Audrey Harroche

Audrey Harroche

Doctor of Sociology
16 november 2021
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Le 16 novembre, Audrey Harroche a soutenu une thèse de sociologie à Sciences Po qui s'intitule : 

Gouverner par les inégalités, la mise en œuvre d’une initiative d’excellence dans l’enseignement supérieur et la recherche. 

Composition du jury :

M. Jérôme Aust, Chargé de recherche Sciences Po, CSO

M. François Dubet, Professeur émérite de sociologie à l’Université de Bordeaux

Mme Gaële Goastellec, Maître d’enseignement et de recherche HDR à l’Université de Lausanne, Institut des sciences sociales (rapporteur)

M. Patrick Hassenteufel, Professeur des universités en science politique, Université Paris-Saclay (UVSQ), laboratoire PRINTEMPS (rapporteur)

Mme Christine Musselin, Directrice de recherche, CNRS, CSO

Mme Kathia Serrano-Velarde, Professeure des universités, Université d’Heidelberg,Max-Weber-Institute of Sociology.

Résumé

Tandis que la reproduction et l’accroissement des inégalités sont souvent considérés comme des effets pervers des institutions publiques, de nombreuses réformes dites néomanagériales visent aujourd’hui à gouverner le secteur public en créant, creusant, ou prenant appui sur des inégalités parmi les professionnels, les organisations, ou les usagers. L’enseignement supérieur et la recherche figurent parmi les secteurs à l’avant-garde de ces recompositions de l’action publique. En France, le lancement de la politique des Initiatives d’excellence (Idex) en est une illustration emblématique : en recourant à des appels à projets mettant en compétition les universités pour faire émerger des établissements « de classe mondiale », ce programme concentre les ressources sur une dizaine d’établissements et accroit la mise en concurrence des chercheurs, des laboratoires et des établissements. En recourant à l’analyse longitudinale d’une Idex, cette thèse prend pour objet ces nouvelles politiques inégalitaires, interroge les conditions sociales et politiques de leur mise en œuvre et prend la mesure des inégalités créées à l’échelle d’un site universitaire.

Nous démontrons ainsi qu’à travers les Idex, l’État gouverne par les inégalités. Cependant, ce gouvernement n’est possible qu’à certaines conditions mettant fortement à contribution les dynamiques et les acteurs locaux. Nous avons également montré que cette politique repose sur une réforme organisationnelle, dans le sens où l’administration d’une Idex revient essentiellement à mettre en place des règles, des procédures, des structures afin de rendre les universités plus inégalitaires. Plus précisément, les inégalités étudiées ne résultent pas seulement du fonctionnement des organisations, mais s’appuient sur un travail organisationnel qui vise, tout à la fois, à les produire et à les légitimer. Sur le site, cela a abouti à une mise en organisation partielle de l’université visant à tracer des lignes d’inclusion et d’exclusion parmi la communauté académique. Les lauréats faisant partie des projets d’excellence bénéficient alors de ressources supplémentaires et de traitements privilégiés, ceci de façon durable. Ainsi, les professionnels favorisés par cette politique n’éprouvent pas les effets délétères décrits par beaucoup de travaux sur les réformes néomanagériales, et voient s’accroître leurs marges d’autonomie. En effet, cette politique gouverne davantage les contours des projets d’excellence que les conduites des chercheurs à l’intérieur de ces derniers. En définitive, les Idex gouvernent des périmètres, et c’est à l’intérieur et entre ces derniers que les inégalités se jouent.

Mots-clés :
Initiatives d’excellence, politiques d’excellence, inégalités, instruments d’action publique, enseignement supérieur et recherche, inégalités de genre, élites, organisations.

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