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Édito
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Les élections au secours des gestionnaires de la République islamique d’Iran |
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Par Fariba Adelkhah
La campagne de l’élection présidentielle du
19 mai 2017 en Iran a été à nouveau l’occasion de voir s’affronter les
grands courants de l’échiquier politique, que l’on réduit, un peu
abusivement tant ils sont composites, aux réformateurs, aux
reconstructeurs et aux conservateurs. Pour la première fois depuis 1979,
cette échéance importante de la vie politique se tient en l’absence
d’Ali Akbar Hachemi Rafsandjani, homme clef de la République islamique
depuis sa fondation, disparu au début de l’année. Symboliquement, une
page a bien été tournée.
La question qui se pose est de savoir si
le nouveau président respectera l’accord nucléaire de 2015. Le spectre
d’un Iran fauteur de troubles reste vivace. Or, le débat électoral, s’il
a bien traité de cet accord pour en peser les conséquences, a surtout
confirmé la domination sur la vie politique des gestionnaires, ceux que
l’on nomme les directeurs (modir), les experts (motekhases), par opposition aux doctrinaires ou idéologues (maktabi).
La disqualification de Mahmoud Ahmadinejad, l’ancien président de la
République (2005-2013) qui avait déposé sa candidature en dépit de la
recommandation du Guide de la Révolution, et qui s’est donc vu débouter
par le Conseil des Gardiens de la Constitution, a montré qu’un minimum
de consensus devait prévaloir. L’heure n’est plus à l’agitation
populiste. Le bilan économique désastreux de Mahmoud Ahmadinejad a
justifié son éviction, mais a aussi permis de refouler les défis qu’il
incarnait : le primat de la thématique nationaliste sur celle de
l’islam ; le renforcement du pouvoir exécutif, de surcroît tenu par des
laïques plutôt que par des clercs ; la contestation de la prééminence du
Guide de la Révolution qu’il n’a pas hésité à défier ; la défense des
exclus du système (notamment des régions frontalières) contre les
oligarchies. Au risque de surprendre, soulignons que Mahmoud
Ahmadinejad, selon un style certes très différent, a radicalisé
certaines des revendications chères aux réformateurs des années 1990.
Mais les temps ont changé. Ils sont aujourd’hui à la
professionnalisation autant des élections que de l’exercice du pouvoir.
Parmi
les 1636 candidats à l’investiture (dont 137 femmes) pour l’élection
présidentielle, le Conseil des Gardiens de la Constitution n’a retenu
que six noms, tous aux commandes, pendant des années, d’un segment de
l’appareil de pouvoir : Hassan Rohani, le président sortant,
rafsandjaniste, fin connaisseur des questions de sécurité ; son
vice-président, Eshagh Jahangiri, reconstructeur, ayant fait sa carrière
dans l’équipement rural et l’administration territoriale, ancien
ministre de l’Industrie et des Mines ; Mohammad Bagher Ghalibaf,
conservateur indépendant, ancien officier des Gardiens de la Révolution,
libérateur de Khorramshahr en 1982, ancien chef des forces de l’ordre,
maire de Téhéran depuis 2005 ; Seyyed Mostafa Hachemitaba, ancien
ministre de l’Industrie et ancien haut fonctionnaire de l’administration
du sport, lui aussi reconstructeur ; Seyyed Mostafa Mirsalim, également
passé par l’administration territoriale, ancien ministre de la Culture,
conservateur, de tendance Motalefeh, proche du Guide de la Révolution ;
Seyyed Ebrahim Raisi, conservateur et membre de l’Association du clergé
combattant, tout aussi proche du Guide de la Révolution, pilier de
l’institution judiciaire pendant trente-huit ans, et depuis 2016
administrateur de l’Astan-e Qods, le puissant waqf (bien de
mainmorte) de Mashhad qui, fort des 15 millions de fidèles visitant
chaque année le mausolée du Huitième Imam, contrôle économiquement le
"Grand Khorassan", au-delà des frontières de l’Iran, et qui est
également très actif dans le Golfe et en Irak.
Le déroulement de
la campagne a confirmé la professionnalisation de la vie politique en
République islamique, qu’illustre la tenue des débats télévisés entre
les candidats, astreints à des modalités des plus rigoureuses. Il est
révélateur que les médias occupent aujourd’hui le devant de la scène
électorale, plus que les partis ou les mobilisations populaires, au
contraire de ce qui s’était passé entre 1997 et 2009. Les commentateurs
professionnels de la presse tiennent le haut du pavé, y compris sur les
réseaux sociaux censés porter la voix de la société civile.
Dans
ces conditions, le débat public s’est cantonné aux problèmes de
l’inégalité sociale et de l’économie, réduits aux dimensions simplistes,
voire "morales" comme le dirait Olivier Roy, des capacités des uns et
des autres et de la dénonciation de la corruption, sans que soient
abordées dans le détail les politiques fiscales ou industrielles, par
exemple. En outre, l’environnement, l’enseignement, les minorités, les
femmes ont été les grands absents du premier débat télévisé, et n’ont
été ensuite été évoqués que de manière décousue, pour donner le change à
l’opinion.
Aussi, l’essentiel est-il peut-être ailleurs. De
pair avec la présidentielle vont se tenir les municipales, beaucoup plus
ouvertes dans la mesure où elles échappent au filtre du Conseil des
Gardiens de la Constitution, et plus proches des préoccupations de
l’électorat. Ce qui ne signifie pas qu’elles soient garantes de ruptures
ou de l’épanouissement de la société civile. Elles sont en réalité le
haut lieu de la reproduction des élites agraires enclines à s’accaparer
les ressources foncières, aussi bien dans le domaine agricole que dans
l’aménagement de zones industrielles à la périphérie des villes, grâce à
leur maîtrise des réseaux financiers dans le contexte de la
libéralisation du secteur bancaire (1).
