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08.09.2020

Caroline Duhaâ vient d’obtenir la Certification avancée en études de genre

Caroline Duhaâ vient d’obtenir le Master en Sociologie de l’École doctorale de Sciences Po assorti de la Certification avancée en études de genre. Elle revient sur son parcours, de ses premiers cours en études de genre sur le campus de Paris, à la rédaction de son mémoire de Master sur la répartition du travail domestique.

VOUS AVEZ SUIVI DE NOMBREUX ENSEIGNEMENTS EN ÉTUDES DE GENRE DURANT VOTRE SCOLARITÉ. D’OÙ VIENT VOTRE INTÉRÊT POUR CE CHAMP DE RECHERCHE ?

D’une sensibilité aux inégalités de genre et d’une volonté de contribuer à faire bouger les lignes ! Et aussi de la conviction qu’une connaissance solide de l’état de la recherche à ce sujet serait particulièrement précieuse pour cela, ainsi qu’une volonté de nourrir ma réflexion théorique. Dès que j’en ai eu l’opportunité, j’ai choisi de suivre des enseignements en études de genre : ils ont contribué à confirmer et renforcer mon intérêt pour la question et à ouvrir de nouvelles portes, j’ai donc continué !

POURQUOI AVEZ-VOUS CHOISI D'INTÉGRER LE MASTER DE RECHERCHE EN SOCIOLOGIE ?

Pour les mêmes raisons : je souhaitais parvenir à une compréhension plus fine de la société actuelle, par intérêt intellectuel et aussi parce que j’envisageais déjà à ce moment-là de me diriger vers un métier en lien avec les politiques publiques de lutte contre les inégalités. Or, afin d’identifier les besoins et les solutions à apporter en termes de politiques publiques, il me semble primordial de procéder à un diagnostic rigoureux de la situation en se basant sur l’état et les outils de la recherche. La question des inégalités sociales est un objet d’étude majeur de la discipline sociologique, et la formation proposée à l’École doctorale de Sciences Po comprend à la fois une dimension théorique et une dimension pratique, avec l’apprentissage des méthodes de la recherche. Choisir ce Master me paraissait donc en adéquation avec ma démarche. Le fait qu’il soit présenté comme ne débouchant pas uniquement sur une carrière académique m’a aussi confortée dans le choix de cette formation.

VOUS AVEZ EFFECTUÉ UN STAGE AU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L’ÉGALITÉ PROFESSIONNELLE ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES. QUELLES ÉTAIENT VOS MISSIONS ?

Je participais aux travaux du CSEP, qui est une instance consultative tripartite qui formule des avis et propositions sur la question de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Et j’étais chargée de soutenir les activités de sa Secrétaire générale. Concrètement, j’ai contribué à la finalisation du rapport L’égalité entre les femmes et les hommes dans les procédures RH (PDF, 12 Mo) et à la rédaction du kit pratique associé (PDF, 7 Mo) à destination des acteurs et des actrices impliquées dans les ressources humaines, ou encore à l’analyse des résultats d’une enquête statistique sur la prise en compte de la parentalité en entreprise (PDF, 6 Mo). J’ai aussi rédigé des notes sur divers sujets en lien avec l’égalité femmes-hommes à destination de la Secrétaire générale, et ai contribué à la rédaction d’une note à destination de la Secrétaire d’État en charge de l'Égalité entre les femmes et les hommes. J’étais également chargée de réaliser une veille juridique et médiatique quotidienne sur les sujets liés à l’égalité, en particulier professionnelle, entre les femmes et les hommes.

En plus de ces missions, qui constituaient le cœur de mon stage, la gestion du compte Twitter du CSEP m’a été confiée ainsi que diverses missions administratives (organisation de réunions de groupes de travail, réalisation de comptes-rendus de réunions notamment).

