Accueil>Pierre Benassaya, promotion 2019

15.12.2020

Pierre Benassaya, promotion 2019

Pierre Benassaya (crédits : Franck Dunouau)

POUVEZ-VOUS DÉCRIRE VOTRE PARCOURS UNIVERSITAIRE ET PROFESSIONNEL ? 

En 2014, après avoir obtenu un baccalauréat scientifique, j’ai décidé de passer le concours de Sciences Po. Je me rappelle encore de la pression en entrant dans l’immense salle de concours de Villepinte comme si c’était hier. Je pense que cette salle a marqué toute une génération d’étudiants.

J’ai ensuite choisi le campus de Menton afin de mieux comprendre les problématiques du Moyen-Orient bousculé à cette époque par les conséquences du printemps arabe. Bon maintenant je peux l’avouer, la plage et le soleil ne sont pas non plus pour rien dans le choix de ce campus. Mes deux années de Bachelor furent très intenses. J’y ai rencontré des personnes formidables que je côtoie encore aujourd’hui quotidiennement et beaucoup ont d’ailleurs rejoint l’aventure « Graines Populaires ».

Lors de ma seconde année à Menton, j’ai décidé de passer l’examen d’entrée à l’Institut Français du Proche Orient (Ifpo). J’avais comme projet initial d’acquérir un niveau d’arabe suffisant pour passer les concours du Quai d’Orsay comme celui de Cadre d’Orient. Triste de quitter le calme de la ville de Menton mais excité à l’idée de découvrir un nouveau pays, je me suis envolé ainsi pour le Liban en octobre 2016.

Je me suis assez rapidement habitué à Beyrouth, à sa complexité et à sa beauté, mais j’ai aussi découvert un pays très inégalitaire où les services publics étaient inexistants. Les Libanais me semblaient révoltés de la manière dont le pays était géré. Ils critiquaient sans cesse la corruption mais semblaient résignés. Ils disaient n’avoir aucun poids, aucun pouvoir face au système politique communautaire. Au-delà de l’apport universitaire et linguistique, le pays du Cèdre m’a donc profondément politisé. J’ai pris conscience de notre responsabilité individuelle : l’absence d’engagement est finalement une forme d’engagement pour le statu quo. Ne rien faire, c’est cautionner un état de fait. Cette expérience m’a donc encouragé dans ma volonté de m’engager politiquement afin de changer les choses concrètement. 

De retour en France, c’est dans cet esprit que j’ai choisi  de rejoindre le Master politiques publiques de l’Ecole d’Affaires Publiques de Sciences Po. J’ai réalisé ma deuxième année de master en apprentissage dans un cabinet de communication et affaires publiques. Une fois diplômé, j’ai ensuite rejoint un cabinet de conseil, TNP Consultants, pour lequel je travaille actuellement. Mon travail consiste à accompagner le secteur public dans ses projets complexes de transformations digitales ou organisationnelles. Actuellement, je suis en mission à l’Agirc-Arrco, le régime complémentaire obligatoire de retraite pour les salariés du secteur privé. 

POUVEZ-VOUS NOUS EN DIRE PLUS SUR L’INITIATIVE « GRAINES POPULAIRES » ? 

J’ai toujours été assez surpris de voir qu’en France, l’écologie était considérée comme une préoccupation de riche, alors même que les premières victimes des dérèglements écologiques sont les plus démunis et les plus précaires. C’est dans l’objectif de répondre à ce paradoxe que nous avons décidé de lancer cette association. Graines populaires, c’est donc une jeune association que nous avons fondée en août 2020 pour répondre de manière très concrète aux problématiques sociales des citoyens par le biais de l’écologie. L’été dernier, nous étions seulement trois. A peine quatre mois plus tard, et malgré le contexte sanitaire, nous sommes déjà plus d’une centaine de bénévoles présents dans 60 communes en France et 7 pays dans le monde.

Nous avons construit une méthodologie d’atelier avec des spécialistes du Design Thinking qui se déroule en deux temps. Lors de la première partie de l’atelier, nous discutons avec les habitants des problématiques relatives au quartier dans lequel ils vivent. Lors de la seconde partie nous définissons, avec eux, des solutions durables à ces problématiques. Ces solutions deviennent la feuille de route de la section locale de l’association. Elles peuvent être très directes (comme des actions solidaires ou de sensibilisation) ou alors plus politiques et l’association se fait alors le porte-voix des habitants auprès des élus locaux. Cette manière singulière d’aborder l’écologie permet de la rendre plus accessible et plus concrète pour les milliers de citoyens qui la considèrent comme une notion encore trop abstraite. En somme, avec « Graines Populaires » nous semons l’écologie au quotidien.

L’association donne aussi énormément de liberté aux sections locales qui définissent elles-mêmes leur mode d’action. De cette manière nous rendons collectives des initiatives individuelles un peu partout dans le monde. Nous ne sommes pas là pour culpabiliser qui que ce soit, chacun doit réaliser sa transition à son rythme. Finalement, l’engagement chez Graines Populaires se fait à l’échelle de ce que nous pouvons faire au niveau associatif, mais pour changer d’échelle, il faut comprendre que le problème est systémique, qu’il nous dépasse, et que le dernier engagement est donc politique…

VOUS ÊTES ÉGALEMENT ENGAGÉ EN POLITIQUE.

Oui et je pense que c’est un engagement tout à fait complémentaire et nécessaire à l’engagement associatif. C’est par la politique que nous pourrions revoir totalement notre système de production qui déséquilibre les écosystèmes dans lesquels nous vivons ; que nous pourrions relocaliser notre économie et développer une véritable économie circulaire et durable ; que nous pourrions privilégier une économie de la fonctionnalité, où la création de valeur serait dans l’usage d’un bien plutôt que dans la possession de ce dernier. Je pense que c’est par l’engagement politique que nous pouvons le plus fortement influencer ces évolutions. 

Je suis donc adhérent d’Europe Ecologie Les Verts (EELV). C’est le parti avec lequel je suis le plus en phase sur le fond et qui est, à mon sens, le plus à même d’incarner l’héritage de l’écologie politique en France. Je me suis beaucoup engagé dans la dernière campagne municipale à Paris dans le 19ème arrondissement et j’exerce désormais quelques responsabilités en interne. Je suis élu au Bureau Exécutif Départemental (BED) parisien, en charge des mobilisations et des relations extérieures. Je vais également dégager du temps pour prendre part à la campagne des régionales qui vient. Entre le travail, l’association et la politique, mon agenda est donc désormais bien chargé. 

QUELLES ONT ÉTÉ LES CONTRIBUTIONS DE VOTRE FORMATION À L'ÉCOLE D’AFFAIRES PUBLIQUES ENVERS LA FONCTION QUE VOUS OCCUPEZ AUJOURD'HUI ?

Professionnellement, politiquement et au sein de Graines Populaires je suis amené à mener des activités radicalement différentes. L'EAP m'a aidé à être adaptable en toutes circonstances et à mener de front tous ces projets.

J'avoue ne pas avoir à utiliser tous les jours les arrêts du Conseil d'Etat ou les règles de finances publiques mais je pense que ces connaissances fondamentales structurent notre manière d'aborder la chose publique. L'organisation et la rigueur qu'exige Sciences Po sont également des habitudes bien utiles dans la gestion de projet. Au-delà de la formation en tant que telle, ce sont les liens que j'ai tissés avec mes camarades de classe qui ont construit ce que je suis aujourd'hui et qui m'ont tourné vers mes activités actuelles.

EN SAVOIR PLUS