Organisé par le CERI et l'IHA, en partenariat avec la FMSH et le CRESC
Pour combattre les tentations métaphysiques (herméneutiques ou spéculatives) comme les illusions scientistes dont les sciences sociales naissantes de son temps étaient prisonnières, Max Weber a élaboré une langue théorique et une méthode destinées à assurer un fondement rigoureux aux sciences sociales comme disciplines empiriques. Un siècle plus tard et eu égard aux incertitudes qui s’emparent à nouveau de ces disciplines quant à leur fondement et à leur objet, il peut être utile d’interroger la fécondité heuristique de la démarche wébérienne à travers les usages qui en sont faits dans les sciences sociales d’aujourd’hui – dans les différents champs de la sociologie, comme la sociologie des religions, la sociologie politique, la sociologie juridique ou la sociologie économique, par exemple, mais aussi en histoire et en anthropologie – à un moment où les références à Weber sont le plus souvent convenues, quand elles ne sont pas de l’ordre de la seule incantation ou qu’elles se réduisent à des stéréotypes rebattus concernant par exemple le charisme, la rationalisation, le désenchantement du monde ou la dite « cage d’acier ».
Au-delà de l’opposition Weber empiriste versus Weber théoricien, ce colloque a pour ambition de donner à voir comment la langue théorique wébérienne peut féconder des analyses empiriques sur des terrains actuels à partir d’une meilleure connaissance de l’originalité conceptuelle de Max Weber. A cet effet, il entend réunir, au-delà des seuls spécialistes de Weber, de ses traducteurs, de ses commentateurs et de ses exégètes, des chercheurs d’horizons divers qui utilisent effectivement et font travailler les concepts wébériens.
Le premier axe de ce colloque ne consistera pas à dresser un état des lieux des recherches qui se réfèrent à Max Weber, mais à déterminer des problématiques qui, dans différents domaines et disciplines, mettent à profit la conceptualisation wébérienne. Mais une bonne appréciation des usages de Weber implique – et tel est l’objet du second axe – de revenir sur certains aspects de la construction théorique wébérienne, tant au plan de la conceptualisation qu’au plan de la méthode. Malgré leur notoriété et leur large diffusion, certains concepts méritent un réexamen, comme par exemple – la liste n’est pas exhaustive – les concepts de domination, de charisme (et sa quotidianisation) ou de conduite de vie. D’autres concepts ont moins retenu l’attention, malgré leur importance centrale, comme les concepts d’attente et d’entente, de validité ou encore de chance. Au plan de la méthode, deux points méritent d’être réévalués : d’une part, la démarche d’imputation causale, y compris la question du raisonnement contrefactuel et celle de la « vérification » empirique et, d’autre part, le raisonnement comparatif. L’examen de ces différents points devrait permettre de dégager l’originalité du raisonnement wébérien par comparaison avec d’autres dispositifs théoriques, comme ceux de la phénoménologie, par exemple.
En faisant se croiser ces deux axes (recherches empiriques « travaillant » avec Weber d’une part, réévaluation de la construction théorique wébérienne d’autre part), on peut espérer contribuer à approfondir la compréhension de ce qui fait la pointe du raisonnement wébérien, y compris en sa dimension éthique et, ce faisant, favoriser des usages plus informés et plus rigoureux de Max Weber dans les travaux actuels de sciences sociales.
Mercredi 4 octobre : 14h30 – 19h00
Au CERI : 56, rue Jacob 75006 Paris (salle de conférences)
Présentation générale : Jean-Pierre Grossein, Université Paris 8 et Béatrice Hibou, Sciences Po-CERI/CNRS
Compréhension, raisonnement causal et rapport aux valeurs
Présidé par Yves Duroux, CNRS
La démagification du monde : signification, causes et conséquences
Johannes Weiss, Université de Kassel
Weber sans Rickert
Henrik H. Bruun, Université de Copenhague
La sociologie wébérienne comme science interprétative
Jean-Pierre Grossein, Université Paris 8
Les chances de succès de l'action, ou l'individu augmenté
François Héran, INED
Le sens subjectivement visé : Husserl, Weber et Schütz
Laurent Perreau, Université de Picardie
Jeudi 5 octobre matin : 9h00 – 13h00
A l'IHA : 8 rue du Parc Royal 75003 Paris
Droit et gouvernement du social
Présidé par François Chazel, Université Paris 4
La sociologie wébérienne du droit
Hubert Treiber, Université de Hanovre
Le juriste et le politique : les enjeux de la législation sociale pour le droit
Claude Didry, CNRS-IDHES
Sociologie du droit et approches statistiques
Romain Melot, INRA
Domination et Herrschaft au regard des politiques sociales
Jean-Claude Barbier, CNRS
Lectures wébériennes de l’action policière au Nigeria et en Afrique du Sud
Laurent Fourchard, Sciences Po-CERI
Jeudi 5 octobre après-mid i: 14h30 – 18h00
A l'IHA : 8 rue du Parc Royal 75003 Paris
Bureaucratie
Présidé par Thomas Maissen, IHA
Bureaucratie et capitalisme : la conceptualité wébérienne dans la pratique historique
Jürgen Kocka, Université Libre de Berlin
Analyse wébérienne des bureaucraties africaines
Jean-Pierre Olivier de Sardan, EHESS-CNRS
Hiérarchie et hiérocratie. L'historien du Moyen Âge occidental au travail avec Weber et Troeltsch
Dominique Iogna-Prat, EHESS
Gouverner en entente au Maroc
Béatrice Hibou, Sciences Po-CERI/CNRS
Vendredi 6 octobre matin : 9h00 – 13h00
A l'IHA : 8 rue du Parc Royal 75003 Paris
Ethique et esthétique
Présidé par François Héran, INED
La dimension éthique de l’action : entre probabilités et normes
Pascale Gruson, CNRS
Le « démon » du journalisme : « ordre de vie » et « personnalité »
Gilles Bastin, IEP de Grenoble
La musique médievale et Weber
Etienne Anheim, EHESS
Rationalités en valeur : les relations à la décoration et à la peinture
Emmanuel Pedler, EHESS
Vendredi 6 octobre après-midi : 14h30 – 17h00
A l'IHA: 8 rue du Parc Royal 75003 Paris
Charisme
Présidé par François Héran, INED
Charisme et historiographie (19ème-20ème siècles)
Thomas Kroll, Université de Leipzig
Retour sur le puritanisme des autodidactes en islam
Mohamed Tozy, CRESC - Rabat
La notion de charisme : quelques jalons pour une perspective relationnelle
Michel Dobry, Université Paris 1
Reponsables scientifiques : Béatrice Hibou (Sciences Po-CERI/CNRS) et Jean-Pierre Grossein (Université Paris 8)
Ce colloque se déroule au CERI : 56 rue Jacob 75006 Paris et à l'IHA : 8 rue du Parc Royal 75003 Paris
INSCRIPTION OBLIGATOIRE - les inscriptions automatiques valent pour l'ensemble des trois journées du colloque