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21 juillet 2015

Sciences Po | Ceri - CNRS  
     
 

Édito

  Nucléaire iranien : "accord historique" ou "erreur historique" ?  
     
 

Par Samy Cohen


L’accord nucléaire conclu à Vienne le 14 juillet entre l’Iran et les puissances P5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) ne résout aucun des défis qui se posaient aux adversaires de la nucléarisation militaire de la République islamique. Contrairement à l’Afrique du Sud, qui a décidé, en 1990, d’abandonner son programme militaire, l’Iran n’a pas renoncé à ses ambitions de devenir un jour une puissance nucléaire militaire. Il n’y a pas de quoi pavoiser. La menace demeure.

En revanche, elle s’éloigne de dix à quinze ans. Les capacités nucléaires de l’Iran se trouvent bridées par un ensemble de contraintes et de moyens de surveillance permettant de repousser la menace et de garantir au groupe P5+1 la possibilité de réagir au plus vite si jamais les autorités iraniennes décidaient de fabriquer la bombe atomique. Ainsi le breakout, le temps nécessaire pour que l’Iran puisse produire suffisamment d’uranium enrichi pour atteindre un tel objectif, est désormais de douze mois, au lieu de deux aujourd’hui, et cela pendant une période de 10 ans. L’accord de Vienne plafonne le nombre de centrifugeuses enrichissant l’uranium. Il prévoit que pendant les quinze prochaines années, l’Iran ne pourra produire de l’uranium enrichi qu’à 3,67%. Le stock d’uranium enrichi au-delà de ce niveau devra être expédié hors du pays ou dilué. Le fonctionnement de la centrale d’Arak à eau lourde devra être modifié, sous le contrôle du P5+1 et de l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), de manière à ne pouvoir produire du plutonium à caractère militaire. Cette dernière pourra vérifier pendant vingt ans le parc des centrifugeuses. L’accès aux sites militaires sera possible "si nécessaire et sous certaines conditions" et au terme d’un "dialogue entre le P5+1 et l’Iran". Cette formulation laisse à Téhéran la liberté de décider de ce qui est "nécessaire".

En cas de non-respect par l’Iran de ses engagements, un mécanisme appelé Snap Back prévoit un retour automatique des sanctions. Valable pendant dix ans, il pourrait être prorogé de cinq années en vertu d’un engagement pris par les cinq membres permanents du Conseil de sécurité. Les sanctions relatives à la fourniture de missiles balistiques demeurent en vigueur pendant huit ans et celles visant les armes lourdes pendant cinq ans. Les puissances P5+1 qui n’ont obtenu qu’un sursis, misent sur une normalisation progressive des relations américano-iraniennes et sur la force de la société civile iranienne qu’elles estiment capable de peser pour éviter un retour aux sanctions internationales. L’accord ne met pas un terme aux nombreux sujets de désaccords portant sur la Syrie, le Liban et le Yémen.

