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NEWSLETTER

20 juin 2016

Sciences Po | Ceri - CNRS  
     
 

Édito

  Le Brexit n’est pas qu’une question britannique  
     
 

Par Christian Lequesne

A quelques jours du référendum, il est impossible d’affirmer qui, du camp du "remain" ou de celui du "leave", emportera la mise. Le scrutin sera serré et, quelle que soit la majorité, elle risque d’être faible. Bien entendu, si le non l’emporte, ce serait une grande première pour le processus de l’intégration européenne : un Etat s’en ira. Il faudra réfléchir aux conditions d’un nouveau statut pour le Royaume-Uni qui voudra conserver des liens avec le marché européen : membre de l’Espace Economique Européen comme la Norvège, l’Islande et le Liechtenstein, signataire d’un accord bilatéral sur le marché intérieur comme la Suisse, membre d’une Union douanière comme la Turquie, simple signataire d’un accord de libre-échange comme le Canada.  Tout ceci prendra au bas mot deux ans.

Au plan politique, l’effet de contagion risque d’être délétère. Aux Pays-Bas, au Danemark, en Hongrie ou en République tchèque, certains se demanderont pourquoi ne pas tenter ce que le Royaume-Uni a réussi. En France, le Front National n’a jamais officiellement appelé à la sortie de l’Union européenne. Seule celle de l’euro est visée dans ses discours. Qui nous dit que Marine Le Pen, dans le but d’appuyer sa campagne électorale en 2017, ne passera pas à une vitesse supérieure ? La sortie de la Grande-Bretagne aurait donc des conséquences non seulement pour ce pays, mais pour l’ensemble de l’Union européenne.

Dans le fond, le débat britannique sur le Brexit ne fait que mettre à jour la baisse de légitimité de l’Union européenne dans l’ensemble de l’UE et les tentations de nombreuses forces politiques au "détricotage" du processus d’intégration. Ce ne sont pas les Britanniques seuls qui ont inventé l’euroscepticisme. Leur référendum risque simplement de faire passer ce dernier à une vitesse supérieure.

Si le Royaume-Uni reste dans l’Union, rien n’est réglé non plus. Tout d’abord, les eurosceptiques du Parti Conservateur demanderont à David Cameron de mettre en œuvre le compromis signé le 19 février 2016 avec ses 27 partenaires européens. Pour le Premier ministre britannique, ce compromis (largement concocté par les institutions européennes) n’avait pas beaucoup d’intérêt pour son contenu. La priorité était de disposer d’un texte en main qui permettait de rentrer à Londres en affirmant que le Royaume-Uni avait obtenu des concessions. Mais ceux qui voulaient la sortie pure et simple du Royaume-Uni ne manqueront pas de revenir à la charge sur un contenu qu’il faudra transformer en réalité. Les problèmes de mise en œuvre ne seront pas minces. Tout d’abord, la levée de l’engagement pour le Royaume-Uni de souscrire à l’objectif d’une "Union sans cesse plus étroite" ne pourra se faire que par l’ajout d’un protocole aux traités européens, et donc par une réforme du traité. Or, peu d’Etats membres de l’Union seront favorables à un tel chantier à court terme. Ensuite, il faudra transformer en obligations juridiques les dispositions de l’accord politique visant à limiter les droits sociaux des travailleurs communautaires (surtout polonais) au Royaume-Uni. Il n’est pas certain que ces textes soient adoptés facilement au Conseil des ministres de l’Union européenne. Et s’ils le sont, pourront-ils éviter d’être censurés a posteriori par la Cour de justice pour non conformité au droit européen ? Les eurosceptiques du Parti conservateur et les partisans de l’UKIP, sur leur droite, crieront donc à la trahison. De l’autre côté, si l’Ecosse se trouve contrainte de quitter l’Union en raison d’un non anglais, comment cela ne relancera-t-il pas à moyen terme la volonté de se démarquer de Londres et peut être un jour de fonder un Etat écossais membre de l’Union européenne ?

