Accueil>"J'ai créé les rêves et saisi les opportunités" : retour sur la rencontre inaugurale avec Maud Le Pladec

25.09.2025

"J'ai créé les rêves et saisi les opportunités" : retour sur la rencontre inaugurale avec Maud Le Pladec

Maud Le Pladec, danseuse, chorégraphe et directrice du CCN du ballet de Lorraine, est la nouvelle titulaire de la Chaire Arts Vivants, prenant ainsi la suite de la cantatrice et comédienne, Natalie Dessay. Louane Thiébault-Frémaux et Xinyue Sheng, étudiantes à l’École d’Affaires publiques et à l’École de la recherche, ont participé à ces échanges. Elles reviennent ici sur leur expérience, partageant leurs observations, leurs réflexions, les idées et enjeux qu’ils ont soulevés ensemble.

Un chemin singulier

Crédit photo : Pauline Bouchilloux   

Rien ne prédestinait Maud Le Pladec à devenir danseuse ou chorégraphe lorsqu’elle était enfant. Elle découvre la danse presque par hasard, poussée par une mère passionnée. Elle commence le jazz à six ans, mais suit des études d’économie à la demande de ses parents. Après l’obtention de son diplôme, elle choisit enfin de se consacrer pleinement à la danse, avec une détermination claire : « Je n'appartiendrai à aucune école, je ferai mon propre chemin. » D’abord danseuse professionnelle, puis chorégraphe, elle se distingue également par ses qualités de directrice d’institutions culturelles. À la tête du CCN d’Orléans pendant huit ans, aujourd’hui CCN - Ballet de Lorraine, elle embrasse le rôle d’« entrepreneuse culturelle », assumant les responsabilités managériales, mais également économiques et politiques qu’impliquent ces fonctions. Elle souligne l'impact de son parcours en finance, qui nourrit ses compétences en management et en entrepreneuriat, des savoir-faire rarement associés au métier de danseuse, mais pourtant essentiels pour diriger une entreprise culturelle. « Je suis vraiment une entrepreneuse, je suis le pur produit de la politique », affirme-t-elle. 

« Entendre la danse et voir la musique »

Repensant les liens entre danse et musique, Maud Le Pladec cherche, dans son travail de chorégraphe, à renverser les paradigmes traditionnels, pour permettre au public « d’entendre la danse et de voir la musique ». Selon elle, chaque geste des danseurs doit refléter les notes et le rythme de la musique, pour permettre au spectateur de voir celle-ci. Maud Le Pladec a également mené plusieurs expériences innovantes pour tisser des liens entre ces deux formes artistiques, en demandant notamment à des compositeurs de travailler à partir des mouvements des danseurs, ou aux danseurs de créer la musique à partir des sons de leur corps.

« Tout fait spectacle » : l’intuition, l’inspiration, l’espace

Crédit photo : Pauline Bouchilloux   

Chez Maud Le Pladec, la chorégraphie est à la fois mathématique et instinctive. Ses répétitions sont rigoureusement composées, jamais improvisées. Pourtant, sa démarche de casting relève souvent de l’intuition. Le choix de la jeune krumpeuse Adeline Kerry Cruz pour Silent Legacy repose sur une conviction immédiate : « J’ai vu la vieille âme de l’enfant… J’ai décidé. C’est elle. » Pour Maud Le Pladec, la danse révèle l’invisible dans notre vie quotidienne : le silence, les mémoires et les héritages transgénérationnels. Inspirée par des univers aussi variés que la musique électro, le rock, le cinéma et l’opéra, elle conçoit la danse comme un langage capable de faire vibrer le corps et l’espace. Elle crée des spectacles vivants qui transforment les villes, font danser les architectures et renouvellent notre rapport au quotidien. De la scène théâtrale aux places publiques, elle cherche à réenchanter l’espace et à faire de chaque geste une prise de parole poétique.

Au-delà de la danse : un engagement pour favoriser l’égalité hommes-femmes

En 2025, seulement trois femmes en France sont directrices d'un Centre National Chorégraphique (Maud Le Pladec au Ballet de Lorraine, Olivia Grandville à La Rochelle et Ambra Senatore à Nantes). Un chiffre drastiquement en baisse depuis les années 1990. Cette situation inégalitaire est multifactorielle selon Maud Le Pladec : le manque de représentation, l’autocensure de la part des femmes, et le soutien inégal d’acteurs et d’actrices de la sphère chorégraphique. L'artiste évoque plusieurs pistes à suivre pour favoriser une plus grande égalité hommes-femmes dans le milieu professionnel de la danse, tel que l’augmentation du soutien aux artistes féminines. C’est notamment ce qu’elle a mis en place, avec le festival Femmes Modernes lorsqu’elle était directrice du CCN d’Orléans, en optant pour une programmation exclusivement féminine.

Revoir la rencontre

Avec le soutien de Chanel et le19M, partenaires de la Maison des Arts et de la Création.