VOUS VENEZ DE SOUTENIR VOTRE MÉMOIRE, INTITULÉ LE PRIVÉ EST POLITIQUE SUR LES IDÉAUX ET LES PRATIQUES CONCERNANT LA RÉPARTITION DU TRAVAIL DOMESTIQUE CHEZ LES FÉMINISTES EN COUPLE HÉTÉROSEXUEL COHABITANT. POURQUOI AVEZ-VOUS CHOISI CE SUJET ?

Je savais en postulant au Master de sociologie que je souhaitais réaliser un mémoire s’inscrivant dans le champ de la sociologie du genre. Le choix de ce sujet est né d’une double interpellation : d’une part j’ai remarqué une accumulation de témoignages de féministes constatant l’échec de la mise en application de leurs idéaux en termes de répartition du travail domestique avec leurs conjoints ; et d’autre part, j’ai fait le constat d’un paradoxe : alors que la répartition du travail domestique au sein des couples hétérosexuels est un objet qui a été — et qui continue d’être — largement étudié en sociologie, que l'un des registres classiquement mobilisé pour rendre compte de l'état de cette répartition est l'"idéologie de genre" des individus, et que le mouvement féministe s’est explicitement saisi de la question du travail domestique depuis les années 1960-1970, la question des liens entre identification comme féministe et idéaux et pratiques concernant la répartition du travail domestique a jusqu’à présent été presque intégralement ignorée par la littérature scientifique. Cela m’a semblé d’autant plus étonnant que ce sujet fait intervenir une multitude de dimensions et de nombreux questionnements que j’ai trouvé passionnants !

POUVEZ-VOUS NOUS EN DIRE PLUS ?

Pour réaliser mon enquête, j’ai fait appel à une méthodologie mixte : j’ai récolté des données quantitatives par le biais d’un questionnaire diffusé en ligne (ce qui m’a ensuite permis de mener des analyses quantitatives sur les réponses de près de 1000 personnes) et j’ai conduit des entretiens individuels avec les membres de 11 couples. Dans mon travail, j’ai accordé une attention particulière à la question des stratégies — conscientes ou inconscientes — mises en place par les féministes pour gérer la problématique d’un éventuel écart entre idéaux et pratiques, en amont et/ou en aval de l’apparition de celui-ci. L’analyse de mes données a révélé une association au sein de mon échantillon qualitatif entre la nature de l’idéologie de genre des conjoints et la nature et les effets des stratégies mises en place par leurs conjointes. La ‘simple’ adhésion à des valeurs égalitaires de la part des hommes, y compris lorsqu’elle prend la forme d’un accord théorique important avec le féminisme porté par leurs compagnes, n’est pas une condition suffisante à la traduction effective des idéaux de ces dernières en termes de répartition du travail domestique. Il semble que la perception — plus ou moins consciente — de la réalisation de ce travail comme constituant ou non une ‘menace’ pour leur masculinité soit un facteur-clé à prendre en compte.

Les résultats de mes analyses statistiques ne m’autorisent pas à conclure quant à l’existence ou non, “toutes choses égales par ailleurs”, d’un effet du féminisme des conjointes, et de la plus ou moins grande importance qu’elles y accordent, sur la répartition du travail domestique au sein de leurs couples. Mes analyses gagneraient à être reproduites sur un échantillon plus large et représentatif de la population française. D’une manière générale, je suis convaincue que la question des liens entre identification comme féministe et idéaux et pratiques de répartition du travail domestique mériterait d’être plus amplement explorée !

QUELS SONT VOS PROJETS POUR LA SUITE ?

J’aimerais contribuer à l’élaboration de politiques publiques de lutte contre les inégalités de genre en travaillant pour une ONG, une association, un think tank ou une instance consultative formulant des propositions et effectuant des actions de plaidoyer à ce sujet. J’espère notamment, grâce à ma formation, pouvoir contribuer à ce que les politiques publiques prennent en compte les résultats de la recherche scientifique, y compris en sciences sociales, pour proposer des réponses adaptées aux problématiques actuelles.

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