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30.04.2025
Le temps d’une soirée avec Chimamanda Ngozi Adichie : entre convictions et création
Douze ans ont passé, depuis l’immense succès de son dernier roman, Americanah. Le 25 mars 2025, la Maison des Arts & de la Création de Sciences Po a eu l’immense privilège d'accueillir une icône de la littérature contemporaine, l’écrivaine nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, à l’occasion de la sortie en France de son nouveau roman, L’inventaire des rêves aux éditions Gallimard (Dream Count). Comble, l'amphithéâtre Boutmy était chargé d'une émotion et d’un enthousiasme palpables pour accueillir cette autrice iconique pour un échange animé par Hélène Périvier, économiste à l’OFCE/Sciences Po et directrice du Programme d'études sur le genre de Sciences Po (PRESAGE), accompagnée par deux étudiants de PSIA et deux ambassadrices de la Maison des Arts & de la Création.
Inès Abdallahi, Charline Couturier et Julia Daley, ambassadrices de la Maison des Arts & de la Création, ont assisté à cet événement. Elles reviennent ici sur leur expérience, partageant leurs observations, leurs réflexions, les idées et enjeux qu’elles ont soulevés ensemble.
“Art has to be allowed to be art — and to be art we cannot attach to art any ideology.”
Chimamanda Ngozi Adichie a mis en lumière l’émancipation de la femme - non plus en tant que muse - mais en tant que créatrice. Dans le monde d’aujourd’hui, quelle est la place du “droit à créer” pour la femme ? Portée par le pouvoir de l'écriture, celui qui façonne les récits, déconstruit les stéréotypes, et ouvre des mondes nouveaux, l’écrivaine s’est livrée avec une grande générosité. Elle a évoqué ses expériences personnelles, son œuvre littéraire, mais aussi les réalités du monde qui l’entourent. Parmi les multiples thèmes abordés, l’écriture de fiction occupe une place centrale. Pour elle, l’écrivain·e doit “écrire sur le monde tel qu’il est, et non tel que nous voulons qu’il soit” (“write about the world as it is, and not as we wish it were”). Une posture lucide, engagée, qui rejoint sa volonté de raconter les vérités humaines dans toute leur complexité et fragilité. Si son engagement féministe est bien connu, Chimamanda Ngozi Adichie a tenu à marquer une différence entre son activisme et son œuvre littéraire : deux sphères qu’elle habite pleinement, mais qu’elle choisit de ne pas confondre.
“D'où viennent vos idées ?”: la question qui revient souvent dans la vie d’un.e écrivain.e
Chimamanda Ngozi Adichie y a répondu par cette fabuleuse expression : “Cela vient comme une tempête qui murmure” (“It comes as a whispered storm”). Parfois comme possédée par ses propres personnages, la mise en mots de ses pensées prend, dans tous les cas, la forme d’une urgence, d’une nécessité quasi-spirituelle. Ce chemin ou ce processus trouve ses inspirations dans différentes figures, dont celle de l’auteur Chinua Achebe, qui l’a beaucoup inspirée en l’autorisant à écrire, lui-même étant africain, igbo et attaché à sa culture dont il a fait un objet de son œuvre littéraire.
L’échange s’est conclu par deux questions des étudiants du Programme de Bourses de la Fondation Mastercard. Snella Kimana a interrogé Chimamanda Ngozi Adichie sur les idées reçues autour du féminisme en Afrique. L’écrivaine s’est défendue de l’accusation d’être opposée au mariage, précisant qu'elle soutenait des unions plus équitables entre hommes et femmes. Erisa Sserwadda a ensuite abordé la question de la migration des jeunes Africains vers l’Occident pour leurs études. Chimamanda Ngozi Adichie a exprimé sa compréhension, évoquant son propre choix de vivre au Nigeria, pointant du doigt l’échec des politiques africaines à offrir des opportunités aux jeunes diplômés.
C’est l’une des nombreuses réflexions puissantes que Chimamanda Ngozi Adichie nous a partagées lors de cette conversation mémorable en Boutmy. Un moment suspendu, où chaque mot prononcé semblait porter un souffle d’éveil, de bienveillance et d’universel. Assister à cette rencontre, c’était entendre une voix puissante, libre et singulière. Une voix qui éclaire, qui interroge, et qui nous inspire en tant que jeunes générations.
