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Baromètre "Priorités françaises" L'ObSoCo / CEVIPOF
Le baromètre des préoccupations majeures des Français.

L'ObSoCo (Observatoire Société et Consommation)et Sylvain Brouard, directeur de recherche au CEVIPOF, lancent en décembre 2025 « Priorités françaises », le premier baromètre trimestriel public conçu pour mesurer la hiérarchie réelle et spontanée des préoccupations des Français à travers une méthodologie de questionnement ouvert. Ce dispositif renoue avec la méthodologie du "Most Important Problem" (MIP), éprouvée internationalement et poursuit le suivi initié par le “baromètre des priorités politiques”(2014-2020). Cette approche permet de capter la voix citoyenne dans sa spontanéité, sans liste prédéfinie ni suggestion ou cadrage.
L’ObSoCo et le CEVIPOF reprennent cette méthodologie et vont, chaque trimestre, interroger 2000 personnes, les archives du CEVIPOF offrant au dispositif une profondeur historique précieuse.
Une enquête menée par Sylvain Brouard (directeur de recherche au CEVIPOF), avec Guénaëlle Gault (directrice Générale de L'ObSoCo) et Sébastien Boulonne (chef de projet à L'ObSoCo).
Vague 1 (décembre 2025)
Un phénomène inédit : la vie politique au sommet des
préoccupations
La première vague révèle un bouleversement majeur dans l'agenda citoyen traditionnellement dominé par les questions économiques et sociales. Pour la première fois dans l'histoire récente des enquêtes d'opinion en France, la vie politique apparaît comme la préoccupation principale des Français, citée spontanément par 30% des répondants. Cette thématique a toujours été présente dans les esprits mais jamais à ce niveau. Elle devance ainsi l'inflation et le pouvoir d'achat (thème cité par 27% des enquêtés), la justice et criminalité (24%), le budget et la dette nationale (21%) et l’immigration (20%). Notre étude s'inscrit, certes, dans une séquence d'instabilité gouvernementale sans précédent sous la Ve République.
Mais au regard de l'analyse qualitative approfondie des près de 4 000 verbatims recueillis, cette conjoncture exceptionnelle semble agir comme un révélateur chimique, rendant visibles des fractures structurelles qui travaillent en profondeur la démocratie française et met au jour une crise de légitimité qui opère simultanément à trois niveaux :
- Délégitimation personnelle du chef de l'État, avec une violence symbolique exceptionnelle
- Remise en cause institutionnelle : questionnement de l'architecture et/ou du fonctionnement des institutions voire de la Ve République
- Rejet de classe politique : perception de l'ensemble des acteurs politiques comme une élite déconnectée et prédatrice
Les expressions récurrentes – « un président qui n'écoute pas son peuple », « les politiques ne pensent qu'à eux », « dictature », « le système est à bout de souffle » – dessinent les contours d'une défiance qui ne se contente plus d'évaluer l'action publique sur ses résultats, mais interroge la légitimité même du système politique.
La politique est censée être l'activité de résolution des problèmes collectifs. Quand elle devient elle-même le problème principal, c'est toute la rationalité démocratique qui s'inverse.
15 ans de recomposition profonde de l'agenda citoyen
Pour ce lancement, le baromètre « Priorités françaises » propose également une analyse comparative inédite sur trois points de mesure : octobre 2015, septembre 2020 et septembre 2025. Ces trois dates, toutes situées trois ans après une élection présidentielle, permettent d'observer les transformations structurelles de l'opinion publique française sur 15 ans, au-delà des simples effets conjoncturels.
Cette perspective historique révèle une recomposition radicale de l'agenda citoyen : La vie politique et l'éthique gouvernementale enregistrent, nous le disions, la progression la plus spectaculaire : de 13% en 2015 à 7% en 2020 (effacement temporaire sous l'effet de la pandémie), puis bond à 30% en 2025 – soit +17 points par rapport à 2015 et +23 points par rapport à 2020.
