Menu
Libération
Répression

A Hongkong, un paramilitaire en provenance du Xinjiang nommé à la tête de l’armée

Hongkong sous le joug de Pékindossier
Peng Jingtang vient d’être nommé par Xi Jinping commandant de la garnison de l’Armée populaire de libération, illustrant à nouveau le verrouillage répressif de Pékin sur Hongkong.
par Margot Davier
publié le 11 janvier 2022 à 19h58

Un CV et une expérience qui en disent long sur les intentions du régime chinois à Hongkong. Issu des rangs de la police armée du peuple, une composante paramilitaire des forces armées chinoises dans la région du Xinjiang, le général Peng Jingtang a été nommé commandant de la garnison de Hongkong par Xi Jinping.

La cheffe de l’exécutif, Carrie Lam, qui l’a reçu lundi, a souhaité que l’Armée populaire de libération (APL) et le gouvernement régional de Hongkong coopèrent pour assurer la stabilité, la prospérité et le développement du territoire. Si Hongkong dispose de sa propre force de police, la Chine est autorisée à y maintenir des casernes militaires depuis la rétrocession de la ville en 1997.

Lutte contre le terrorisme

Les états de service de Peng Jingtang détonnent par rapport aux compétences requises pour son nouveau poste. «La garnison de l’armée populaire de Hongkong est destinée à défendre le territoire contre les agressions extérieures. Or, le général Peng apparaît comme un spécialiste de la lutte contre l’ennemi intérieur», analyse Jean-Philippe Béja, directeur de recherche émérite au CNRS, spécialiste de la Chine et de Hongkong.

En poste au Xinjiang, où sont perpétrés des crimes de masse à l’encontre de la minorité ouïghoure, il était également membre du Commando des aigles des montagnes, créé en 2019 et chargé de «répondre aux besoins de la lutte contre le terrorisme dans la région et dans toute la Chine», selon Pékin. «Chaque balle que nous tirons est destinée au champ de bataille», aurait-il déclaré. Il s’était vanté du fait que son commando utilisait trois fois plus de munitions en une année d’entraînement que les autres unités.

Une nomination «inquiétante»

Le quotidien chinois Global Times, également publié en anglais et proche du Parti communiste, souligne qu’il est le premier membre issu des forces de la police armée du peuple à occuper un poste de commandant au sein de la garnison de l’APL, dont l’objectif premier reste la défense nationale. «Il existe une police à Hongkong qui, selon la Constitution, est responsable du maintien de l’ordre et de la lutte antiterroriste. Ce n’est pas du tout le rôle de l’Armée populaire, qui ne s’est jusqu’à maintenant jamais impliquée dans les affaires intérieures de Hongkong. Mais les choses sont en train de changer, Pékin intervient davantage», poursuit Jean-Philippe Béja. Selon le chercheur, cette nomination demeure «très inquiétante» pour ce qu’il reste d’autonomie à Hongkong, depuis la mise en place de la loi sur la sécurité nationale en 2020.

Peng Jingtang a déclaré qu’il mettrait en œuvre le principe «un pays, deux systèmes», formule érigée après la rétrocession, qui signifiait que Hongkong pouvait faire partie de la Chine sans qu’y soient appliquées les mêmes règles. «Sa nomination est une violation de ce slogan, fustige Jean-Philippe Béja. Pékin décide de tout et Xi Jinping se place dans une logique orwellienne depuis l’adoption de la loi de sécurité nationale : dire qu’on applique quelque chose et faire le contraire.»

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique