La conversion écologique des français

La conversion écologique des français

Contradictions et clivages
P. Coulangeon, Y. Demoli, M. Ginsburger, I. Petev - PUF
  • Image Eak sikgun (Shutterstock) et PUF Image Eak sikgun (Shutterstock) et PUF

La conversion écologique des français
Contradictions et clivages

Philippe Coulangeon, Yoann Demoli, Maël Ginsburger, Ivaylo Petev

PUF, collection Le lien social, 220 p., ISBN 978-2-13-083258-4

Au début des années 90, deux jeunes chercheurs en planification urbaine de l'Université de Colombie-Britanique proposaient un nouvel outil de mesure, l'empreinte écologique, pour mieux quantifier la soutenabilité de notre environnement face aux comportements et à la pression humaine. De multiples politiques publiques affichent, à la suite des accords de Paris en 2015 ou des rapports du GIEC, la préoccupation de réduire cette empreinte, mettant sobriété et réduction des pollutions au coeur de dispositifs incitatifs ou coercitifs. Même si les innovations technologiques ou l'amélioration du cadre de vie atténuera le coût social de la transition, l'impact sur nos modes de vie et de consommation sera réel.
Cet ouvrage entend montrer que pour apprécier une telle transformation, il est nécessaire de prendre en compte les habitudes et pratiques polluantes des français dans leurs rapports inégalitaires à l'espace résidentiel ainsi que les clivages de classe sociale, d'âge ou de genre qui divisent la population.

Ce livre étudie les logiques sociales de la conversion écologique en questionnant les représentations, les attitudes et les pratiques à partir de plusieurs sources, du Panel ELIPSS comprenant un échantillon représentatif de la population française aux grandes enquêtes nationales de la statistique publique.      

La première partie de l'ouvrage, analyse sur une longue période la diffusion des préoccupations environnementales à l'échelle mondiale. Une série de modèles interprétatifs sont proposés, selon le rôle prêté à l'évolution des conditions matérielles d'existence, la diffusion des valeurs pro-environnementales ou les changements culturels. Ces préoccupations sont en France très inégalement partagées. Dans la seconde partie, une analyse systématique des mutations de la consommation et des styles de vie est proposée. Mutation des régimes de consommation alimentaire (chapitre 3), contraintes matérielles et résidentielles encadrant les consommations vestimentaires ou d'équipement domestique (chap. 4), rationalité ambivalente des pratiques de tri et de sobriété énergétique qui découle de motivations concurrentes de préservation des ressources et d'adaptation aux contraintes budgétaires (chap. 5), articulation des contraintes sociales et spatiales de déplacement et dimension statutaire des mobilités (chap. 6). Dans la dernière partie, les auteurs proposent une analyse des clivages qui traversent la société française contemporaine en matière de pratiques environnementales. Les auteurs révèlent alors une possible contradiction des attitudes et des pratiques. La conversion se trouve entravée par le poids des fractures sociales et spatiales qui traversent la société.

Dans le chapitre 8, les auteurs dressent une typologie des mode de vie permettant de distinguer 4 styles d'empreinte environnementale. Ces idéaux-types sont formés par le lien entre la sobriété et la conscience environnementale :
- le consumérisme assumé (-/-)
- l'écoconsumérisme (-/+)
- l'écocosmopolitisme (+/+)
- la frugalité sans intention (+/-).

En conclusion les auteurs soulignent que le souci environnemental s'est généralisé en France comme au niveau international, mais tardivement, et de manière partielle et non homogène. Deux logiques sont à l'oeuvre : un sentiment d'inquiétude environnementale et une forme de défiance vis-à-vis du progrès technique et humain. Les variations sociales sont notables. L'articulation entre préoccupation environnementale et évolution des habitudes de consommation est complexe et ambivalente. Ces dernières années restent marquées par une intensification des pratiques de consommation, de l'usage de la voiture et de l'avion. Autour de la conversion écologique se jouent des logiques économiques, de classe, de type et lieu d'habitat, de genre, rendant complexes les politiques de transition devant prendre en compte les coûts économiques et sociaux des réformes et leur acceptabilité sociale.  

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