L’Iran obtient par cet accord la levée (graduelle) des sanctions visant les secteurs de la finance, de l’énergie et du transport dès la mise en œuvre de ses engagements attestés par un rapport de l’AIEA. Ce compromis est une victoire pour Téhéran ; il permet au régime en place de "relégitimer" son pouvoir auprès de la population, tout en préservant ses capacités d’enrichissement d’uranium à des fins civiles. Que se passera-t-il à l’expiration de l’accord ? L’Iran reprendra-t-il son programme militaire ? Si tel était le cas, la détermination des puissances opposantes serait-elle toujours aussi forte ? Bien malin celui qui pourrait répondre à ces questions à l’heure actuelle. Toutes les options sont ouvertes.
Selon Israël et les monarchies sunnites du Golfe, l’accord de Vienne donnera à l’Iran une puissance financière substantielle pour développer ses activités subversives au Proche-Orient et ne l’empêchera pas de se doter à terme de la bombe. A ces affirmations, les Américains répondent que les opposants à l’accord ne proposent aucune voie alternative réaliste. L’accord de Vienne n’est pas cette "erreur historique" dénoncée par le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou. Jérusalem voit s’éloigner pour dix ans la menace – peu crédible – d’une attaque nucléaire iranienne. Les Iraniens savent qu’Israël dispose d’une capacité de "seconde frappe" qui pourrait renvoyer leur pays à l’âge de pierre si celui-ci se décidait à attaquer l’Etat hébreu. Jérusalem conserve donc pour encore dix ans, et peut être plus, le monopole de l’armement atomique au Proche-Orient, ce qui n’empêchera pas Benyamin Netanyahou de poursuivre sa croisade contre l’accord. Le Congrès américain, largement hostile à l’accord de Vienne, dispose de deux mois pour se prononcer sur la levée des sanctions. Un vote hostile se heurtera inévitablement au veto présidentiel qui peut être contrecarré par le Sénat et la Chambre des représentants, qui dans ce cas doit réunir une majorité qualifiée des deux tiers, une éventualité peu probable. De toutes les façons, un vote hostile à Barack Obama ne concernerait que les sanctions américaines, pas celles votées par les Nations unies ou par l’Union européenne.

Reste le risque de prolifération nucléaire au Proche-Orient. Les partisans de l’accord affirment que sans lui, l’Iran se serait nucléarisé dans un très proche avenir, entraînant des appétits semblables chez l’Egypte, l’Arabie Saoudite ou encore la Turquie. Ses adversaires font valoir que cet accord, qui ne donne pas de coup d’arrêt au programme militaire iranien, va inévitablement pousser ces pays vers une course à l’armement nucléaire. Accord ou pas, les risques sont bien réels. L’avenir dépendra en grande partie de la capacité des Etats-Unis à garantir la sécurité de ces pays, mais aussi de l’évolution du rapport de l’Iran au monde.

 
 

 

VIENT DE PARAÎTRE

         
   

Le CERI sur SPIRE, l’archive ouverte de Sciences Po

Près de 2500 références - ouvrages et chapitres d'ouvrages collectifs, articles de revues à comité de lecture, y compris les plus récents - émanant des chercheurs et doctorants du CERI sont accessibles en ligne sur SPIRE, le système d'archives ouvertes de Sciences Po.

 
         
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Françoise Mengin, Fragments of an Unfinished War. Taiwanese Entrepreneurs and the Partition of China

Hurst/OUP, collection "Comparative Politics and International Studies" (CERI Sciences Po), 2015,  352 p.

 
         
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Jean-Pierre Filiu, From Deep State to Islamic State. The Arab Counter-Revolution and its Jihadi Legacy

Hurst/OUP, collection "Comparative Politics and International Studies" (CERI Sciences Po), 2015, 328 p.

 
         
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Hélène Dieck, The Influence of Public Opinion on Post-cold War US Military Interventions

Palgrave Macmillan, 2015, 272 p.

 

COUP D'ŒIL

  Les collections d'ouvrages du CERI en anglais  
     
 

Depuis le début de l’année, pas moins de sept ouvrages sont parus dans les deux collections en langue anglaise du CERI, "International Relations and Political Economy" aux éditions Palgrave Macmillan, et "Comparative Politics and International Studies" co-publiée par Hurst & Co et Oxford University Press.

Cette riche moisson confirme le fort intérêt des maisons d’édition partenaires pour la diversité des domaines de spécialisation des chercheurs et la qualité de leurs travaux, qualité confirmée par la sélection rigoureuse des manuscrits proposés et les règles de la double évaluation anonyme à laquelle obéissent ces collections.

