Début 2017, les enseignants de Sciences Po ont été invités à répondre à un questionnaire portant sur l’usage qu’ils font des images lors de leurs enseignements. Les réponses révèlent que les images sont largement utilisées dans les supports de cours. Cet usage massif souligne la nécessité de faire des images des objets d’analyse en soi. Pourtant, et de façon intéressante, les réponses à l’enquête soulignent qu’une telle formation critique est encore trop peu voire pas du tout dispensée aux étudiants. Ces résultats plaident en faveur d’une meilleure inclusion de l’analyse des médias dans les programmes.
L’usage de différents médias dans un contexte pédagogique pour faciliter la mémorisation et la compréhension d’informations est ancien. Et il est généralement accepté que l’association texte-image peut notablement améliorer l’apprentissage.
La création et l’utilisation de supports qui intègrent textes, images et musique sont largement répandues dans l’enseignement, en partie grâce à la facilitation que les Environnements de Travail Numérique (ENT) ont apporté aux communautés enseignantes. Si bien qu’aujourd’hui une très vaste majorité de professeurs tire parti du multimédia pour accompagner étudiants et élèves dans l’acquisition des savoirs, savoir-faire et savoir-être de demain.
En France, l’utilisation de médias (images fixes, arts visuels, vidéos, livres, périodiques, musique) par les communautés enseignantes se situe dans le cadre légal de l’exception pédagogique (mise à jour du 26/09/2016, pour quatre années).
Cette exception s’applique à la présentation de documents pédagogiques en présentiel, à la diffusion numérique de documents pédagogiques pour les apprenants via les ENT, à la mise en oeuvre des sujets d’examens ou de concours ainsi qu’à l’utilisation de documents pour des actes d’enseignement, de formation des enseignants-chercheurs ou des activités de recherche.
Le tableau ci-dessous propose un résumé des conditions d’application de l’exception pédagogique.
En classe | Dans un ENT | |
Livres | Intégralité | Extraits “d’ampleur raisonnable” |
Manuels | Extraits (4 pages consécutives ou 10% maximum) | |
Périodiques imprimés | Intégralité | Extraits “d’ampleur raisonnable” |
Images / Arts visuels | Intégralité | Intégralité possible (20 images par document maximum) |
Vidéos | Extraits (6 minutes ou 10% maximum) | |
Musique enregistrée | Intégralité possible | 30 secondes maximum |
Musique écrite / Partitions | Extraits (3 pages consécutives ou 10% maximum) |
Co-pilotée par la DES et la DRIS, une enquête a été conduite début 2017 pour identifier les usages que les enseignants ont des images dans leurs supports de cours et pour combler d’éventuels besoins de service et d’accompagnement dans l’utilisation des images.
Le questionnaire comportait 13 items répartis dans les thèmes suivants :
Lancée début 2017, l’enquête a été adressée à 2794 personnes parmi lesquelles 277 enseignant.e.s ont répondu (soit un peu moins de 10%). Les réponses ont été anonymisées, en rendant toutefois possible des tris croisés a posteriori à partir de données du logiciel Banner (âge, sexe, statut, discipline d’enseignement, programme / campus).
On observe que l’âge moyen des répondants est légèrement plus élevé que l’échantillon de référence, que les femmes y sont sur-représentées, ainsi que les enseignants de langues. Les disciplines les plus représentées parmi les répondants sont : les humanités, la science politique et la communication.
Sur les différents thèmes de l’enquête, les résultats suivants sont observés.
Si l’on devait résumer en une phrase les résultats de cette enquête on pourrait écrire que “tous les enseignants de Sciences Po utilisent toutes sortes d’images lors de leurs enseignements, dans le respect de l’exception pédagogique”. Mais un résultat de l’enquête semble devoir retenir davantage l’attention : bien que les enseignants s’appuient sur les images pour évaluer les étudiants, très peu incluent dans leurs cours une véritable formation à l’analyse des médias imagés. L’adage “a picture is worth a thousand words” est pourtant trompeur. Nombre de recherches en sémiologie, psychologie cognitive et sciences de l’éducation soulignent que les images ne sont pas univoques et que leur compréhension aboutie repose sur une analyse rigoureuse et détaillée. Ce constat doit se traduire par davantage d’efforts pour accompagner les étudiants vers une meilleure maîtrise des images, “de leurs modes opératoires, de leurs significations, de leur impact et de leur registre symbolique” (C. Pichon-Bonin).
Véronique DUBOIS-BOUCHET (PhD), Ingénieure pédagogique, Laboratoire de Pédagogie Active, Direction des études et de l’innovation, Sciences Po, Caroline MAUFROID, Iconographe, Direction des Ressources et de l’Information Scientifique, Bibliothèque de Sciences Po, Cécile TOUITOU, Responsable de la mission marketing, Direction des Ressources et de l’Information Scientifique, Bibliothèque de Sciences Po.