Il ne faudra pas non plus compter sur le Royaume-Uni, si celui-ci choisit de rester, pour participer à un projet de relance politique de l’Union européenne. Or cette relance est plus qu’indispensable. Voici plus de huit ans que l’Union européenne gère des crises (de l’euro, des réfugiés, du Brexit) sans pouvoir se projeter en avant. Il faut bien qu’à un moment elle retrouve le chemin de l’avenir en proposant un nouveau projet politique, par exemple autour d’une zone euro réformée. Mais ce sera sans le Royaume-Uni qui aura à cœur de faire savoir qu’il ne faut pas aller trop loin dans l’idée d’un éventuel noyau dur qui pourrait marginaliser ceux qui ne veulent pas aller plus loin dans l’intégration politique. La Pologne du PiS, le Danemark ou la Suède auront à cœur d’appuyer cette revendication britannique considérée légitime. Pour que cette relance ait lieu, encore faut-il que Paris et Berlin réussissent à trouver un compromis après les élections de 2017. Tout dépendra de qui sera élu président en France et chancelier à Berlin. Chacun devra mettre de l’eau dans son vin. Les Français devront accélérer les réformes structurelles de leur économie, malgré les corporatismes archaïques qui feront front. La résistance à la réforme du marché du travail introduite par le gouvernement Valls en a été récemment une belle illustration. Les Allemands devront partager plus volontiers les dividendes de leur relance par une solidarité financière assumée. Le populisme allemand visant à affirmer qu’il ne faut plus payer un sou est aussi délétère que le conservatisme social français pour l’avenir du projet politique européen.

Une chose est bénéfique dans le débat du Brexit : celui-ci pose de manière ouverte les termes de l’avenir du projet politique européen. Que le "remain" ou le "leave" l’emporte, rien ne sera réglé d’un coup de baguette magique au sein de l’Union européenne. Le Brexit a cette vertu de rendre plus difficile la politique de l’autruche.

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Pour en savoir plus : voir l'article cosigné par Christian Lequesne et Thierry Chopin dans la revue "International affairs" ainsi que leur rapport sur le Brexit disponible sur le site du CERI.

 
 

 

VIENT DE PARAÎTRE

         
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Jacobo Grajales, Gouverner dans la violence. Le paramilitarisme en Colombie

Karthala, coll. "Recherches internationales", 2016, 324 p.

 
         
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Marie Vannetzel, Les Frères musulmans égyptiens. Enquête sur un secret public

Karthala, coll. "Recherches internationales", 2016, 460 p.

 
         
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European Revue of International Studies. Dossier spécial "German Ordoliberalism, Part 1".

Editions Barbara Budrich, volume 2, numéro 3, hiver 2015.

 
         
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François Bafoil, Rachel Guyet, Ferenc Fodor (dir.), Penser la justice énergétique en Europe et en Asie

L'Europe en formation, Journal of Studies on European Integration and Federalism, dossier spécial, n° 377, hiver 2015

 
         
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Stéphanie Balme, Chine, les visages de la justice ordinaire. Entre faits et droit

Presses de Sciences Po, coll. "Académique", 2016, 280 p.

 
         
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Guillaume Devin (dir.), Méthodes de recherche en relations internationales

Presses de Sciences Po, coll. "Relations internationales", 2016, 272 p.

 
         
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Grégoire Mallard, Jérôme Sgard (dir.), Contractual Knowledge. One Hundred Years of Legal Experimentation in Global Markets

Cambridge University Press, 2016, 432 p.

 
         
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Catherine Wihtol de Wenden, Atlas des migrations

Autrement, 2016, 4ème édition.

 
         
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Samuel B. H. Faure, Défense européenne. Émergence d'une culture stratégique commune

Athéna Editions, 2016, 236 p.

 
         
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Thierry Chopin, Michel Foucher (dir.), Le Rapport Schuman sur l'Europe, l'état de l'Union 2016

Editions Lignes de repères, 2016, 308 p.

 

COUP D'ŒIL

  "Gouvernance et participation citoyenne dans la région andine" : un partenariat recherche-action  
     
 

Fin 2015, l’Observatoire Politique sur l’Amérique Latine et les Caraïbes (OPALC) du CERI, l'organisation colombienne Transparencia por Colombia (antenne colombienne de Transparency international) et la Fondation Charles Léopold Mayer ont initié un partenariat pour la réalisation d’un projet d'une durée de deux ans et demi intitulé "Gouvernance et participation citoyenne en région andine".

Basé sur une démarche d'étude, d’action et de plaidoyer, le projet s'intéresse en particulier aux effets et transformations de la participation sociale et politique sur l'action publique. Il s'agit d'identifier, d´analyser et d’accompagner des pratiques innovantes d’interaction entre les institutions publiques et les acteurs non-étatiques (société civile, secteur privé, citoyens...) permettant l’élaboration de régulations efficaces et légitimes au sein de la sphère publique.

Les activités se répartissent entre l´OPALC et Transparencia por Colombia et entre la France et la Colombie. Durant les six premiers mois du projet, des expériences de contrôle citoyen sur la transparence dans les affaires publiques ont été identifiées et recensées dans six pays d´Amérique latine. Elles nourriront un ouvrage prévu pour 2017 sur les effets et transformations des exercices de contrôle citoyen sur l´action publique. Par ailleurs, le projet accompagne la création et l´installation d´un observatoire citoyen sur la lutte contre la corruption. Instrument de suivi et d´étude du phénomène de la corruption en Colombie, une plateforme web utile au citoyen pour s´informer mais également dénoncer des actes de corruption - le Moniteur - est en construction.

