Ollanta Humala vainqueur des élections au Pérou : la revanche des provinces

Dimanche 5 juin, Ollanta Humala a finalement réussi à remporter les élections présidentielles au Pérou. Il a battu sa rivale de 3 points en comptabilisant 51,5% des suffrages. Face à l'appui des médias et de l'élite  économique pour la candidate Keiko Fujimori, il a réussi à regagner du terrain dans les derniers de jours de campagne grâce à l'appui d'intellectuels, dont Mario Vargas Llosa, et de l'ex président Alejandro Toledo. La mémoire a parlé et un front s'est créé pour réduire les chances de victoire de la fille de l'ex-président et dictateur, Alberto Fujimori (1990-2000).

La victoire d'Ollanta Humala, premier président de gauche depuis le retour de la démocratie en 1980, est la revanche des populations peu  écoutées par le gouvernement d'Alan Garcia (2006-2011). Les conflits sociaux battent leur plein au Pérou depuis 2008. Etouffées, les revendications ont ressurgi  pendant les élections et dans les urnes. Les secteurs mobilisés sont principalement les ouvriers des mines dans le centre et le sud du pays mais aussi les communautés de l'Amazonie dont le statut des terres est remis en cause. Ollanta Humala a d'ailleurs été élu à la fâcheuse date d'anniversaire du massacre de Bagua du 5 juin 2009. Les populations de l'Amazonie étaient alors mobilisées depuis plus d'un an contre un décret qui révisait leur droit de propriété sur leur territoire. Le nouveau président élu a également bénéficié de la fragmentation politique du centre. En effet, les trois candidats du centre de tendance libérale n'ont pas trouvé de terrain d'entente et ils ont laissé porte ouverte à la victoire des deux extrêmes au second tour. Nous ne pouvons que le répéter, l'absence de système de partis au Pérou facilite la victoire des candidats de tendance populiste.

Le rapprochement d'Ollanta Humala avec la figure emblématique de Lula Da Silva a également porté les fruits de la victoire. Le programme du nouveau président élu  est plus progressiste que celui de 2006. Entre le premier et le second tour, Humala a d'ailleurs rectifié certains points de son programme pour rassurer les investisseurs : maintien des Traités de Libre Echange et pas de réforme de la Constitution. Ce changement n'a pas empêché la chute de la bourse de Lima au moment de la publication des résultats. Le pouvoir économique de Lima a voulu marqué son opposition aux résultats en créant un effet de frayeur. Si l'ex-commandant élu voulait imposer une politique autoritaire, il n'en aurait pas pour autant la marge de manœuvre. Son parti, Gana Perú, n'a pas la majorité au Congrès. Il va devoir créer des alliances avec le parti politique d'A.Toledo, Perú Posible, de tendance modérée, pour contrer la majorité que forme Fuerza 2011, organisation politique de Keiko, et Alianza por El Gran cambio, menée par Pedro Pablo Kuczynski.  La victoire d'Ollanta Humala s'inscrit pour le moment comme celle de la mémoire et d'un changement possible pour le Pérou où le développement des provinces de la Sierra et de l'Amazonie serait enfin intégré au programme politique de l'inclusion sociale.

Pour plus d'informations sur la personnalité de Ollanta Humala voir l'article de Mathilde Claverie « La montée en puissance d'Ollanta Humala dans la campagne présidentielle : décryptage »  publié le samedi 9 avril 2011 sur Opalc.

Retrouvez sur le site d'El Comercio la carte des appuis électoraux des deux candidats.

 


Source : Oficina Nacional de Procesos Electorales, Pérou.

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