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Le pacte migratoire européen est-il en état de «mort cérébrale» ?

Des forces de l'ordre polonaises montent la garde devant la frontière biélorusse où le gouvernement construit un mur de séparation, le 27 janvier dernier près de Kuznica.
Des forces de l'ordre polonaises montent la garde devant la frontière biélorusse où le gouvernement construit un mur de séparation, le 27 janvier dernier près de Kuznica. KACPER PEMPEL / REUTERS

DÉCRYPTAGE - Censé proposer une réforme profonde du cadre migratoire européen, il est peu probable qu'il soit adopté en l'état pendant la présidence française du Conseil de l'Union.

Un an et demi après sa présentation par Ursula von der Leyen, le pacte migratoire européen a du plomb dans l'aile. En septembre 2020, la présidente de la Commission européenne détaillait une série de mesures qui devaient profondément réformer le cadre juridique européen en matière d'asile et d'immigration. Mais à ce jour, les négociations sont peu ou prou au point mort.

En prenant la présidence du Conseil de l'Union européenne, Emmanuel Macron s'est donné pour priorité de relancer le sujet sur des points très spécifiques qu'il devait exposer devant les ministres de l'Intérieur de l'Union européenne réunis depuis mardi à Tourcoing. Mais ce que l'on sait déjà, c'est qu'il n'est plus question de mener la réforme globale proposée par ce pacte.

Que prévoit le Pacte européen sur l'immigration et l'asile ?

Cette liasse de textes porte sur cinq grands axes :

  • Renforcer les frontières extérieures : il s'agit tout d'abord d'allouer plus de moyens humains et financiers à l'agence Frontex, chargée de la surveillance des frontières extérieures de l'espace Schengen. Cela passe aussi par l'introduction d'un filtrage préalable de tout franchissement illégal de la frontière : chaque individu doit être identifié et enregistré sur la base de données Eurodac, avec relevé d'empreintes digitales. Le texte prévoit aussi la mise en place d'une procédure accélérée d'examen des demandes de protection qui ont le moins de chance d'aboutir. Étudiées à la frontière de l'Union, elles sont censées donner une réponse rapide au candidat à l'asile.
  • Imposer des mécanismes de solidarité entre les États membres : en cas de crise, comme celle de 2015, chaque État membre doit soutenir les États sous pression, que ce soit par la relocalisation de demandeurs d'asile à la prise en charge du retour de personnes déboutées, en passant par un soutien financier. En revanche, la Commission a abandonné toute idée de clé de répartition contraignante entre les États membres.
  • Abandonner le système des accords de Dublin : actuellement, la demande d'asile ne peut aboutir que dans le pays où elle est enregistrée pour la première fois. L'objectif était d'éviter «l'asylum shoping». Mais dans les faits, toute la charge des demandes repose sur les pays de premières arrivées à savoir la Grèce, l'Italie, Malte et l'Espagne. La Commission propose plusieurs pistes alternatives, comme le traitement de la demande dans le pays où le migrant a des liens familiaux.
  • Harmoniser les règles d'asile entre les États membres : le Pacte prévoit de renforcer de rôle de l'Agence de l'Union européenne pour l'asile. Concrètement, elle aurait pour mission d'unifier les règles entre les pays européens, afin d'obtenir le même taux d'acceptation ou de refus pour un pays d'origine donné.
  • Accélérer les reconductions aux frontières et développer l'aide au retour : il s'agit ici de renforcer les accords de réadmission avec les pays tiers, couplés à une aide financière au développement.

Pourquoi est-il très improbable qu'il aboutisse en l'état ?

Rappelons d'abord que ce texte n'est pas un traité, mais «un engagement de consensus sur des principes communs de gouvernance», pour reprendre les termes de Catherine Wihtol de Wenden, chercheur au…

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8 commentaires
  • anonyme 18696

    le

    Gesticulations électorales. Plus personne n'y croit, sauf les communicants macronistes qui font semblant

  • Kerprovost

    le

    C’est bien la France annoncée hier sur TPMP par le Maire de Trappes: « cette France là, elle advient de gré ou de force. Elle s’imposera, car elle s’impose déjà ... ». En avril et mai, votez plutôt pour une France qui ne soit pas une jungle ; faites-le pour l’avenir de vos enfants.

  • Daniel de Rougemont

    le

    L’article contient quelques inexactitudes et beaucoup d’omissions.
    Les inexactitudes :
    - toute la charge des demandes d’asile ne repose pas sur les pays de premiere entrée, il suffit de consulter les statistiques d’Eurostat : c’est l’Allemagne qui est en tête chaque année pour le nombre de demandes d’asile depuis 2012. Il y a eu des pics en Grèce (2016-2019), en Espagne (2018-2020) et en Italie (2014-2017) mais la France a toujours eu plus de demandes d’asile que l’Espagne (sauf en 2020), que l’Italie (sauf en 2014-2017) ou que la Grèce. Comme les migrants sont laissés en liberté, ils continuent de se déplacer vers leur pays de destination.
    - le Pacte est un ensemble de propositions de règlements qui doivent être adoptées par le Parlement et le Conseil de l’UE (pas le Conseil européen), mais pas à l’unanimité : la majorité qualifiée peut juridiquement s’appliquer mais un consensus est politiquement nécessaire sur un sujet aussi délicat.
    Les omissions sont trop nombreuses mais un exemple : rien de de qui est proposé ne peut être efficace car les institutions européennes et la France sont dans une logique de « gestion des flux », pas d’arrêt de l’immigration illégale. Frontex ne peut pas empêcher les migrants d’entrer dans l’UE mais juste aider les EM à les enregistrer et les contrôler. C’est pour cela que ni la Grèce en mars 2020 ni la Pologne à l’automne n’ont fait appel à Frontex.

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