Entendue comme un lieu de coopération et de facilitation entre France, Europe et Amérique latine, cette initiative impulse un dialogue entre les milieux académiques, des organisations sociales et des institutions publiques.

Contacts : olivier.dabene@sciencespo.fr et claire.launay@sciencespo.fr

BRÈVES

  Création d’une chaire CERI-CERIUM en études internationales  
     
 

Le 16 juin a eu lieu à Montréal, avec la participation d’Alain Dieckhoff, la conférence inaugurale de la chaire en études internationales mise en place entre le CERI à Sciences Po et le Centre d’Etudes et de Recherches Internationales de l’Université de Montréal (CERIUM) dirigé par Frédéric Mérand.

Conçue pour contribuer au rayonnement de la recherche francophone sur les enjeux internationaux, cette chaire permettra le développement de programmes de recherche commun et la formation d’étudiants de master et de doctorat. Elle sera confiée pour une durée de trois ans et après appel à candidatures à un tandem d’enseignants-chercheurs, l’un basé en France et l’autre au Québec.

Les cotitulaires de la chaire animeront un séminaire mensuel de recherche par visioconférence et organiseront ensemble, chaque année, deux conférences scientifiques qui se dérouleront respectivement à Paris et à Montréal. Les activités de la chaire incluront aussi une école d’été annuelle et l’encadrement des doctorants en cotutelle.


  Appel à contributions : "(Dés)intégration et (dé)connexion dans l'espace post-soviétique (1991-2016)  
     
 

Le colloque, organisé conjointement par le CERI, l'IFEAC et l'IFG-Paris 8, se tiendra les 21 et 22 novembre 2016 en région parisienne. Il sera notamment l'occasion de conjuguer les approches socio-politiques (citoyenneté, migration), numériques (flux de données), socio-techniques (réseaux électriques, chauffage), géopolitiques (pipelines, transports) et internationales (diplomatie, régionalisme etc.). Cliquez ici pour plus de détails sur la problématique, le calendrier et les modalités pour proposer une communication.

  Soutenances de thèse  
     
 

- Swann Bommier, Un développement défectueux : accaparement des terres, mouvements sociaux transnationaux et régulation extraterritoriale des entreprises. Michelin au Tamil Nadu (Inde), sous la direction de Christophe Jaffrelot et Cécile Renouard (22 juin 2016)

- Edouardo Rios Ludena, La politique industrielle des Etats pétroliers : les effets contradictoires d'un Etat non-coordonné et les stratégies des élites économiques au Venezuela à la fin du boom pétrolier (2012-2014), sous la direction d'Olivier Dabène et Franck Poupeau (22 juin 2016)

- Rivka Azoulay, Elites et périphérie : reproduction de l'ordre politique ou vecteur de changement ? Le cas de la monarchie pétrolière des Al-Sabah (1899-2014), sous la direction de Gilles Kepel (27 juin 2016)

- Paloma Haschke, Les médias, les élites et l'armée en Egypte du début des années 2000 à aujourd'hui : le rôle des chaînes satellitaires et d'Internet, entre période révolutionnaire et mutation néo-authoritaire, sous la direction de Gilles Kepel (29 juin 2016)

- Alice Pannier, Franco-British defence cooperation under the Lancaster House Treaties (2010) : institutionalisation meets the challenges of bilateral cooperation, sous la direction de William Philpott et Frédéric Ramel (4 juillet 2016)

- Melike Okumus, Quels changements en cas de changement de la bureaucratie d'Etat ? Une analyse de la politique turque pendant les négociations du projet de corridor sud de l'énergie (SECP), sous la direction de Jean-François Bayart (7 juillet 2016)

ÉVÉNEMENTS

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Choosing Faith and Facing Race : l'expérience de la racialisation chez les converti-e-s à l’islam en France et aux États-Unis

Séminaire de recherche.
20 juin 2016, 17h-19h

 
 

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Le dialogue sino-taïwanais: autour du documentaire "Le Temps des mots"

Séminaire de recherche.
21 juin 2016, 17h-19h

 
 

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La diplomatie et la politique d’armement

Séminaire de recherche.
22 juin 2016, 12h30-15h

 
 

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La Turquie face à la crise des réfugiés syriens

Séminaire de recherche.
22 juin 2016, 17h-19h

 
 

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Gouverner dans la violence, en Colombie et ailleurs

Débat.
27 juin 2016, 17h-19h

 
 

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