L’enjeu du double scrutin du
19 mai est la reproduction du système et de sa classe dirigeante, en
dépit de la disparition progressive de ses chefs historiques, et au
profit d’une nouvelle génération de gestionnaires. Non celui de son
exportation ou de son expansion à l’échelle régionale, dans un supposé "arc chiite". Bien sûr, l’Iran a des intérêts d’Etat à défendre en
Syrie, au Liban, en Irak et en Afghanistan. Il a aussi des intérêts
économiques, institutionnels ou privés, à préserver. A dire vrai, ces
différents intérêts à l’étranger sont devenus constitutifs de la lutte
politique interne. Mais aussi bien les dirigeants que la population
combinent la fidélité envers les acquis de la révolution et de la
République à un solide conservatisme en matière de mœurs et une saine
prudence quant aux dangers de la violence politique qu’avaient favorisée
les impératifs de la Défense nationale pendant la guerre contre l’Irak.
L’actualité régionale est là pour leur rappeler le prix inestimable de
la paix civile et internationale. Comme l’ont rappelé les attaques
contre Seyyed Ebrahim Raisi pour sa responsabilité dans le massacre des
prisonniers politiques en 1988, la mémoire historique des troubles
révolutionnaires, de la terreur et de la guerre reste à fleur de peau.
Il n’est pas sûr que cette dernière soit soluble dans la gestion.
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(1) Pour en savoir plus, voir L'Etude du CERI n° 230.
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VIENT DE PARAÎTRE
COUP D'ŒIL
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In memoriam Anne-Marie Le Gloannec |
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Anne-Marie Le Gloannec, directrice de recherche au CERI, nous a quittés le 26 avril à la suite d'une longue maladie.
Son décès prive notre maison d'une enseignante dévouée, d'une chercheuse de grand talent et d'une collègue et amie attentive, passionnée, d'une exceptionnelle finesse, humaine et spirituelle. Sa mémoire restera pour toujours inscrite dans l'histoire du CERI et de Sciences Po.
Spécialiste de l’Allemagne et de l’Union européenne, Anne-Marie Le Gloannec a obtenu son doctorat d'Etat à Sciences Po. Elle a rejoint le CERI en 1977. Elle a également été directrice adjointe du Centre Marc Bloch à Berlin de 1997 à 2002. Elle a enseigné dans plusieurs universités prestigieuses en Europe et aux Etats-Unis. Boursière de la Fondation MacArthur, elle a séjourné dans plusieurs centres de recherche dont le Woodrow Wilson International Center for Scholars en 2004, elle a été visiting fellow au Nobel Institute d'Oslo au printemps 2015. Elle était membre du Board du Dahrendorf Forum (LSE, Hertie School of Governance) et chercheuse adjointe à l'European Policy Center à Bruxelles. Anne-Marie Le Gloannec a dirigé de nombreux travaux collectifs sur les questions de sécurité en Europe et sur la gouvernance mondiale. Son livre, La nation orpheline. Les Allemands en Europe, paru en janvier 1990, juste après la chute du mur de Berlin, était devenu une référence dans les débats académiques et politiques de l’époque post-soviétique.
Chevalier de la Légion d’honneur, elle a consacré les quinze dernières années de sa vie à l’écriture de son dernier ouvrage, Continent by default. The European Union and The Demise of Regional Order, à paraître chez Cornell University Press en septembre 2017. Cet ouvrage, malheureusement posthume, fera date.
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BRÈVES
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Habilitation à diriger les recherches (HDR) |
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- Lauric Henneton, "La mort du rêve américain" : le spectre du déclin aux Etats-Unis, sous la direction de Denis Lacorne (26 mai 2017).
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ÉVÉNEMENTS
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Transboundary Water Politics: The Interaction of Conflicts and Cooperation
Séminaire de recherche. 17 mai 2017, 17h-19h
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Kinmen et la gouvernementalisation de l’insularité dans le détroit de Taiwan
Séminaire de recherche. 17 mai 2017, 17h30-19h30
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Do People hate their Enemies? Understanding War through the Prism of Representations
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International Organizations as Migration Governors in Central Asia
Séminaire de recherche. 18 mai 2017, 16h30-18h30
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Comment enquêter auprès des juifs de France ?
Séminaire de recherche. 19 mai 2017, 12h30-14h30
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La Turquie au-delà de l'U.E.
Séminaire de recherche. 19 mai 2017, 17h-19h
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Séminaire de recherche. 19 mai 2017, 16h30-18h30
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Les technopolitiques pétrolières dans la France et l'Italie de l'après-guerre
Débat. 22 mai 2017, 11h-12h30
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Nationalism, Religion and Conflict
Séminaire de recherche. 22 mai 2017, 17h-19h
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Brokers of futures: a study of Poland’s shale gas as a technoscientific promise
Séminaire de recherche. 23 mai 2017, 17h-19h
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L'évolution du rôle des diplomates turcs dans la politique étrangère d'Ankara vis-à-vis de l'Irak (2003 - 2014)
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Expertise et action publique « ailleurs » : acteurs, resources, circulations (comparaisons de cas asiatiques, africains, latino américains)
Séminaire de recherche. 29 mai 2017, 9h15-17h
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La búsqueda de la igualdad: cómo construir políticas sociales universales en el Sur
Débat. 30 mai 2017, 14h-15h30
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The Scholar Denied: W.E.B. Du Bois and the Birth of Modern Sociology
Séminaire de recherche. 1 juin 2017, 16h30-18h30
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Policer sans en avoir l'air au Kenya et au Soudan
Séminaire de recherche. 2 juin 2017, 10h-12h
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