Brexit : comprendre les derniers rebondissements en cinq minutes

Le Premier ministre Boris Johnson a été désavoué mardi soir par une majorité de députés. Ces derniers ont voté mercredi la loi demandant un nouveau report de la sortie de l’UE.

 Le Premier ministre britannique Boris Johnson a été désavoué par une majorité de députés mardi 3 septembre.
Le Premier ministre britannique Boris Johnson a été désavoué par une majorité de députés mardi 3 septembre. REUTERS

    « Le jour sans fin ». Les rebondissements dans le dossier du Brexit, qui nourrissent l'actualité quotidienne du Royaume-Uni depuis plusieurs mois, rappellent le titre de ce fameux film sorti en 1993.

    Mardi soir, le Premier ministre britannique Boris Johnson a subi un cinglant désaveu en perdant sa majorité au Parlement. 328 députés (contre 301) ont voté la prise de contrôle des débats. Ce qui leur a permis de voter mercredi soir un nouveau report du Brexit. La veille, « Bojo » a répliqué en agitant la perspective de nouvelles élections. Mais les députés ont une nouvelle fois opposé un « non » au Premier ministre : ils ont rejeté la motion qu'il avait soumise à leur vote, destinée à organiser des élections anticipées le 15 octobre

    On fait le point sur la situation, et sur les scénarios possibles pour la suite.

    Que s'est-il passé mardi ?

    Une majorité de députés britanniques a approuvé le principe d'une motion reportant le Brexit au-delà de la date butoir du 30 octobre, au cas où aucun accord avec l'UE ne soit trouvé d'ici-là. Les 247 élus travaillistes ont sans surprise voté pour, mais ils ont été surtout rejoints par 21 élus conservateurs (qui seront expulsés de leur parti), faisant basculer la majorité.

    Ces élus craignent plus que tout ce fameux « no-deal », qui aurait des conséquences inconnues et potentiellement dangereuses sur l'économie du pays. Leur texte sera officiellement déposé ce mercredi, et le vote devrait avoir lieu en début de soirée.

    En réaction, Boris Johnson a menacé mardi soir de convoquer des élections anticipées. « Je ne veux pas d'une élection, mais si les députés votent demain pour arrêter les négociations et appeler à un autre report inutile du Brexit, qui pourrait durer des années, dans ce cas ce sera le seul moyen de résoudre » la situation, a-t-il argué.

    Quels sont les scénarios possibles ?

    Cohérents, les élus qui ont approuvé mardi la prise de contrôle des débats ont voté ce mercredi soir le texte de loi pour un report du Brexit en cas de no-deal. « C'est le plus prévisible, car il n'y a clairement pas de majorité favorable au no-deal », soulignait Christian Lequesne, professeur à Sciences Po.

    Le Premier ministre britannique pourra soumettre au vote dans la foulée une autre motion pour rappeler les électeurs aux urnes. Ce mercredi, il a d'ailleurs proposé la date du 15 octobre prochain pour l'organisation de ces élections anticipées. Sauf qu'il a besoin pour qu'elles soient actées d'obtenir une majorité de deux tiers des députés. Entre les travaillistes et les conservateurs, qui auraient le plus intérêt à de nouvelles élections ?

    D'après les sondages, c'est le camp de Boris Johnson qui fait légèrement la course en tête, avec une courte avance sur le parti travailliste. De nouvelles élections pourraient donc permettre à « Bojo » de retrouver une majorité plus solide, sans les 21 élus qui lui ont fait défaut mardi.

    Mais l'issue d'un nouveau scrutin reste très incertaine. « Depuis qu'il est arrivé au pouvoir, l'avance de Boris Johnson dans les sondages a régulièrement diminué. Et rappelez-vous Theresa May (NDLR : l'ancienne Première ministre jusqu'en juillet dernier) : elle était partie victorieuse et elle a été contrainte de démissionner », rappelle Patrick Martin-Génier, également enseignant à Sciences Po et spécialiste des questions européennes.

    Quant au leader des travaillistes, Jeremy Corbyn, il s'est dit prêt à soutenir le principe de nouvelles élections, à condition qu'un report du Brexit soit préalablement voté.

    Le Brexit aura-t-il toujours lieu le 31 octobre ?

    Rien n'est moins sûr. La date effective et limite du Brexit était au départ fixée cette année au 29 mars, puis elle a été décalée au 31 octobre. Mais les blocages avec l'Union européenne sont toujours là, notamment concernant le contrôle aux frontières entre l'Irlande et le Royaume-Uni. « Sauf si on sort un accord d'une pochette-surprise, c'est matériellement impossible d'y parvenir » en moins de deux mois, estime Patrick Martin-Génier.

    Le vote de mardi « n'arrête pas le Brexit, mais ça rend le no-deal quasiment impossible », résume de son côté Christian Lequesne. « Il y a toujours une incertitude maximale avec trois options sur la table : le no deal, même si ça devient beaucoup plus difficile, le Brexit négocié, et l'abandon du Brexit », poursuit le spécialiste.

    Le prochain Conseil européen, prévu à Bruxelles les 17 et 18 octobre, s'annonce particulièrement houleux. C'est à cette occasion que le gouvernement britannique pourrait être contraint de demander un nouveau report de l'échéance du Brexit, même si Boris Johnson s'est dit ce mercredi « déterminé » à respecter la date du 31 octobre.

    Le risque d'une sortie sans accord « a augmenté », a souligné ce mercredi à la mi-journée la Commission européenne. Plusieurs chefs d'Etat ou de gouvernement, dont Emmanuel Macron, ont aussi régulièrement mis en garde le Royaume-Uni ces dernières semaines : pas question de repousser une nouvelle fois le Brexit. Le jeu de poker menteur de part et d'autre est bien parti pour durer encore quelque temps.

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