Le chômage, préoccupation hégémonique en 2015 avec 65% des répondants, chute de 58 points pour atteindre « seulement » 7% en 2025 (après un premier décrochage à 21% en 2020)
L'inflation et le pouvoir d'achat connaissent une trajectoire inverse : après avoir quasi disparu en 2020 (3%), cette préoccupation bondit de 24 points pour atteindre 27% en 2025, soit 16 points de plus qu'en 2015 (11%)
La justice et la criminalité progressent régulièrement sur toute la période : +12 points entre 2015 (12%) et 2025 (24%), passant par 17% en 2020
Le budget et la dette nationale enregistrent une hausse spectaculaire de 14 points (7% en 2015, 21% en 2025), après un creux à 2% en 2020
L'immigration maintient un niveau élevé malgré des fluctuations importantes : 26% en 2015, 10% en 2020, 20% en 2025
À l'inverse, les enjeux environnementaux (climat et environnement général), bien qu'en hausse depuis 2015, ne représentent que 7% des préoccupations spontanées, révélant un décalage préoccupant entre l'urgence objective et la hiérarchie subjective des priorités.
Une analyse approfondie de la vague 2025 : la position politique et la situation économique comme principaux facteurs de différenciation
Au-delà de cette mise en perspective historique, le baromètre analyse aussi en profondeur la dernière vague pour identifier les facteurs qui structurent les préoccupations françaises. Cette analyse révèle que la position politique constitue le facteur explicatif majeur des divergences de préoccupations, avec des écarts pouvant atteindre 55 points. Cette polarisation idéologique structure profondément la perception des enjeux nationaux :
Sur l'immigration, le clivage est massif : 60% des personnes se situant très à droite citent spontanément ce sujet parmi leurs deux préoccupations principales, contre seulement 5% pour celles se situant très à gauche ou à gauche (écart de 55 points).
La justice et la criminalité mobilisent davantage la droite (36%) que les personnes proches des mouvements écologistes (12%), soit 24 points d'écart.
À l'inverse, l'environnement structure un clivage inverse : 18% chez les proches des mouvements écologistes contre 0% à l'extrême droite (18 points d'écart).
Le budget et la dette nationale opposent également droite (30%) et gauche/extrême gauche (13%), avec 17 points d'écart, tandis que la politique sociale trouve plus d'écho à gauche (19%) qu'à l'extrême droite (6%), soit 13 points d'écart.
La contrainte économique, second facteur explicatif majeur, exerce un effet particulièrement prononcé sur les préoccupations matérielles. L'inflation et les prix constituent une préoccupation majeure pour 42% des personnes déclarant ne pas s'en sortir financièrement, contre 13% de celles vivant confortablement – soit 29 points d'écart. Cette différence substantielle reflète des réalités économiques quotidiennes très contrastées.
Un diagnostic en trois dimensions
Les trois notes d'analyse du baromètre « Priorités françaises » offrent un diagnostic inédit de l'état de l'opinion publique française.
- Note 1 : Quinze ans de préoccupations française, une recomposition profonde de l'agenda citoyen (2015-2020-2025)
- Note 2 : Analyse des préoccupations des Français selon leurs caractéristiques sociodémographiques et politiques
- Note 3 : La Crise de légitimité du système politique français :analyse des représentations citoyennes d'une défaillance démocratique
Méthodologie
Questionnement ouvert
La question centrale – « Quel est selon vous le problème LE PLUS IMPORTANT auquel le pays est confronté aujourd'hui ? » – est posée en premier, avant toute autre question d'opinion, sans liste
prédéfinie ni suggestion. Cette approche permet l'émergence spontanée des priorités citoyennes,
exprimées avec les propres mots des répondants. Près de 4 000 verbatims ont été recueillis pour
cette première vague.
Échantillon et collecte Le baromètre « Priorités françaises » repose sur une enquête réalisée du 17 au 29 septembre 2025 auprès de 2 000 personnes représentatives de la population française métropolitaine âgée de 18 ans et plus.
Codage et analyse : Les réponses ouvertes ont été recodées selon une grille de classification adaptée du système de codage des politiques publiques du Policy Agendas Project, comprenant 27 domaines principaux subdivisés en plus de 250 sous-domaines spécifiques. Le codage privilégie le contenu substantiel (policy content) plutôt que l'instrument politique ou le cadrage utilisé.
Mesure des préoccupations
Les pourcentages présentés correspondent à la proportion d'individus ayant spontanément évoqué
chaque préoccupation en première OU en seconde position. Cette mesure offre une vision plus
complète que la seule première préoccupation, tout en hiérarchisant les priorités.
Profondeur temporelle
L'analyse comparative mobilise trois vagues : octobre 2015 (1 506 répondants), septembre 2020 (2
006 répondants) et septembre 2025 (2 000 répondants), issues des archives du CEVIPOF et du
nouveau dispositif L'ObSoCo-CEVIPOF.
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