Elle démontre également la complémentarité des deux collections qui reflète la double vocation du projet scientifique du CERI : l’étude de l’espace mondial, d'un côté par les relations internationales – privilégiées par la première collection –, de l'autre côté par les aires régionales – mises en avant par la seconde collection. Des thèmes relevant des enjeux de sécurité, des risques internationaux et de l’économie internationale sont ainsi abordés dans les trois ouvrages publiés en 2015 par Palgrave : Governing Disasters. Beyond Risk Culture, dirigé par Sandrine Revet et Julien Langumier, Origins and Evolution of the US Rebalance toward Asia. Diplomatic, Military, and Economic Dimensions, coordonné par Hugo Meijer et The Bureaucratization of the World in the Neoliberal Era. An International and Comparative Perspective, de Béatrice Hibou. Chez Hurst, l’éventail des sujets traités est encore plus large, en miroir de l’expertise du CERI dans le domaine des études régionales, avec les parutions des monographies de Christophe Jaffrelot, The Pakistan Paradox. Instability and Resilience, Jean-Louis Rocca, A Sociology of Modern China, Jean-Pierre Filiu, From Deep State to Islamic State. The Arab Counter-Revolution and its Jihadi Legacy et Françoise Mengin, Fragments of an Unfinished War. Taiwanese Entrepreneurs and the Partition of China.

Ces ouvrages sont issus aussi bien du travail individuel des chercheurs, de l’activité des groupes de recherche du CERI que des colloques qui y ont été organisés. Sur les sept dernières parutions, deux sont des titres originaux rédigés directement en anglais et cinq, des traductions d’ouvrages parus initialement en France. Il convient de remercier ici la Direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS) du ministère de la Défense qui, depuis plusieurs années, soutient cet effort de traduction et encourage ainsi le rayonnement à l’international de nos productions scientifiques.

BRÈVES

  Appel à contributions  
     
 

Sounds and Voices on the International Stage: Understanding Musical Diplomacies. Colloque international organisé conjointement par le CERI Sciences Po et le CERLIS Sorbonne Nouvelle-Paris 3-CNRS-Paris Descartes.

Comité scientifique : Frédéric Ramel, Cécile Prévost-Thomas, Christian Lequesne. Consulter l'appel à contributions.

  Séminaire conjoint CERI-King's College-Institut Norvégien pour les Etudes de Défense  
     
 

Le 7 septembre prochain aura lieu à Londres le séminaire organisé conjointement par le CERI, King’s College et l'Institut Norvégien pour les Etudes de Défense sur le thème : "The Reconfiguration of American Primacy in World Politics: Domestic and International Challenges". Voir le programme détaillé sur notre site.

  Soutenances de thèse  
     
 

- Frédéric Coste, Homo islamicus : la réinvention d'une économie et d'une finance islamiques (1940-2014), sous la direction de Luis Martinez (25 juin 2015)

- Marie Bassi, Mobilisations collectives et recomposition de l’action publique autour de l’enjeu migratoire en Sicile (1986-2012), sous la direction de Catherine Wihtol de Wenden (2 juillet 2015)

ÉVÉNEMENTS

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Thailand: The Political Economy of the Middle-Income Trap

Débat.
3 septembre 2015, 17h-19h

 
 

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Why discrimination still persists in India today? Caste and socio-economic inequality

Débat.
11 septembre 2015, 15h-19h (horaire provisoire)

 
 

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Refugees and Asylum Seekers in the Middle East

Séminaire de recherche.
24 septembre 2015, 9h-18h

 
 

 
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Le Fonds Monétaire International et la crise des dettes souveraines

Séminaire de recherche.
24 septembre 2015, 17h-18h45

 
 

 
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Cuba après le rétablissement des relations diplomatiques avec les Etats-Unis

Séminaire de recherche.
24 septembre 2015, 17h30-19h30

 
 

 
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Can we compare the 'color revolutions' and the Arab springs?

Colloque.
25 septembre 2015, 9h-18h

 
 

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Les indicateurs de corruption à l’épreuve

Séminaire de recherche.
28 septembre 2015, 12h30-14h30

 
 

 

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