Entretien avec Marie-Emmanuelle Chessel, nouvelle chercheuse au CSO

« Je veux continuer à apprendre ! »

Vous êtes historienne et spécialiste de l’histoire économique et sociale de la France contemporaine. Vous rejoignez le CSO en tant que directrice de recherche CNRS. Quelles sont les motivations d'une historienne pour rejoindre un laboratoire de sociologie ?

Je veux continuer à apprendre ! Il me semble passionnant de rejoindre des chercheuses et des chercheurs de qualité qui travaillent, avec leurs méthodes, sur des objets de recherche proches des miens – la consommation, les milieux d’affaires, les « réformateurs », etc. J’avais envie de pouvoir continuer à me former et à progresser en les côtoyant au quotidien. Et les liens intellectuels entre historiens et sociologues sont anciens.

Vous êtes une des pionnières en France de l’histoire de la société de consommation. Quelles sont vos constatations ?

L’histoire de la consommation a beaucoup évolué depuis les années 1980. Elle s’est enrichie et complexifiée. De nouveaux espaces et de nouvelles périodes ont été explorés ; on s’est intéressé aux circulations internationales. Après une grande vague de travaux sur les rapports entre les consommateurs et le politique, de plus en plus de chercheurs étudient les pratiques quotidiennes des consommateurs-usagers. Leurs recherches sont nourries d'histoire des techniques mais aussi de sociologie ou d’anthropologie. Les historiens sont aussi confrontés à des questionnements contemporains, concernant par exemple la consommation collaborative ou les coûts sociaux de la consommation. Il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine !

Vous travaillez aussi sur l’histoire des milieux patronaux dans leurs rapports avec la société, à travers un projet récent sur l'histoire du Centre français du patronat chrétien. Quelle est la finalité de cette recherche ?

Cette recherche, lancée avec plusieurs collègues de l’EHESS, est née de la rencontre entre une demande sociale - celle des Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens, Les EDC, qui ont succédé au CFPC et souhaitent connaître leur histoire - et un intérêt de recherche. Pour nous, il s’agit de mieux comprendre les relations entre religion et économie, et de revisiter le rôle des patrons chrétiens dans la « réforme » de l’économie au XXe siècle. La question de l’éthique au sein des entreprises et dans leurs rapports avec les clients ou avec l'environnement est ici centrale.

Vous avez reçu la médaille d'argent du CNRS en 2014. Qu'avez-vous ressenti ?

Cette médaille est la reconnaissance par mes pairs d’un travail individuel fourni pendant plusieurs années, et cela m’a donc fait évidemment plaisir ! Mais je dois surtout cette récompense aux différents environnements très stimulants dans lesquels j’ai été formée et où j’ai effectué mes recherches. Ma venue au CSO s’inscrit dans une véritable continuité à cet égard : il s’agit d’un nouveau collectif stimulant et attirant.

Quels sont vos projets à venir ?

Je souhaite tout d’abord terminer mes recherches en cours sur l’histoire du patronat chrétien, qui doivent donner lieu à publication. Sciences Po offre en outre aux chercheurs l’opportunité d’enseigner, et je voudrais aussi tenter cette expérience en collaborant avec le département d’histoire. En matière de recherche ou d’enseignement, j’ai hâte de démarrer de nouvelles collaborations !

Entretien réalisé le 10 septembre 2015

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