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12.10.2020

Il était une data : 2,5 M de To de données produits quotidiennement. Comment sauver les data d'elles-mêmes ?

Il est des sujets, comme les data, pour lesquels un auteur est censé, dans les cinq premières lignes, indiquer son camp. Est-il pour ou contre ? Est-il pro ou anti ?

Disons-le tout de go, s’il faut choisir, je suis pour, pour les Data ! Je considère comme une nécessité économique, mais aussi citoyenne, d’oser ouvrir les données aux expérimentations, y compris dans des sphères sensibles comme la santé.

Certains diront avec ironie qu’avec 2,5 millions de téraoctets de données produites quotidiennement dans le monde, le choix n’existe plus et que la seule liberté qui nous reste est de rendre les armes face à « l’Armée des nombres » (Libération) ou d’attendre le tsunami face au « data-déluge » (The Economist).

Pourtant, accepter la vague ne signifie pas rester passif devant son déferlement. Et derrière le « pour ou contre », se cache une question plus essentielle : quelle place pour les data souhaitons-nous dans nos vies ? Voulons-nous dompter la vague ou nous y noyer ? Sommes-nous prêts à subir aveuglément les data ou préférons-nous attendre sereinement leur avènement ? Accepterons-nous une vision brute et brutale des data ou parviendrons-nous à les raffiner pour en faire notre nouveau carburant économique, l’or noir du XXIe siècle comme d’aucuns le prédisent ?

Il est des sujets vastes et complexes dont on s’attend à ce qu’avant d’être analysés, ils soient fragmentés ou concassés « en autant de parcelles qu'il se pourrait, et qu'il serait requis pour les mieux résoudre », comme dit Descartes. 

Je choisis une autre voie, en proposant ici un regard qui englobe l’ensemble des aspects des data : bio, smart, big, small, de nature publique, issues du quantified self, des sondages d’opinion, de DMP (Data Management Platform) ou d’objets connectés…

Bien que les data soient des objets polymorphes, on peut en effet les appréhender globalement quand il s’agit d’aborder leur dimension éthique. C’est même une obligation si l’on veut conduire une réflexion de portée générale sur les normes et les principes qui gouvernent leur utilisation. Dégager des règles communes, au-delà des usages particuliers, nous permettra d’améliorer nos pratiques à cet égard.

Les évangélistes des data sont souvent gorgés de certitudes. Le sujet me semble-t-il soulève surtout des interrogations. Il y a urgence à sortir des idées convenues en la matière : à défaut, le citoyen et le consommateur pourraient n’avoir d’autre alternative que de choisir entre des data opaques et toutes-puissantes ou des croyances fondées sur les seules émotions.

En 2016, l’adjectif post-truth entrait dans le dictionnaire d’Oxford comme mot de l’année. En français, on qualifie de « post-vérité » les situations où « les faits objectifs ont moins d’influence sur la formation de l’opinion que l’appel aux émotions et aux croyances personnelles » (Le Monde). Le phénomène ne date certes pas d’aujourd’hui, mais le Brexit, l’élection présidentielle américaine, les scrutins italiens et autrichiens et certains épisodes hexagonaux donnent à la « post-vérité » une résonance amplifiée et questionne sur l’usage des données pour objectiver la réalité. La vérité ne serait-elle plus qu’une opinion parmi les autres ?

Se pencher sur la déontologie des data, c’est les sauver d’elles-mêmes et de leurs dérives. Des données plus sincères, plus transparentes, plus acceptables seront plus acceptées.

Ma proposition, créer une nouvelle discipline, la « datadéontologie » à la croisée de la statistique et de l’éthique et un nouveau métier, le « datadéontologue ». Espérons que la France formera bientôt un datadéontologue pour cinquante data scientists, cela suffira !

 

Assaël Adary

Président du cabinet d’Occurrence
Co-auteur du Communicator 7, 8 et 9
Administrateur de Com-Ent
Intervenant au sein de l’Executive Master Communication et du Certificat Data Protection Officer
Président des Alumni CELSA Sorbonne Université
 

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