Première fois sur un terrain de guerre
Léopold Audebert, Valentin Boissais, et Anthony Lebbos, Clara Marchaud
Ils ont couvert pour la première fois une guerre et sont venus partager leur expérience avec les étudiants de l'Ecole de journalisme de Sciences Po lors d'une master class le jeudi 7 avril 2022.
Diplômés 2019 ou 2020 de l'Ecole de journalisme de Sciences Po, Clara Marchaud, journaliste pigiste pour Le Figaro, résidant en Ukraine, Léopold Audebert, journaliste politique pour BFM TV, Anthony Lebbos, reporter pour BFM TV et Valentin Boissais, reporter pour RTL, se sont rendus, soit comme envoyés spéciaux, soit comme correspondants, en Ukraine et aux frontières de pays en conflit avec la Russie.
La préparation, la confrontation avec la mort, la vue des charniers, le traumatisme des témoins, la difficulté d'informer dans l'émotion, la nécessité d'avoir des femmes journalistes sur ces zones, la prise en compte de ses propres limites, la gestion du retour aussi...
Ils ont tous raconté la nécessité impérieuse de "se préparer", du point de vue logisitique et matériel, mais aussi psychologique.
Retrouvez l'intégralité de la master class en replay.
Et découvrez le résumé de leurs interventions en vidéo.
L'Ecole de journalisme de Sciences Po a déménagé
Les salles de rédaction donnant sur le patio
Le studio TV / vidéo
Vue de la régie
La cour de l'Ecole de journalisme de Sciences Po
Le studio TV lors d'une édition spéciale
Créée en 2004, l'Ecole de journalisme de Sciences Po a passé 18 ans dans le bâtiment surnommé "le 117", basé au 117 boulevard Saint Germain, avant de déménager en mars 2022. L'école de journalisme de Sciences Po bénéficie d'installations exceptionnelles au sein du campus de Sciences Po, situé en plein coeur du 7e arrondissement de Paris, près de la rue du Bac.
Dans l'hôtel de l'Artillerie, qui a été successivement un noviciat dominicain, musée d'armes et site militaire, Sciences Po a choisi de dédier près de 382 m2 aux activités de production journalistique des étudiants.
Voir toutes les photos de l'installation
Des locaux dessinés sur mesure pour la pratique de futurs journalistes et adaptés aux exigences des rédactions professionnelles.
- un studio TV / vidéo de 60 m2 doté de gradins pour 29 personnes, régie, plateau 5 places, 3 axes caméras, cabine speak, éclairages LED, fond vert, écrans de diffusion, accès PMR.
- un studio radio / podcasts de 55 m2 doté de gradins pour 21 personnes, régie, plateau 5 places, système de diffusion sonore, accès PMR.
- 5 salles de rédaction de 257 m2 équipées d'ordinateurs avec logiciels de montage, accès aux EVN, fil AFP, écrans de projection, système de caméras hybrides pour vidéoconférence.
"Journaliste est un métier qui nécessite rigueur et endurance"
Marie Monier
Pouvez-vous décrire votre parcours académique et professionnel?
Après une prépa littéraire puis une Licence en Droit à la Sorbonne, j’ai intégré l’Ecole de journalisme de Sciences Po en master en 2012. Parcours radio en deuxième année, le média qui m’a rapidement plu pour sa mobilité et l’intimité qu’il crée avec les auditrices/auditeurs. Assez rapidement aussi j’ai voulu devenir reporter. Lauréate de la Bourse Dumas en 2014, j’ai fait mes premières armes au service reportage de la rédaction de RTL. J’ai aussi pu faire de la production d’émissions et assister les présentateurs news dans l’élaboration de leurs journaux. En 2015/2016 j’ai quitté la rue Bayard pour RMC, une radio jeune, dynamique, qui développait à l’époque le bi-média (radio et TV). J’ai d’abord intégré l’équipe en piges, puis en CDD et CDI. RMC envoie sur le terrain et fait confiance à ses jeunes recrues. J’y ai couvert l’actualité nationale et internationale de la radio, en “bouffant” du reportage et des kilomètres de route, d’avion, de train pour “aller vers”, “donner la parole”, enchaîner directs et plus longs formats de récits jusqu’à la fin de l’année 2020. Une expérience inoubliable qui a sans aucun doute forgé la journaliste que je suis aujourd’hui. Fin 2020, je suis partie m’installer à Saint-Laurent-du-Maroni, en Guyane Française, en tant que journaliste indépendante.
