Valerie Arnhold, docteure en sociologie

Valerie Arnhold, docteure en sociologie

31 janvier 2022
  • Tsunami : 04/30/2011 Fukushima japan ©shutterstock-Fly_and_DiveTsunami : 04/30/2011 Fukushima japan ©shutterstock-Fly_and_Dive

 

Le 31 janvier 2022, Valerie Arnhold a soutenu une thèse de sociologie dont le titre  est  : Normaliser l’apocalypse : organisations et recompositions du secteur nucléaire  face aux accidents.

 


Membres du Jury :

Jenny ANDERSSON, 
Olivier BORRAZ (Directeur de recherche), 
Sylvain LAURENS,
Turo-Kimmo LEHTONEN,
Christine MUSSELIN,
Sezin TOPCU

Résumé

En partant de l’accident de Fukushima Dai-ichi en mars 2011, cette thèse interroge les manières dont le secteur nucléaire a pu surmonter cette catastrophe sans remise en cause majeure. Pour en rendre compte, la thèse retrace les modalités de prise en charge des accidents nucléaires par les agences de contrôle et de régulation depuis leur constitution en objet d’action publique à la suite de l’accident de Three Mile Island en 1979. Ce travail repose sur une étude du cas français, doublement élargie par l’étude d’espaces européens et internationaux de coopération autour des accidents, d’une part, et par la prise en compte du cas allemand comme contre-point, de l’autre. L’analyse s’appuie sur une enquête ethnographique multi-située, qui a permis d’observer le travail sur Fukushima au concret. Cette enquête a été complétée par un travail d’archives ainsi qu’une analyse des productions médiatiques.

La thèse montre comment la prise en charge des accidents enclenche un processus de normalisation au terme duquel les organisations nucléaires intègrent les accidents graves à leurs pratiques ordinaires, les transformant en événements surmontables et in fine acceptables, qui ne remettent plus en cause la continuité des politiques et des institutions du secteur nucléaire. L’étude des pratiques professionnelles des experts nucléaires et des relations entre les acteurs du secteur nucléaire éclairent les conditions de possibilité de ce processus. Premièrement, les experts de la sécurité nucléaire abordent les accidents nucléaires avant tout comme des enjeux de production de savoirs et d’écrits selon une logique qui écarte leurs effets matériels et évite la confrontation aux données empiriques, produisant ainsi une vision d’un horizon « apocalyptique » qui demeurerait contrôlable. Deuxièmement, la création d’organisations de contrôle et de régulation du secteur nucléaire a contribué, paradoxalement, à l’autonomisation du secteur à l’égard du pouvoir exécutif, afin d’empêcher un gouvernement à distance et d’éloigner des crises futures.

La thèse contribue à la sociologie de l’action publique, en étudiant les conditions d’autonomisation d’agences de régulation et de l’expertise vis-à-vis du politique. Elle contribue aux STS en soulignant les dimensions politiques du travail de maintenance et à la sociologie des organisations en montrant comment les organisations transforment les matérialités et temporalités des événements indésirables. Elle contribue à la compréhension des crises, en montrant comment les organisations inversent le sens des injonctions à « l’adaptation »: ce ne sont pas les organisations qui s’adaptent pour envisager réellement la survenue de catastrophes, mais les accidents qui sont abordés sous l’angle de ce que les organisations sont capables de gérer, déplaçant les mandats de protection des organisations publiques.

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