n° 9-1 | L’art en République | Richard Thomson

La société n’est pas hermétique à ce que Richard Thomson appelle une culture visuelle qui joue à son tour sur les mentalités. Dans le cas de la République française entre 1889 et 1900, il voit l’occasion de sortir des catégories établies d’une histoire de l’art qui se limite souvent à l’étude des avant-gardes en minimisant la notion de sujet. Ce qu’il y découvre en matière de lien entre les images et les débats de société est précieux. La décadence de la nation, du corps de la nation; le désir lancinant de revanche contre l’Allemagne — et les œuvres le montrent autrement plus clairement que les textes —; la formation des représentations darwiniennes de la foule et des classes laborieuses, classes dangereuses; la question religieuse, au moment où la République, fragilisée par la crise boulangiste et l’affaire Dreyfus, doit assouplir ses positions anticléricales; l’émergence et la diffusion des signes d’une sexualité dont la crudité renvoie aux relations entre les hommes et les femmes : rien de tout cela ne demeure étranger à l’art qui est moins illustration que réservoir de sensations fortes et de manières nouvelles.
Avec Richard Thomson, il n’est pas difficile de saisir combien nous aurions tort d’isoler le monde des formes en lui épargnant le poids de l’histoire. Il n’épouse pas littéralement l’histoire politique, sociale et économique mais agit selon ses propres tendances, ses rythmes et, s’il est affecté par son temps, il joue largement autant de son ascendant sur la marche des sociétés. L’auteur a fait sauter les frontières entre les différents champs des sciences humaines pour atteindre à une histoire des mentalités originale et il faut se réjouir de ce que son livre, The Troubled Republic. Visual Culture and Social Change in France, 1889-1900, devrait être traduit et publié en France. Rodolphe Rapetti, réputé pour ses écrits sur l’art du 19e siècle, lui répond à sa façon en rappelant à quel point il existe un genre d’histoire de l’art originale qui renouvelle notre vision d’un objet en apparence bien connu.

Laurence Bertrand Dorléac
Séminaire du 4 mai 2006

La République dans la tourmente :
culture visuelle
et débat social
en France, 1889-1900

Richard Thomson

L’objet de ma recherche concerne d’une part l’impact de la culture visuelle des années 1890 sur les mentalités de l’époque, et d’autre part l’influence que ces dernières ont exercé sur cette même culture. Les historiens d’art, surtout dans le monde anglo-saxon, s’intéressent plus volontiers à l’avant-garde, c’est-à-dire à un courant artistique qui s’adresse à une élite et à un public jeune, délaissant ainsi d’autres formes artistiques très diverses qui touchent, elles, des couches sociales plus vastes. Les historiens, quant à eux, se sentent mal à l’aise lorsqu’il s’agit d’analyser les images, et répugnent le plus souvent à examiner plus avant les liens qu’elles peuvent avoir avec leurs recherches. Si l’on part du principe que la culture visuelle recouvre la plus grande variété possible de formes de représentation ­ c’est-à-dire non seulement l’art d’avant-garde, mais aussi les monuments, la décoration des édifices publics, les affiches, la peinture de Salon, la caricature, les illustrations pour enfants, la photographie, etc. ­ en quoi cela peut-il modifier notre approche des mentalités de l’époque ? C’est à cette question que j’ai tenté de répondre dans mon livre The Troubled Republic (Presses universitaires de Yale, 2004 [ref]Richard Thomson, The Troubled Republic. Visual Culture and Social Debate in France, 1889-1900, Yale University Press, 2004[/ref]) en analysant le lien entre images et débat de société, à partir de quatre exemples précis.

Ces débats se déroulent dans un contexte agité : la France des années 1890 est en effet secouée par la chute rapide de plusieurs gouvernements, ainsi que par l’épisode boulangiste et l’affaire Dreyfus. Jamais, cependant, la notion de République n’est remise en question, et c’est en partie à travers les images que le régime tente de conforter son assise idéologique. Les tableaux exposés au Salon et achetés par l’État sont imprégnés des valeurs phares de la République – liberté, égalité, fraternité. Le régime souligne également sa démarche progressiste, rejetant la hiérarchie sociale, la superstition, les pesantes traditions. De plus en plus, le public se familiarise avec les dernières découvertes scientifiques. La Tour Eiffel témoigne des ambitions progressistes de la France, et domine les Expositions Universelles de 1889 et 1900. Les théories darwiniennes sur l’évolution et de la dégénérescence, traduites en français en 1862, touchent peu à peu un public élargi et s’étendent, dans les années 1890, à d’autres disciplines. En 1891, Jules Huret analyse ainsi la littérature contemporaine sous l’angle d’une concurrence entre naturalisme et symbolisme dans son Enquête sur l’évolution littéraire. De plus en plus on utilise les théories darwiniennes pour analyser et comprendre la société contemporaine. D’autre part, La Psychologie nouvelle de Jean-Martin Charcot et Hippolyte Bernheim modifient la façon d’analyser les mouvements de société. Les sociétés, comme les individus, sont sensibles à la suggestion, et certains termes cliniques tels que « surmenage » ou « neurasthénie » font leur entrée dans le langage courant. On ressent en outre une certaine angoisse liée à l’accélération du rythme de vie.

Une nation en dégénérescence ?

Pierre Puvis de Chavannes, La Sorbonne (terminé 1889). Paris, Grand Amphithéâtre de la Sorbonne.

Le premier débat abordé dans mon livre concerne la notion de dégénérescence du corps national, notion abondamment discutée par Max Nordau et Alfred Fouillée, entre autres [ref]Max Nordau, Entartung (Dégénérescence), Berlin, 1892; Alfred Fouillée, « Dégénérescence ? Le Passé et le présent de notre race », Revue des deux mondes, LXV, 15 octobre 1895, pp. 793-824.[/ref]. Cette notion est à l’opposé de l’idée d’évolution et de progrès, car elle suppose un problème physique et moral, susceptible de diagnostic, affectant non seulement le corps physique de l’individu mais aussi celui de la nation. Des taux d’alcoolisme et de maladies vénériennes en augmentation, une croissance démographique en berne et le surmenage sont autant de symptômes de cette dégénérescence. La dénatalité est un problème préoccupant. Entre 1891 et 1895 les décès excèdent les naissances en France, tandis que dans d’autre pays européens, et notamment en Allemagne, la population est en forte augmentation. C’est alors qu’entre en jeu la culture visuelle, qui contribue à l’effort entrepris pour enrayer la tendance, car cette culture est fondée sur le corps humain. En 1894, Pierre de Coubertin lance le mouvement olympique moderne dans l’enceinte de la Sorbonne, au pied de la fresque de Puvis de Chavannes (on considère alors que de Chavannes est un artiste « sain », dont la facture classique ne montre aucun signe de dégénérescence). La peinture est mobilisée pour promouvoir la santé corporelle, comme par exemple dans le tableau de Charles Crès, L’Inspection générale des exercices physiques au Prytanée Militaire, exposé au Salon de 1888. En 1903, Jean Geoffroy crée un triptyque rendant hommage au dispensaire La Goutte de lait fondé à Belleville par le Dr Gaston Variot pour enseigner aux femmes des couches populaires les méthodes modernes de l’hygiène du nourrisson. Ces exemples mettent en avant les valeurs d’une République démocratique, égalitaire, progressiste et scientifique, et vantent le plus souvent la maternité et la virilité. Mais il en existe d’autres qui jouent sur la notion de décadence. Edgar Degas et Pierre Bonnard explorent une imagerie sexuelle, prenant, me semble-t-il, conscience du rôle croissant joué par les fantasmes et la psychologie dans leurs toiles. En 1888, Degas expose chez Boussod et Valadon des pastels qui abordent crûment l’actualité sexuelle, et on s’étonne qu’un artiste ait osé dévoiler ce genre d’images au public de l’époque. Le tableau de Bonnard intitulé L’homme et la femme, qui date de 1900, offre peut-être un cas exemplaire d’auto-analyse du comportement psychosexuel de l’artiste. L’adultère est également un thème en faveur auprès des artistes, car il est non seulement un lieu commun de la caricature et du théâtre de boulevard, mais également un symptôme redouté de déclin social (par exemple, Hermann-Paul,: La Vie de Mme Quelconque, 1894). Les aspects les plus équivoques de la vie intime sont souvent représentés comme des diversions comiques qui posent un diagnostic pessimiste sur l’état physique et moral de la nation.

Analyser la foule

André Devambez, La Charge (1902). Paris, Musée d’Orsay

Le deuxième débat concerne la foule. La France avait connu de grandes insurrections populaires en 1830, 1848 et 1871 et, aux alentours de 1890, on craignait de voir le pays replonger dans un cycle de violence. Aucun mouvement révolutionnaire populaire des années 1890 ne parvient à renverser le pouvoir, mais la République reste très troublée par le souvenir de vastes manifestations, que ce soit au moment du Boulangisme vers 1888-9, ou du coup d’État manqué de Paul Déroulède et de la Ligue des Patriotes en 1898. La République redoute deux factions rivales et dangereuses pour elle : les socialistes sur sa gauche et les nationalistes sur sa droite. Mais il existe également des foules plus rassurantes, comme les 32 millions de visiteurs à l’Exposition Universelle de 1889 (peinte par Jean Béraud dans un tableau qui manifeste les notions d’égalité et de fraternité). Des intellectuels se penchent sur le sujet, afin d’analyser et de comprendre les phénomènes de foule afin de mieux les contrôler. Dans La Psychologie des foules, Gustave Le Bon s’inspire de la recherche médicale et des thèses darwiniennes pour expliquer le comportement de la foule, entité d’essence féminine, influençable et donc dangereuse si elle n’est pas manipulée [ref]Gustave Le Bon, La Psychologie des foules, Paris, 1895. [/ref]. Pour Le Bon, les idées infectent les foules comme une contagion ou une épidémie, et transforment les masses en un organisme unifié. Les théories de Le Bon pénètrent assez rapidement les milieux intellectuels. Zola, par exemple, inclut de nombreuses descriptions de foules dans La Débâcle, parue en 1892 avant le texte de Le Bon, sans parler de « contagion », contrairement à son roman Paris, publié en 1898, où le concept devient central. C’est sur ce postulat que repose à l’époque l’imagerie des foules. Celles que montre Jean Béraud à l’Exposition Universelle de 1889 sont de « bonnes » foules, enthousiastes, rassemblées autour d’une idée positive et consensuelle. Paul Buffet, en revanche, dans une scène tirée de Salambô (1894), peint une foule retournée à sa barbarie d’origine. On estime qu’il faut contrôler les instincts de la foule, soit de manière systématique en faisant par exemple appel à l’armée, soit par une idéologie positive et des rituels tels que le défilé du Quatorze juillet. On découvre donc des images très républicaines, comme l’immense tableau de Roll qui célèbre le Centenaire de 1789 (SNBA 1893) ou patriotiques, comme la peinture de Louis Loustaunau, Présentation de l’étendard aux recrues (SAF 1892). Le même genre d’images se retrouve dans les photographies de presse de l’époque, où la foule est représentée et unifiée par des idées positives – la République, l’armée, la nation – et contrôlée, structurée, par les systèmes rationnels que sont l’architecture urbaine et la loi représentée par le gendarme. À défaut d’être maîtrisés, les mouvements de foule peuvent déboucher sur une insurrection populaire, telle que la dépeint par exemple André Devambez en 1902 dans un tableau intitulé La Charge, où l’ensemble harmonieux formé par les forces de l’ordre est mis en contraste avec la masse noire et chaotique des fauteurs de trouble.

Religion ou République

Le troisième débat porte sur la question religieuse. Fondée sur le principe de laïcité, la Troisième République est cependant contrainte, à partir de 1890, d’envisager le rapprochement entre l’Église et l’État. Fragilisé par le nationalisme boulangiste, le mouvement centriste républicain cherche à asseoir son pouvoir, ce qui implique un assouplissement de ses positions anticléricales. Le pape Léon XIII, de son côté, reconnaît que la République est installée durablement et cherche à s’allier avec elle pour faire rempart au socialisme. Lancé par le Cardinal Lavigerie, la politique du Ralliement est un échec, mais débouche sur une remise en question par les artistes du lien entre l’individu et la foi religieuse. Il existe un art qui se veut « catholique avant tout », que ce soit le naturalisme prisé par de nombreux décorateurs d’églises, ou bien les solutions plus progressistes proposées par Maurice Denis. La Glorification de la Sainte Croix, peint par Denis pour l’église de Sainte-Marguerite au Vésinet, combine un chromatisme moderne avec un style simplifié dérivé de son admiration pour Fra Angelico, suggérant ainsi la continuité de la foi chrétienne. La piété du peintre est ici manifeste, ce qui n’est pas toujours le cas, et il est parfois difficile de déterminer quel point de vue adopte tel ou tel artiste. La Sainte-Claire-Deville peinte en 1890 par Léon Lhermitte pour l’École de Chimie semble à première vue célébrer l’homme de science, mais la composition de la toile évoque une représentation de la Cène. Le triptyque de Charles Cottet intitulé Les Adieux (1898) reproduit la même ambiguïté, avec son quiétisme et la patiente endurance des souffrances, peu surprenants de la part d’un artiste élevé chez les Maristes. D’autres artistes adoptent des positions manifestement anticléricales. C’est le cas par exemple de Paul Laurens qui, dans son Saint-Jean Chrysostome et l’Impératrice Eudoxie (1893), se sert d’un épisode de l’histoire byzantine pour critiquer l’ingérence de l’Église dans les affaires de l’État. Un sujet moderne, comme Devant Saint-Sulpice de Jules Gustave Besson (1896), opère une division ironique entre les pauvres de Paris et les séminaristes qui passent en procession derrière eux. Les artistes catholiques s’efforcent également de moderniser leur imagerie. Á l’École biblique de Jérusalem, fondée par les Dominicains en 1890, les chercheurs ont recours aux méthodes scientifiques de l’archéologie pour étayer leur interprétation des textes bibliques. C’est avec leur soutien que James Tissot conçoit en 1896 sa Vie de notre Seigneur Jésus-Christ, un ouvrage criant de vérisme. L’image la plus bizarre du livre est un tableau intitulé Ce que notre Seigneur a vu de la Croix, tentative extrême de reconstruction des faits. D’autres artistes catholiques sont plus modérés. C’est le cas d’Étienne Moreau-Nélaton, probablement lié au mouvement du catholicisme social d’Albert de Mun, et qui dessine une affiche soutenant la construction de Notre-Dame de Travail (1897), acte pieux d’un homme privilégié encourageant le prolétaire à placer sa foi dans l’Église plutôt que dans le socialisme. Les artistes ont bien entendu des prises de position différentes au sujet de la foi et de l’Église, mais leurs images, dans toute leur diversité, soulignent l’importance des débats religieux dans les années 1890.

Revanche ou regret ?

Edouard Detaille, Le Rêve (1888). Paris, Musée d’Orsay.

Le quatrième et dernier débat est particulièrement intéressant, car les historiens considèrent pour la plupart que la France a, dans les années 1890, renoncé en grande partie à l’idée de prendre sa revanche sur l’Allemagne et à reconquérir les territoires perdus. C’est sans doute le cas dans les milieux politiques, diplomatiques et militaires, mais l’idée reste bien présente dans les mentalités, comme le montrent les abondantes références à la revanche dans l’imagerie de l’époque. Il importe surtout de comprendre que l’imagerie peut opérer à des niveaux différents. Certaines représentations de l’armée, comme Le Photographe au régiment d’Eugène Chaperon (1899), mettent en avant les saines valeurs républicaines de la conscription – égalité, fraternité – sans idéologie revancharde. D’autres tableaux sont plus agressifs, tels que la gravure de collection Vive le Tsar! de Félix Braquemond (1893), qui célèbre l’Alliance Franco-Russe, ou encore l’extraordinaire Boucherie de Jean Veber, retirée du Salon National de 1897 à la requête de l’Ambassade d’Allemagne, indignée de voir que le boucher debout près de son étal de chair humaine a été représenté sous les traits de Bismarck. D’autres œuvres se cantonnent dans l’allusion. Le Rhin, une table réalisée par Émile Gallé et Victor Prouvé pour l’Exposition Universelle de 1889 montre les Gaulois et les Teutons séparés par un grand fleuve, accompagnés d’une citation de Tacite indiquant que cela correspond à l’ordre naturel des choses. Geneviève ravitaillant Paris, la peinture murale réalisée par Puvis de Chavannes au Panthéon entre 1893 et 1898, procède également par allusion en dépeignant une scène du Ve siècle qui évoque le siège de Paris en 1870-71. Vingt ans après la guerre franco-prussienne, il s’agit d’entretenir la mémoire du conflit. Des scènes de guerre sont souvent reproduites dans des gravures et des photographies destinées à une très large diffusion ; c’est le cas, par exemple, des Dernières cartouches d’Alphonse de Neuville (1873), ou d’Elle attend, icône quasi allégorique réalisée par Henner en 1871. On s’efforce également de présenter sans cesse des images militaristes aux enfants. Une affiche publicitaire pour un grand magasin de Bordeaux en 1899 en fournit un exemple; Nous les aurons, de Geoffroy (1899) utilise le fameux cri de ralliement patriotique de Jeanne d’Arc dans une scène où de jeunes garçons jouent au soldat. L’imagerie était multiple, et pouvait être interprétée de diverses manières. Le tableau d’Ernest-Jean Delahaye, Montbéliard : Paul Déroulède entre le premier dans la ville (1899), est une scène de propagande célébrant le héros nationaliste, tandis que Les Conscrits, peint en 1889 par Pascal Dagnan-Bouveret offre l’image générique de jeunes français partant faire leur devoir pour leur pays. Le Rêve d’Édouard Detaille (1888) montre des soldats fraternellement unis dans leur sommeil, rêvant de la gloire de leurs récents prédécesseurs à l’aube de la bataille. L’ennemi n’est pas identifié, et l’œuvre reste donc ambiguë. Dans le monument aux morts d’Édouard Lormier, intitulé Mort pour la patrie et exposé en 1898, la représentation réaliste du champ de bataille est rehaussée par la figure de la France, qui semble se précipiter à la rencontre du spectateur. Les tableaux et les monuments de ce genre pouvaient être interprétés différemment, selon l’idéologie ou la politique du moment. On pouvait y voir l’évocation passive du souvenir ou des valeurs collectives, mais y lire aussi l’appel à une guerre de revanche. Cette ambiguïté, cette souplesse de lecture étaient loin d’être anodines et, dans la culture visuelle, l’idée de revanche était bien présente.

Voilà brièvement exposé le panorama de mon livre, qui repose sur quelques idées maîtresses. Tout d’abord, si l’on veut comprendre la culture visuelle de cette époque, il faut voir au-delà de l’art d’avant-garde (sans le négliger) et étudier aussi l’art créé par, et pour la masse de la bourgeoisie et du peuple. Il est donc nécessaire de s’intéresser à une imagerie très variée, qui va de la plus pompeuse peinture murale à la plus insignifiante image de presse ou photographie. Il faut ensuite garder à l’esprit que l’analyse de la culture visuelle offre de riches perspectives pour comprendre les mentalités dominantes et opposées. Cette imagerie, dans toute sa diversité, ne constitue pas un répertoire passif des idées, des opinions et des préjugés de l’époque. Elle est bien plutôt une force dynamique qui modèle, articule et stimule les mentalités les mentalités populaires. En dernier lieu, en se situant à la croisée à la croisée de l’histoire et de l’histoire de l’art, on ouvre un champ de recherche particulièrement fécond.


Richard Thomson est Watson Gordon Professor of Fine Art à l’Université d’Edimbourg depuis 1996. Il est l’auteur de : Seurat (1985); Degas, les Nus (1988); Edgar Degas, l’Attente (1995); The Troubled Republic. Visual Culture and Social Change in France, 1889-1900 (2004). Il a été commissaire ou co-commissaire d’expositions, parmi lesquelles : Toulouse-Lautrec (Londres, Hayward Gallery/Paris, Grand Palais, 1991-1992); Theo Van Gogh (Amsterdam, Van Gogh Museum/Paris, Musée d’Orsay, 1999-2000); Monet, 1878-1883: the Seine and the Sea (Edimbourg, National Gallery of Scotland, 2003); Toulouse-Lautrec and Montmartre (Washington, National Gallery of Art/Art Institute of Chicago, 2005); Degas, Sickert, Toulouse-Lautrec. London and Paris, 1870-1910 (London, Tate Britain/Washington, Phillips Collection, 2005-2006).

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