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Interview

Olivier Dabène : « Ivan Duque va mettre en oeuvre une politique sécuritaire très ferme »

Selon Olivier Dabène, professeur à Sciences po, la présence de bandes armées rivales qui veulent contrôler les terres restituées par les Farc conduit à un net regain de violence.

Olivier Dabène : « Ivan Duque va mettre en oeuvre une politique sécuritaire très ferme »
(DR)

Par Michel De Grandi

Publié le 7 août 2018 à 17:05Mis à jour le 7 août 2018 à 19:02

Que va-t-il se passer avec les accords de paix dénoncés par le nouveau président colombien ?

Des choses vont changer, c'est certain, ne serait-ce que pour répondre à l'indignation soulevée par l'impunité dont certains anciens guérilleros auraient pu jouir grâce à ces accords. Ivan Duque a évolué lui aussi sur la question des accords de paix durant sa campagne. Au début, il voulait les déchirer, pour finir, il parle de les amender. Je ne pense pas qu'il propose un nouveau texte. Par contre, il peut freiner les réformes proposées par l'actuelle version. Il peut par exemple réduire de deux à un seul, le nombre de mandats réservés aux ex-Farc élus au Parlement. Du côté des terres agricoles, alors que les accords prévoient une restitution des superficies détenues par les Farc, la réforme agraire censée procéder à une vraie redistribution a peu de chances de voir le jour. En matière de foncier, la Colombie, reste parmi les pays les plus inégalitaires au monde, la plupart des terres étant dans les mains de grandes familles, plutôt proches de la droite. Dans ce contexte, on voit que la situation post-conflit n'est pas éclaircie.

Les narcotrafiquants vous semblent-ils à même de reprendre de l'influence ?

C'est l'autre volet important pour le nouveau président. Aujourd'hui, beaucoup de groupes armés s'entre-tuent pour contrôler les terres restituées conformément aux accords de paix. Ce qui va pousser Ivan Duque à mettre en oeuvre une politique sécuritaire très ferme en déployant des militaires partout dans le pays. Comme l'avait fait Uribe vingt ans plus tôt. S'agissant du narcotrafic, il y a clairement un regain d'influence et de présence. A cette nuance près que, les grands cartels colombiens ayant disparu, ils sont d'une certaine manière remplacés par les Mexicains. Ces derniers sont puissants, ultra-riches et très violents. Actuellement, une certaine anarchie règne avec davantage de meurtres notamment dans des régions reculées ou frontalières. Mais il faut reconnaître aussi qu'avec les accords de paix, les homicides ont baissé et que les élections de 2018 se sont déroulées dans un climat incroyablement pacifique. C'est une bonne nouvelle qui mérite d'être soulignée.

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L'ELN, une autre guérilla toujours active attend les propositions du président avant de se déterminer. Est-ce dangereux ?

Je ne suis pas optimiste sur l'avenir des négociations. Les membres de l'ELN vont se montrer intransigeants et vont vouloir symboliser la lutte contre le virage à droite de la Colombie. En même temps, ils ne sont pas d'une taille telle qu'ils peuvent constituer le noyau dur de la résistance. Si Ivan Duque veut les neutraliser, il peut le faire.

Michel De Grandi

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