Quel poste occupez-vous aujourd'hui?
Je découvre depuis plusieurs mois le journalisme indépendant, avec ses challenges et ses opportunités mais également sa précarité. En Guyane j’ai essentiellement collaboré avec la matinale de France Inter, le magazine Interception, en podcast pour Défense de Filmer (Paradiso Podcast et Brut), la RTS et la Vie en presse écrite. C’est un département où il y a mille histoires à raconter, aux enjeux sociaux, économiques, politiques oh combien nombreux mais un terrain de reportage difficile (conditions d’accès, météo, manque d’infrastructures…) qui intéresse encore trop peu - selon moi - les médias nationaux.
Quelles ont été les contributions de votre formation à la fonction que vous occupez aujourd’hui?
L'Ecole de journalisme de Sciences Po m’a permis d’être opérationnelle - et le mot compte -, et de me projeter comme “journaliste” et non plus seulement comme “étudiante” en journalisme. C’est une excellente préparation aux concours d’entrée post-école, dans les rédactions.
Quels souvenirs gardez-vous de votre école, de votre promotion, de vos enseignants?
Je me souviens d’une promotion éclectique, avec des camarades aux expériences et aux envies diverses. On avait ce point commun d’être passionnés tout en étant très différents les uns des autres. Tous les temps de cours où nous étions une vraie rédaction en radio, en TV ont permis de nous immerger efficacement dans le monde qui allait être le nôtre à l’issue de la formation.
Quels conseils donneriez-vous à un étudiant qui souhaiterait devenir journaliste aujourd'hui?
Je lui conseille de se nourrir d’actualités - lire, regarder, écouter - multiplier ses sources d’informations avec l’approche d’un futur professionnel et non plus seulement du simple auditeur / téléspectateur / lecteur. Cela doit être un plaisir, pas une contrainte évidemment. Se nourrir des histoires qui sont partout autour de nous, avoir l’empathie et la curiosité de donner la parole. Si des sujets de reportages ou d’enquêtes vous intéressent, notez-les dans un carnet, vous pourrez y revenir plus tard. Etre à "l'affût" de l’info OUI mais profiter aussi de la vie, la vraie, de vos passions personnelles - tout cela profitera à votre travail de terrain et vous permettra plus tard de sortir la tête du guidon et d’avoir des “sas” de décompression. C’est un métier qui demande rigueur et endurance, surtout dans le news.
N’hésitez pas non plus à développer une thématique, un ensemble de sujets qui vous tient particulièrement à cœur, c’est un bon moyen de se démarquer, notamment lorsqu’on devient journaliste indépendant.
Du 28 mars au 1er avril : focus sur les métiers presse, media et journalisme
Focus sur les métiers presse, media et journalisme
Sciences Po, à travers notamment son École de journalisme, forme les étudiants dans le cadre d'un programme d'études menées dans les conditions d'une salle de rédaction.
À l'issue de Sciences Po leurs débouchés dans le journalisme sont variés : reporters, journalistes spécialisés, correspondants (localiers ou internationaux), chefs de services au sein de grandes chaînes de télévision, directeurs de rédaction, journalistes reporters d'image.
Focus sur ces métiers et témoignages de diplômés.
"Dans cette école, j'ai su que je monterai un jour un média"
Melissa Bounoua Crédit: Thomas O'Brien pour Louie Media
Pouvez-vous décrire votre parcours académique et professionnel?
Après un bac scientifique au lycée Louise Michel à Champigny-sur-Marne dans le Val-de-Marne (94), j'ai intégré une classe préparatoire aux grandes écoles littéraires dans l'idée de commencer à préparer les concours aux écoles de journalisme, je savais que je voulais devenir journaliste dès la classe de seconde. J'ai passé deux ans à Saint-Maur-des-Fossés au lycée Marcellin Berthelot où j'ai compris que la géographie serait la matière que je continuerai avant d'entrer en journalisme (je n'étais pas du tout sûre d'y arriver à l'époque !). J'ai donc fait une licence de géographie à l'institut de géographie de Paris I Panthéon Sorbonne, tout en préparant les concours des écoles de journalisme, et notamment celui de Sciences Po qui m'intéressait le plus pour son aspect international. Je ne pensais pas décrocher les concours si vite, j'ai intégré l'école cette année-là d'abord dans l'idée de faire de la télévision, puis j'ai rapidement compris que c'était le web qui m'excitait le plus pour sa réactivité et sa liberté d'écriture, de format... Je n'avais pas envie d'attendre des années avant de signer un article dans un grand quotidien (même si j'adorais la presse).
