Accéder au contenu principal
Hong Kong

Décryptage: «Le mouvement hongkongais participe d’une conjoncture mondiale»

Le mécontentement explose à Hong Kong, mais pas seulement. Du Chili à la Bolivie, de l'Iraq à l'Iran en passant par la Colombie, le Liban et Haïti, des mouvements de contestation se répètent et se ressemblent. Laurent Gayer, spécialiste des conflits urbains et de l'Asie du Sud, chargé de recherche CNRS au CERI Sciences Po, répond aux questions de Stéphane Lagarde, envoyé spécial de RFI à Hong Kong.

Des slogans de soutien aux manifestations à Hong Kong sur les murs d'une succursale parisienne de la Bank of China, lors de l'acte 54 des «gilets jaunes», samedi 16 novembre 2019.
Des slogans de soutien aux manifestations à Hong Kong sur les murs d'une succursale parisienne de la Bank of China, lors de l'acte 54 des «gilets jaunes», samedi 16 novembre 2019. Philippe LOPEZ / AFP
Publicité

RFI : À Hong Kong, la mobilisation est très organisée, presque tout le monde est à sa tâche pour transporter vers l’avant des lignes de front des matériels, des barricades ou même des armes. D’où viennent ces techniques militantes ?

Laurent Gayer : Comme toujours, certains insistent sur le caractère organique, décentralisé, voire désorganisé de ce mouvement acéphale, sans leader. Néanmoins, il y a quand même une expérience précédente, car il n’y a jamais de mobilisation spontanée. Il y a une histoire contestataire extrêmement riche, fertile à Hong Kong. C’est des décennies de mobilisation, de savoir-faire, d’habitus militant qui sont cristallisés, particulièrement autour du mouvement d’Occupy Central, la fameuse révolution des parapluies. Ce qui est différent avec ce mouvement, c’est sa dimension militante, violente, dans une détermination à changer l’ordre des choses. Et je crois que l’on a passé un cap avec PolyU où la population, en dépit de la violence des évènements, s’est solidarisée autour des occupants.

Est-ce qu’on a des exemples de ces transferts de techniques et de méthodes de manifestations, d’un pays à un autre ?

On parle beaucoup de l'innovation tactique de ce mouvement et c’est effectivement ça qui se mondialise, ces fameuses tactiques d’extinction, de lacrymogène, d’utilisation des lasers, des choses comme ça. On voit une circulation des tactiques, le fameux cône de circulation devenu désormais iconique, qui est fétichisé par les Hongkongais eux-mêmes, qui s’est répandu, qui a inspiré les Chiliens avec des messages sur Twitter notamment, des vidéos, des messages qui circulent de remerciements hongkongais pour les nouvelles innovations tactiques. Récemment, on a vu des utilisations de lasers par des protestataires pour affoler et faire tomber des drones au Chili. Donc, on voit toutes ces tactiques qui circulent. Il y a probablement de l’émulation sans connexion forcément, les vidéos circulent sur internet. On a vu des forums où les activistes de Hong Kong, Barcelone et Santiago se concertent, échangent des recettes de mobilisation, de protestation et de subversion.

Est-ce que le modèle hongkongais inspire au Chili ou ailleurs ?

Il inspire, mais les circulations sont toujours à double sens. Je pense qu’il y a une conjoncture insurrectionnelle mondiale. Je pense que l’on n’est plus dans des logiques de manifestations, de protestations. On est réellement dans une extension mondiale du domaine de la lutte, sous une forme parfois explicitement insurrectionnelle. Et en ça, le mouvement hongkongais participe d’une conjoncture mondiale. Occupy Central déjà à l’époque s’inscrivait dans un mouvement général d’occupation des territoires et d’espaces libérés de la pression de l’État, de l’oppression capitaliste, des zones à défendre comme en France avec les ZAD, Podemos en Espagne. Je crois que l’on voit une nouvelle étape de cette conjoncture protestataire mondiale.

►À écouter : Étudiants retranchés à PolyU: «La stratégie est de laisser pourrir la situation»

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Partager :
Page non trouvée

Le contenu auquel vous tentez d'accéder n'existe pas ou n'est plus disponible.