Plus discret que Doha dans la médiation entre Israël et le Hamas, Le Caire n’en est pas moins incontournable. Avec la guerre à Gaza, l’Egypte retrouve une centralité qu’elle avait perdue sur la scène internationale avec la montée en puissance de ses parrains du golfe Persique.
Avec l’appui de son homologue jordanien, Ayman Safadi, le ministre des affaires étrangères égyptien, Sameh Choukri, tient tête aux desseins israéliens de déplacer 2 millions de Gazaouis dans le Sinaï. De pair avec les médiateurs qataris, le général Abbas Kamel, chef du service de renseignements généraux (GIS), a négocié la trêve entre belligérants, qui a permis l’échange d’otages israéliens contre des prisonniers palestiniens, et l’entrée d’aide humanitaire à Gaza.
« Si le Qatar est un soutien diplomatique et financier très fort du Hamas, il est perçu comme moins important que l’Egypte, car il n’est pas concerné géographiquement par le conflit », considère Sarah Daoud, docteure en science politique au Centre de recherches internationales de Sciences Po. Après avoir administré l’enclave jusqu’en 1967, l’Egypte y conserve d’importants relais. Les officiers du GIS, directement reliés à la présidence, « disposent d’un maillage humain sur le terrain. Ils parlent autant avec la branche militaire du Hamas, son bureau politique et les différentes factions palestiniennes », abonde Dima Alsajdeya, chercheuse au Collège de France.
Le poste-frontière de Rafah a été un thermomètre des relations entre l’Egypte, Israël et le Hamas. Complètement fermé à l’arrivée au pouvoir en Egypte, en 2014, du maréchal Abdel Fattah Al-Sissi, en lutte ouverte contre les Frères musulmans, il a rouvert quand Yahya Sinouar a pris la tête du Hamas à Gaza en 2017, disposé à sceller la réconciliation palestinienne. La rivalité avec le Qatar, épinglé par Le Caire et ses parrains du Golfe comme un sponsor de l’islamisme politique, s’est elle aussi atténuée avec la levée, en janvier 2021, du blocus contre le Qatar, laissant place à une comédiation dans les guerres qui ont depuis opposé Israël au Hamas.
Dépendante de Riyad et d’Abou Dhabi
L’implication du Caire dans le dossier gazaoui lui permet de bénéficier d’une plus grande magnanimité des pétromonarchies du Golfe, des Etats-Unis et de l’Union européenne. « La question qui se pose est comment l’Egypte va capitaliser sur l’après-guerre. Dans tous les scénarios, l’Egypte sera au centre des discussions autour d’une résolution du conflit, mais aussi sur la thématique de la reconstruction, hautement politique. Même si son financement se fera probablement avec des fonds venus du Golfe, l’Egypte aura forcément un rôle à jouer », considère Amr Adly, professeur de science politique à l’Université américaine du Caire.
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