En deuxième année de master, en 2008, je suis partie en stage au Washington Times l'été, puis en échange avec l'école de journalisme du Missouri à Columbia au deuxième semestre 2008. C'était l'année de la première élection de Barack Obama, j'ai pu suivre la campagne avec celle qui deviendrait mon associée dix ans plus tard – Charlotte Pudlowski –, et les réseaux sociaux commençaient tout juste à être des outils journalistiques, c'était réjouissant ! J'ai trouvé un travail avant même d'avoir obtenu mon diplôme en 2009 car je passais beaucoup trop de temps sur internet et les réseaux, j'ai été la première community manager de la chaîne Arte. Puis j'ai travaillé un an et demi chez 20minutes.fr, avant d'aller à L'Obs.com travailler pour un site de tribunes et de témoignages, et d'intégrer Slate.fr, d'abord sur un projet techno de repérage de contenus qui circulent sur le Web, puis en tant que cheffe des infos puis rédactrice en chef adjointe jusqu'en 2017.
Quel poste occupez-vous aujourd'hui? A quoi ressemble votre travail au quotidien?
Je suis co-fondatrice, avec Charlotte Pudlowski donc, du studio de podcasts Louie Media depuis 2017. Je suis cheffe d'entreprise et je m'occupe plus particulièrement de superviser tout le développement, la création et la production des podcasts. Nous avons deux activités principales. Un média avec dix podcasts différents, notre ligne éditoriale, c'est "faire ressentir le monde" pour à la fois informer pour une meilleure compréhension du monde, tout en suscitant des émotions. Cela passe souvent par des histoires vraies, racontées par celles et ceux qui les ont vécu, comme dans Passages
Quelles ont été les contributions de votre formation à la fonction que vous occupez aujourd'hui?
Quand je suis entrée à l'école de journalisme en septembre 2007, j'avais fait deux stages très courts en rédaction grâce à des candidatures spontanées alors que je n'avais aucun réseau. En entrant à l'école, j'étais au quotidien en contact avec des enseignants qui sont tous journalistes dans des rédactions ou qui ont une grande expérience dans leur secteur, ce qui permet d'en savoir plus sur le fonctionnement de plein de médias et boîtes de production, c'est super précieux et ça ouvre des portes.
Aussi, j'ai vraiment eu l'impression de commencer à travailler avant de sortir de l'école car les cours sont très pratiques : par exemple, on a lancé et écrit pour des blogs pour LeMonde.fr (sur les élections municipales à Paris et le festival de Cannes) dans le cadre d'un cours avec Pierre Assouline.
Mais la plus contribution la plus importante je crois après ça a été le semestre d'échange à l'université de Columbia dans le Missouri. Il a eu tellement d'implications pour ma vie professionnelle ensuite que je ne peux que le recommander : cela m'a permis de trouver un emploi à la sortie de l'école et de monter Louie Media, car c'est là que j'ai découvert le traitement de l'info et la recherche de sources via les réseaux sociaux – ça peut sembler évident aujourd'hui mais ça ne l'était pas en 2007. Et c'est aussi là que j'ai commencé à écouter des podcasts.
Quels souvenirs gardez-vous de votre école, de votre promotion, de vos enseignants?
C'était une super promo (2007-2009), une très bonne ambiance avec l'équipe de l'école, beaucoup d'entre nous sont en rédaction, ont écrit des livres, monté leur projet Je me souviens aussi qu'avec une partie de notre promotion, nous avons aussi lancé un magazine dans le cadre d'un cours avec Renaud Leblond et Christian Fevret sur la création de média. Pendant deux ans, grâce à l'incubateur de Sciences Po aussi, on a publié Megalopolis, un magazine sur le « très Grand Paris ». C'était une première expérience de création de média qui nous a tellement appris. Le projet était surtout emmené par mes camarades de promo Marina Bellot et Jérôme Lefilliâtre mais c'est avec ce cours et ce projet que j'ai su que je monterai un jour un média.
L'autre chose qui m'a marquée : grâce à Agnès Chauveau, qui dirigeait l'école à l'époque, on a eu un cours sur le Web et les outils (dont les réseaux sociaux) au tout début de notre formation avec Francis Pisani, c'est là que j'ai créé mon compte Twitter en septembre 2007.
Quels conseils donneriez-vous à un étudiant qui souhaiterait devenir journaliste aujourd'hui? What advice could you give to a student who would like to become a journalist?