France-Algérie : Emmanuel Macron et la réconciliation des mémoires

Malika Boumendjel, la veuve de l'avocat Ali Boumendjel, interviewée chez elle à Puteaux en 2001. ©AFP - ERIC FEFERBERG
Malika Boumendjel, la veuve de l'avocat Ali Boumendjel, interviewée chez elle à Puteaux en 2001. ©AFP - ERIC FEFERBERG
Malika Boumendjel, la veuve de l'avocat Ali Boumendjel, interviewée chez elle à Puteaux en 2001. ©AFP - ERIC FEFERBERG
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Cette semaine, le président français a enfin prononcé ces mots : « Ali Boumendjel ne s’est pas suicidé. Il a été torturé puis assassiné. » Emmanuel Macron fonde cette politique d’apaisement des mémoires sur le fait de reconnaître les faits, à défaut de s’excuser.

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Cette semaine, le président français a enfin prononcé ces mots : « Ali Boumendjel ne s’est pas suicidé. Il a été torturé puis assassiné. »  Ali Boumendjel, avocat né en 1919 dans la région d’Oran, s’était engagé dans la lutte pour l’indépendance de son pays, rejoignant le FLN. En 1957, Ali Boumendjel est arrêté par l’armée française, emmené dans un bâtiment d’un quartier d’Alger, torturé pendant plusieurs semaines, avant d’être jeté du sixième étage. 

Le geste d’Emmanuel Macron fait suite à la reconnaissance en 2018 de la responsabilité de l’État dans l’assassinat du militant communiste Maurice Audin, jeune professeur de mathématiques à Alger,  également torturé par des militaires. Auparavant, en février 2017, à Alger, le candidat Emmanuel Macron avait qualifié la colonisation de « crime contre l’humanité », déclenchant un débat majeur dans sa campagne. Puis en décembre 2017, en Algérie, le Président Macron avait promis une « duplication » des archives de la période coloniale, puis en 2018 une dérogation générale sur les archives des disparus et en juillet 2020, il actait la restitution de crânes d’insurgés algériens tués par l’armée française et entreposés au Muséum national d’histoire naturelle de Paris.

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Emmanuel Macron fonde cette politique d’apaisement des mémoires sur le fait de reconnaître, à défaut de s’excuser, sur le thème du « ni déni, ni repentance », reprenant en partie cette « politique des petits pas » prônée par l’historien Benjamin Stora, lequel lui a récemment remis un rapport contenant 22 propositions.

« Nous ne renoncerons jamais à notre mémoire, mais il ne faut pas en faire un fonds de commerce », a de son côté déclaré le président algérien, Abdelmadjid Tebboune. « Nous ne privilégierons pas de bonnes relations au détriment de l’histoire et de la mémoire, mais les problèmes se règlent avec intelligence et dans le calme, et non avec des slogans .» 

"Ni slogans, ni caricatures" répondent aussi d’autres mémoires blessées dans cette Histoire : celle des pieds noirs ou encore des harkis. Emmanuel Macron est le premier président français né bien après la guerre d’Algérie, comme le petit fils d’Ali Boumendjel, présent lui aussi cette semaine à l’Elysée. Ils font partie – avec tant d’autres – d’une génération qui a désormais entre ses mains le pouvoir de réconcilier les mémoires, ou au contraire de les hystériser.

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