, de démarches administratives, d’achats en ligne, de gestion et d’utilisation des données de santé.

Elle devrait prendre à l’avenir un essor encore plus important par la dématérialisation des documents d’identité et des titres sécurisés, omniprésents dans toutes les activités humaines via le smartphone des personnes. Elle se complète par la mise en place de portefeuilles numériques, permettant de s’identifier numériquement, de stocker et de gérer, sous forme électronique, des données d’identifications (carte d’identité, passeport électroniques, données biométriques), des documents officiels (diplômes, permis de conduire), ainsi que d’autres informations personnelles (Mon Espace santé), l’enjeu étant de faciliter le recours à l’identité numérique à l’occasion de multiples services publics et privés.

L’identité numérique constitue par conséquent un outil stratégique majeur autant pour l’Etat français que pour l’Union européenne. Elle doit faire l’objet d’une attention renforcée et être consolidée compte-tenu de la concurrence des entreprises privées, particulièrement les géants du numérique, mettant en place des identités numérique privées de plus en plus utilisées par le public. Leur développement est d’autant plus préoccupant qu’elles sont associées à des objectifs commerciaux, éloignés des enjeux de l’identité numérique des États membres associés à leur souveraineté, de déploiement des activités européennes, à l’intérêt général et à la protection des citoyens en termes de libertés et de vie privée.

A ce titre, l’identité numérique régalienne doit indiscutablement être consolidée au profit des enjeux d’intérêts publics. Objet d’enjeux paradoxaux, une vigilance s’impose à l’égard des actions qui sont menées en raison des atteintes potentielles aux libertés et à la vie privée.


Bénédicte Bévière-Boyer est maîtresse de conférences-HDR en droit privé à l’Université de Paris 8 et rattachée au Centre de recherches juridiques de Paris 8. Ses travaux de recherches portent sur le droit de la bioéthique, de l’éthique et du numérique. Elle a dirigé 8 ouvrages collectifs, écrit plus de 70 articles et 80 chroniques d’actualités. Elle organise régulièrement des colloques sur des thèmes d’actualité en lien avec plusieurs universités chinoises. Elle dirige le M2 droit de la santé, numérique et intelligence artificielle à l’Université de Paris 8.

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