Accueil>"Fractures françaises" : une 13ᵉ édition marquée par la défiance et le pessimisme

20.10.2025

"Fractures françaises" : une 13ᵉ édition marquée par la défiance et le pessimisme

La nouvelle vague de l’enquête annuelle Fractures françaises, menée par Ipsos pour le Cevipof, Le Monde, la Fondation Jean-Jaurès, et l’Institut Montaigne, dresse le portrait d’une société française en état de nervosité démocratique. Si les Français expriment un fort attachement à la démocratie, ils manifestent dans le même temps une défiance record à l’égard de leurs dirigeants et du fonctionnement des institutions politiques.

L’année 2025, marquée par une crise gouvernementale et la démission du Premier ministre, a accentué ce climat : la confiance dans l’Assemblée nationale et la présidence de la République chute de plusieurs points, tout comme celle envers les partis politiques. Seuls les maires, l’armée et les PME conservent un niveau de confiance élevé.

Un pays inquiet et en colère

Le sentiment d’un déclin français atteint un niveau record : plus de huit Français sur dix estiment que le pays est en déclin, même si une majorité juge que ce déclin n’est pas irréversible. Parallèlement, 43 % des Français se disent “en colère et contestataires”, un taux en forte progression depuis 2021. Ce sentiment est particulièrement marqué chez les jeunes, les classes populaires et les sympathisants du Rassemblement national et de La France insoumise.

Les préoccupations quotidiennes restent dominées par le pouvoir d’achat, loin devant la sécurité, l’immigration ou l’environnement. Plus d’un Français sur deux déclare avoir des difficultés à “joindre les deux bouts”, et près de quatre sur dix pensent que leur situation sociale va se dégrader dans les années à venir.

Une défiance qui traverse toute la société

La méfiance interpersonnelle reste massive : près de huit Français sur dix estiment qu’“on n’est jamais assez prudent quand on a affaire aux autres”. Ce climat de défiance touche également la politique : seuls 10 % déclarent avoir confiance dans les partis, et 20 % dans les députés. En revanche, la confiance envers les scientifiques, l’école et les petites entreprises demeure forte, traduisant un attachement à des institutions perçues comme plus proches ou plus crédibles.

Violence, autorité et fractures sociales

La perception d’une violence en hausse est quasi unanime (près de 9 Français sur 10). Si la majorité condamne son usage, une minorité croissante — notamment parmi les jeunes et les électeurs des partis radicaux — juge qu’elle peut parfois se justifier pour défendre ses intérêts.

Cette crispation s’accompagne d’une fracture générationnelle et sociale persistante : les catégories populaires et les habitants des grandes agglomérations se sentent particulièrement marginalisés et peu respectés dans la société.

Un baromètre essentiel pour comprendre la France d’aujourd’hui

En scrutant depuis plus de dix ans l’état d’esprit des Français, Fractures françaises reste un outil unique pour saisir les tensions, attentes et recompositions profondes qui traversent la société.
Cette 13ᵉ édition confirme que la crise de confiance est désormais structurelle, mais aussi que les ressorts d’attachement démocratique et civique demeurent vivants — une dualité qui continue de façonner le paysage politique et social français.

 

Légende de l'image de couverture : Sciences Po